Les démographes mettent en garde contre un effondrement imminent de la population

Les données sur la fécondité contredisent les prévisions de l'ONU concernant la surpopulation et la dévastation de l'environnement

Par Kevin Stocklin
8 juin 2022 18:25 Mis à jour: 8 juin 2022 18:25

Au milieu du déluge de prédictions catastrophiques selon lesquelles la population humaine va augmenter de façon exponentielle, épuiser les ressources de la planète et la surchauffer, deux études démographiques récentes prédisent le contraire, à savoir que le nombre de personnes atteindra son maximum au cours des prochaines décennies, avant d’entamer une phase de déclin régulier et irréversible.

Dans certains endroits, notamment au Japon, en Russie, en Corée du Sud et dans la plupart des pays d’Europe, cet effondrement de la population a déjà commencé. La Chine n’est pas loin derrière.

Les Nations unies ont prédit que l’humanité poursuivrait son expansion rapide au cours du siècle prochain, passant d’un peu moins de 8 milliards aujourd’hui, à plus de 11 milliards en 2100. Une interprétation de ces données souvent répétée est que les gens ont trop d’enfants, et de nombreux modèles de changement climatique et de dégradation de l’environnement sont basés sur des projections comme celle‑ci. En août, les Nations unies ont déclaré que le changement climatique et la surpopulation constituaient un « code rouge pour l’humanité », et les analystes de la banque d’investissement Morgan Stanley ont déclaré que le « mouvement visant à ne pas avoir d’enfants en raison des craintes liées au changement climatique est en pleine expansion ».

Cependant, une étude démographique financée par la fondation Gates et publiée dans la revue scientifique The Lancet, dresse un tableau bien différent. Cette étude, menée par des chercheurs de l’Université de Washington, prévoit que la population humaine mondiale atteindra un pic de 9,7 milliards d’ici quelques décennies, puis commencera à décliner. « Une fois que le déclin de la population mondiale aura commencé », écrivent les auteurs, « il se poursuivra probablement de manière inexorable. »

L’étude du Lancet prévoit que d’ici la fin du siècle, la Chine aura diminué de 668 millions d’habitants, perdant ainsi près de la moitié de sa population actuelle, et que l’Inde en perdra 290 millions. Malgré tous les efforts déployés pour inverser cette tendance en Chine, notamment en éliminant la politique de l’enfant unique et en offrant des incitations à l’éducation des enfants, les couples ne coopèrent pas. La Chine a connu en 2021, son cinquième record consécutif de faible taux de natalité.

C’est sur la base de telles constatations qu’Elon Musk, a déclaré en mai que « la civilisation va s’effondrer », en raison de la perte d’un si grand nombre de personnes. M. Musk avait déjà déclaré, lors d’une prise de parole en 2019, que « le plus grand problème auquel le monde sera confronté dans 20 ans est l’effondrement de la population ». Jack Ma, cofondateur de la société Alibaba Group, également présent lors de l’événement, a déclaré : « Je suis d’accord. »

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Elon Musk (à dr.), cofondateur et PDG de Tesla, et Jack Ma, coprésident du groupe de l’ UN High-Level Panel on Digital Cooperation, s’expriment sur scène lors de la World Artificial Intelligence Conference (WAIC), à Shanghai, Chine, le 29 août 2019. (Hector Retamal/AFP via Getty Images)

Manoj Pradhan, économiste et coauteur du livre « The Great Demographic Reversal » [Le grand renversement démographique, ndt.], prédit que la perte de population entraînera des changements économiques, politiques et sociaux spectaculaires. « L’avenir sera très, très différent du passé », déclare‑t‑il. Certaines des choses que nous vivons aujourd’hui, comme l’inflation élevée, les pénuries de main‑d’œuvre et le sacrifice du bien‑être économique pour protéger les personnes âgées et les personnes vulnérables, offrent un « aperçu de l’avenir ».

