En Chine, l’amertume des habitants confinés par le coronavirus
For days now, several cities at the heart of China's deadly coronavirus epidemic have not recorded any new infections -- so residents such as factory worker Tang Wushan have a message for the authorities: it's time to lift their quarantine.
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-Des résidents portent des masques faciaux pour se protéger contre le coronavirus COVID-19, un homme à un poste de contrôle à la frontière de Shishou au sud de la province du Hubei et du comté de Huarong dans la province du Hunan le 5 mars 2020. Photo de NOEL CELIS / AFP via Getty Images.
Après plus de 40 jours de confinement au Hubei, épicentre de l’épidémie de Covid-19 en Chine, de nombreux habitants de la province réclament une levée de la quarantaine au moment où plusieurs villes n’enregistrent aucune nouvelle contamination.
Tang Wushan, ouvrier, fait partie de ceux-là. Tétanisé par le nouveau coronavirus, il n’a pas mis les pieds hors de sa maison de Xiangyang depuis la mise en place d’un vaste cordon sanitaire fin janvier.
La ville est située à quelque 260 kilomètres de Wuhan, la capitale régionale du Hubei, vaste région où plus de 50 millions de personnes sont placées en quarantaine.
Trop longtemps sans sortir
« Ça fait trop longtemps » sans sortir, soupire le trentenaire joint par téléphone et qui se dit aujourd’hui « proche d’une dépression ».
Les gens ne peuvent sortir de la commune où ils se trouvent. Et en sens inverse, nul ne peut entrer dans la province, sauf avec une autorisation spéciale.
Le Hubei représente toujours la quasi-totalité des nouveaux cas journaliers d’infections et de décès en Chine (27 dimanche, tous à Wuhan). Mais leur nombre baisse depuis plusieurs semaines, tandis que la maladie gagne du terrain ailleurs dans le monde.
“披麻戴孝” « Wearing white linen ,Wear white linen on head ”
This is the most traditional and sad way of expression for the dead relatives in China. They are holding the ashes of the dead in their hands! pic.twitter.com/TL0UoaDZwP
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Xiangyang, en revanche, n’a pas enregistré de nouveaux cas depuis 12 jours consécutifs. La ville de Xianning, entourée de plaines et de forêts au sud de la province, en totalise 15.
« Ces zones pourraient rouvrir progressivement »
« A certains endroits, il n’y a pas eu d’infections depuis le début de l’épidémie. Je pense que ces zones pourraient rouvrir progressivement », fait valoir M. Tang. Et il n’est pas le seul.
Depuis le week-end dernier, le mot-dièse « Quand le Hubei sera rouvert » a été lu plus de 100 millions de fois sur le réseau social Weibo, l’équivalent en Chine de Twitter.
« Ne peut-on pas inspecter la province et autoriser les gens à sortir par lots? », peste un internaute.
Depuis le début de l’épidémie, la maladie a fait plus de 3.000 morts dans le pays et contaminé plus de 80.000 personnes, la grande majorité à Wuhan où le virus est apparu en décembre sur un marché aux animaux sauvages.
95 pays et territoires ont à leur tour été contaminés. Et l’Italie, pays d’Europe le plus durement touché, a verrouillé dimanche une vaste zone de plus de 15 millions d’habitants comprenant Milan, la capitale économique.
Dans le Hubei, un utilisateur de Weibo réclame aux autorités un peu de clémence.
« Pourquoi traiter toute la province comme une tumeur? »
« A Wuhan, la situation est grave mais pourquoi traiter toute la province comme une tumeur? », se lamente-t-il.
Jiang, une jeune femme de 23 ans qui n’a pas souhaité donner son nom complet à l’AFP, assure continuer à payer chaque mois le loyer d’un logement à Shenzhen, près de Hong Kong, dans lequel elle ne peut pas remettre les pieds du fait de la quarantaine.
« Mais je dois continuer à payer », explique-t-elle.
Mme Jiang est coincée depuis le Nouvel an lunaire (qui tombait le 25 janvier cette année) à Enshi, à 550 kilomètres à l’ouest de Wuhan.
« Mon chat est toujours dans mon logement et je ne lui ai laissé que deux semaines de nourriture », se désole-t-elle.
Autre situation des plus dramatiques, celle décrite par une internaute: aucun hôpital près de Wuhan n’était en mesure d’accueillir sa grand-mère gravement malade.
« Hormis les patients atteints du coronavirus, la vie des autres n’a-t-elle pas de valeur? », s’interroge-t-elle.
Pénurie alimentaire, pas de salaire
Une jeune femme d’une vingtaine d’années, qui préfère taire son nom, affirme à l’AFP que les produits de première nécessité se font rares à Xiangyang par manque de livraison. Et sa famille ne survit que grâce aux légumes qu’elle cultive elle-même.
A l’inquiétude d’une pénurie alimentaire s’ajoute celle de sa situation professionnelle. Faute de pouvoir quitter la province pour retrouver son travail, le patron ne paye plus la jeune femme depuis la mise en quarantaine fin janvier. Mais ses factures s’accumulent…
Si la situation persiste, des gens pourraient en venir à « faire des choses extrêmes », prévient-elle.
Vendredi, un haut responsable chinois a laissé entendre que la province du Hubei pourrait bientôt être rouverte.
« Le jour que tout le monde attend ne devrait plus être si loin que ça », a-t-il affirmé lors d’une conférence de presse.