France: l’immigration à nouveau au Parlement, avec l’Aquarius en toile de fond

17 juin 2018 12:48 Mis à jour: 17 juin 2018 13:00

Un projet de loi français très contesté sur l’immigration va être discuté en milieu de semaine au Sénat, dans un contexte parlementaire déjà bien enflammé et une actualité chargée avec l’arrivée dimanche en Espagne du navire de migrants Aquarius. Le texte « pour une immigration maîtrisée, un droit d’asile effectif et une intégration réussie » doit être débattu par les sénateurs à partir de mardi. Il a été a été approuvé fin avril par l’Assemblée nationale, la chambre basse.  Les oppositions d’extrême droite, mais également de droite et de gauche, avaient toutes voté contre.

Et, pour la première fois depuis l’élection en 2017 d’Emmanuel Macron, un député de son parti LREM (La République en marche) avait lui aussi voté contre. Quatorze autres députés macronistes s’étaient abstenus, sur 312 élus LREM à l’Assemblée. C’est un signe de la « fébrilité » de la majorité, avait alors estimé Le Figaro, quotidien de droite.

La question migratoire est certainement le sujet le plus clivant parmi les soutiens au président Macron, comme elle l’est d’une manière générale en France, pays qui comptait près de 6 millions d’immigrés en 2014. Le sujet a été au centre de la campagne présidentielle l’an dernier, marquée par la qualification pour le deuxième tour de la cheffe de l’extrême droite, Marine Le Pen.

Pour défendre le projet de loi, le ministre de l’Intérieur, Gérard Collomb, n’a eu de cesse de défendre « l’urgence à réagir » pour limiter « une immigration massive » et « en même temps » garantir le droit d’asile, « sacré » en France. Le projet de loi vise ainsi à réduire à six mois, contre onze aujourd’hui, l’instruction de la demande d’asile, afin d’accélérer l’intégration. Parallèlement, il vise à faciliter l’expulsion des déboutés.

« On ne peut pas prendre toute la misère du monde », a déclaré Emmanuel Macron. La France a enregistré un peu plus de 100.000 demandes d’asile en 2017, un record, et a accordé l’asile à 36% des demandeurs. L’errance du navire humanitaire Aquarius, dont les plus de 600 migrants secourus en Méditerranée sont arrivés dimanche en Espagne, a une nouvelle fois jeté une lumière crue sur ce sujet épineux.

Tandis que droite et extrême droite dénoncent le « laxisme » d’une « petite loi » et évoquent une régularisation massive de clandestins, la gauche reste vent debout contre une loi « inhumaine », s’opposant en particulier au doublement de la durée maximale de rétention, portée à 90 jours, avec la possibilité maintenue « d’enfants derrière les barbelés ».

La bataille s’annonce donc tout aussi rude au Sénat. La droite, qui tient la chambre haute, estime que « ce texte n’est certainement pas à la hauteur des enjeux », déplore le président de la commission des lois Philippe Bas (LR, droite). « Le texte ne comprend aucune mesure significative ni sur l’éloignement des immigrants irréguliers, ni sur l’intégration de l’immigration régulière », accuse M. Bas, relevant que les demandes d’asile ont augmenté de 20,8% l’an dernier.

« Ce texte est inutile », affirme pour sa part le sénateur socialiste Jean-Yves Leconte, qui dénonce une stratégie visant à « montrer aux migrants qu’ils ne faut pas demander l’asile en France ». « C’est quelque chose qu’on ne peut pas cautionner alors que se déroule la tragédie de l’Aquarius », dit-il. La commission des lois du Sénat a ainsi retoqué plusieurs mesures du texte voté par l’Assemblée, en particulier le placement en rétention des mineurs isolés, et l’assouplissement du « délit de solidarité ».

Ce délit vivement décrié par les organisations humanitaires pénalise des citoyens venant en aide aux migrants nécessitant des secours. L’article adopté par l’Assemblée prévoit des « exemptions », notamment lorsqu’il s’agit de donner soins, hébergement ou nourriture. L’assouplissement de ce délit n’a de toute façon pas eu l’air de plaire aux ONG, Amnesty International France dénonçant un projet de loi « dangereux ».

Le texte doit faire l’objet d’un vote solennel de 26 juin. Il sera ensuite examiné par une commission mixte paritaire chargée de trouver une version commune aux deux chambres, puis renvoyé devant l’Assemblée, qui a le dernier mot en cas de désaccord.

DC avec AFP

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