Les pays les plus peuplés du monde sont aujourd’hui la Chine et l’Inde, qui comptent toutes deux environ 1,4 milliard d’habitants et représentent ensemble un tiers de la population mondiale. Les États‑Unis arrivent loin derrière, avec 330 millions d’habitants. L’Indonésie, le Pakistan, le Brésil, le Nigeria, le Bangladesh, la Russie et le Japon complètent le top 10.

Selon The Lancet et d’autres études, les populations vont bientôt commencer à diminuer dans toute l’Asie et l’Amérique du Sud, rattrapant ainsi les déclins chroniques qui ont déjà lieu en Europe. Simultanément, l’Afrique sera une des rares régions à continuer d’accroître sa population, même si les taux de croissance y sont en baisse. Le Nigeria devrait gagner 585 millions d’habitants d’ici la fin du siècle, devenant ainsi le deuxième pays le plus peuplé du monde après l’Inde, la Chine tombant à la troisième place et les États‑Unis à la quatrième. Le Japon, la Russie et le Brésil disparaîtront bientôt complètement du top 10.

La principale divergence entre ceux qui prévoient une expansion rapide et ceux qui prédisent un déclin concerne les taux de fécondité. Darrell Bricker et John Ibbitson, co‑auteurs du livre « Empty Planet : The Shock of Global Population Decline » [Planète déserte : le choc du déclin de la population mondiale, ndt.], ont passé au peigne fin les données sur la fécondité dans le monde et voyagé sur six continents pour parler avec des personnes en Asie, en Afrique, en Amérique du Sud et en Occident. Ce qu’ils ont découvert concorde avec l’étude du Lancet : tant sur le plan statistique que sur le plan anecdotique, les taux de natalité dans le monde sont nettement inférieurs aux prévisions des Nations unies.

L’effondrement de la population est dû à ce que M. Bricker et M. Ibbitson appellent le « piège de la fécondité ». Pour qu’un pays puisse maintenir sa population, les femmes doivent avoir un taux de natalité moyen de 2,1 enfants. Une fois que le taux de fécondité d’un pays tombe en dessous de 2,1, il ne se redresse jamais.

En 2020, le taux de fécondité des États‑Unis était de 1,6, le taux le plus bas de l’histoire de l’Amérique et une forte baisse par rapport aux 3,7 de 1960. Le taux de fécondité moyen de l’Europe est de 1,5. Parmi les autres pays du top 10, l’étude du Lancet rapporte que le taux de fécondité du Japon est actuellement de 1,3. Le taux de fécondité de la Chine varie entre 1,3 et 1,5, selon la source, mais certaines estimations le situent à 1,15.

Le taux de fécondité de la Russie est de 1,6. Aujourd’hui, les décès sont nettement plus nombreux que les naissances en Russie, et le pays devrait perdre jusqu’à un tiers de sa population, d’ici 2050. Selon un rapport publié en janvier, par le magazine Foreign Policy, la perte de population de la Russie signifie qu’elle aura bientôt du mal à rassembler suffisamment de soldats pour un conflit militaire majeur, ce qui explique probablement ses récentes menaces d’utiliser des armes nucléaires.

En 1960, la femme moyenne dans le monde avait 5,2 enfants. Aujourd’hui, ce nombre est tombé à 2,4 et, selon les prévisions, à 2,2 d’ici 2050, ce qui correspond à peine au niveau de remplacement de la population mondiale. D’ici 2100, le Lancet prévoit que la fécondité mondiale sera de 1,66, en tenant compte des tendances actuelles en matière d’urbanisation, d’éducation des femmes, de participation à la vie active et d’accès au contrôle des naissances.

Passer d’un taux de natalité de 5 à un taux inférieur à 2, écrit Charles I. Jones, économiste à l’université de Stanford, est la différence entre « une croissance exponentielle à la fois de la population et du niveau de vie et une planète vide, dans laquelle les revenus stagnent et la population disparaît ». Le rapport de M. Jones, en mars 2022, intitulé « Consequences of a Declining Population » [Conséquences d’une population en déclin, ndt.], décrit ce qu’il appelle le « résultat de la planète vide », qui se caractérise non seulement par un déclin de la prospérité humaine, mais aussi par un appauvrissement de la culture, des idées et de l’innovation. « La croissance économique stagne, alors que le stock de connaissances et le niveau de vie se stabilise à des valeurs constantes », écrit M. Jones. « Pendant ce temps, la population elle‑même diminue à un rythme constant, vidant progressivement la planète de ses habitants. »

Pour les pays dont le taux de remplacement est inférieur, l’immigration peut contribuer à soutenir leur population pendant un certain temps, mais rares sont les pays qui autorisent une immigration importante et encore plus rares sont ceux qui la gèrent efficacement. La baisse mondiale de la fécondité signifie toutefois que même des pays comme les États‑Unis et le Canada, qui ont vu leur population croître grâce à l’immigration, pourraient bientôt atteindre eux aussi leurs sommets.

Si un avenir moins peuplé peut présenter des avantages sur le plan environnemental, survient toutefois un problème démographique. À mesure que l’humanité se réduit, la composition des sociétés change radicalement. La longévité est un facteur clé qui ralentit l’effondrement de la population – la durée de vie humaine moyenne est passée de 51 ans en 1960 à 73 ans aujourd’hui. Le Lancet prévoit que d’ici la fin du siècle, il y aura 2,4 milliards de personnes âgées de plus de 65 ans, contre seulement 1,7 milliard de moins de 20 ans. L’âge médian mondial est passé de 22 ans en 1960 à 30 ans aujourd’hui, et devrait atteindre 41 ans, d’ici 2100.

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Mamans avec des poussettes dans une rue commerçante de Pékin, Chine, le 13 juillet 2021. (Wang Zhao/AFP via Getty Images)

Une grande partie de la population mondiale sera plus âgée, au‑delà de l’âge de procréer, et plus dépendante d’un groupe toujours plus restreint de jeunes gens productifs pour s’occuper d’elle à la retraite. Cette pyramide inverse, où une minorité subvient aux besoins d’une majorité, n’est probablement pas viable. Une phrase couramment utilisée par les chercheurs à propos de pays comme la Chine est qu’ils « vieillissent avant d’être assez riches pour vieillir ».

L’urbanisation

Les démographes affirment que la baisse des taux de fécondité a plusieurs causes, mais ils désignent un facteur qui semble être à l’origine des autres : l’urbanisation. Lorsque les gens quittent la campagne pour s’installer dans les villes, l’aspect économique d’avoir des enfants change.

En termes purement monétaires, les enfants ne sont plus une source de travail pour les fermes, etc. mais plutôt une dépense. Aux États‑Unis, le coût moyen pour élever un enfant jusqu’à l’âge adulte, sans compter les frais d’université, est de 267.000 dollars. Une autre conséquence de l’urbanisation est que les femmes deviennent instruites, employées, indépendantes et ont un meilleur accès à la contraception. Quel que soit le pays, les femmes de par le monde ont toutes un comportement similaire : moins d’enfants et plus tard.

Selon les auteurs de « Empty Planet », moins d’un tiers de la population mondiale vivait dans des villes, en 1960. Aujourd’hui, un peu plus de la moitié des habitants de la planète sont des citadins ; d’ici 2050, ce chiffre devrait dépasser les deux tiers.

L’Afrique devrait passer de 44% de population urbaine aujourd’hui à 59% en 2050, et l’Asie de 52% à 66%. Le reste de la population mondiale est déjà urbanisé à plus de 80%. L’étude des Nations unies prévoit que la Chine passera de 16% de population urbaine en 1960 à 80% en 2050. Et les problèmes démographiques de la Chine sont exacerbés par le fait que sa politique de l’enfant unique, bien qu’officiellement terminée en 2016, a créé une pénurie de femmes aujourd’hui. Actuellement, la Chine compte 34 millions d’hommes de plus que de femmes, ce qui fait qu’une grande partie de sa population masculine atteint aujourd’hui l’âge adulte sans perspective de fonder une famille.

Le Japon est‑il la représentation de notre avenir ?

Selon certains, le Japon d’aujourd’hui est représentatif de ce que l’humanité connaîtra bientôt. Le Japon est urbanisé à 92% et sa population diminue d’environ un demi‑million de personnes chaque année. C’est une société assez homogène, avec peu d’immigration, et ses taux de nuptialité et de natalité baissent régulièrement. De ce fait c’est une nation du « quatrième âge », 20% de la population japonaise a aujourd’hui plus de 65 ans. Alors que le Japon vieillit et se vide, son économie est au point mort et la valeur des actifs chute.

L’indice boursier Nikkei du Japon s’est effondré dans les années 1990, passant d’un sommet de 39.000 à 20.000, marquant le « début d’une longue adaptation d’une économie jeune et à croissance rapide à une nouvelle normalité vieillissante et à croissance lente », explique l’économiste Martin Schultz. Les actions japonaises ne se sont jamais complètement rétablies. Trois décennies plus tard, l’indice Nikkei est actuellement à 27.000.

Après avoir augmenté de façon spectaculaire pendant des décennies, le PIB par habitant du Japon a plafonné en 1995 et n’a pas connu de croissance significative depuis. Avec une population vieillissante et en déclin, les ventes de couches pour adultes au Japon dépassent désormais celles des couches pour bébés, et certains des endroits les plus vides du Japon ont pris l’habitude d’installer des poupées grandeur nature dans les lieux publics, pour donner l’impression que ces endroits sont moins déserts.

À la question de savoir si le Japon représente notre avenir, M. Pradhan répond : « Malheureusement, non, car cela aurait été très réconfortant. Le Japon a vu sa démographie devenir déficitaire, alors que le reste du monde nageait dans la main‑d’œuvre. » Les entreprises japonaises ont pu prospérer malgré le déclin en déplaçant la main‑d’œuvre vers des endroits où la population était abondante, tandis que les travailleurs nationaux développaient l’automatisation pour augmenter leur productivité. Par conséquent, le Japon a jusqu’à présent évité l’inflation et les niveaux d’endettement qu’entraîneront la diminution et le vieillissement de la population.

Comme les pays produisent moins et consacrent de plus en plus de ressources à la prise en charge des personnes âgées, explique M. Pradhan, « nous allons assister à une augmentation des ratios dette/PIB dans des proportions que personne n’a jamais imaginées ». Cela entraînera une baisse de la croissance et une inflation chronique. La stagflation pourrait devenir une caractéristique permanente.

Il y a un aspect positif. La pénurie de main‑d’œuvre entraînera probablement une hausse des salaires et une plus grande égalité entre les personnes en âge de travailler. D’autre part, les technologies seront très sollicitées pour assurer les tâches les plus rudimentaires et libérer les hommes de ces travaux.

M. Pradhan cite l’exemple du gouvernement japonais qui subventionne les maisons de retraite pour qu’elles achètent des robots, afin de réaliser les aspects les plus simples des soins aux personnes âgées. « La productivité du Japon est une source d’espoir pour nous tous. » Il est également possible que les percées médicales améliorent la santé des personnes âgées et prolongent les années productives des peuples, ce qui permettrait de repousser la retraite à plus tard dans le cours de la vie.

Une autre chose très sollicitée sera l’empathie pour prendre soin des autres, ce que les familles faisaient traditionnellement pour les parents et les grands‑parents. « Je pense que c’est quelque chose que nous avons perdu dans une société mécanisée », affirme néanmoins M. Pradhan.

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