Instagram prend de nouvelles mesures pour protéger les jeunes de l’exploitation et de l’exposition sexuelles en incluant une fonctionnalité qui permet de flouter automatiquement la nudité sur les messages directs.
La plateforme de médias sociaux explique dans son blog du 11 avril qu’elle teste de nouvelles fonctionnalités afin de lutter contre les escroqueries sexuelles et autres formes d’« abus d’image ».
Les nouvelles fonctionnalités visent à rendre plus difficile aux prédateurs sexuels et aux criminels en ligne de contacter des adolescents via la messagerie directe de la plateforme.
L’extorsion sexuelle, également appelée sextorsion, fonctionne comme le chantage : la victime se sent obligée d’envoyer des photos explicites d’elle-même. Une fois les photos reçues par les criminels, la victime est menacée d’être exposée publiquement, à moins qu’elle ne fournisse de l’argent ou des faveurs sexuelles en retour.
Parmi les cas notables de tels incident, citons celui de deux Nigérians qui ont plaidé coupable d’extorsion sexuelle sur des adolescents et des jeunes hommes du Michigan. L’un des garçons s’est ensuite suicidé. Un autre incident a vu un agent des forces de l’ordre de Virginie extorquer sexuellement et kidnapper une jeune fille de 15 ans.
La nouvelle initiative fait suite à des critiques croissantes et à des pressions exercées sur les plateformes de médias sociaux afin qu’elles fassent davantage pour protéger les jeunes, ce qui a conduit Mark Zuckerberg, PDG de Meta, à présenter des excuses aux parents des victimes de tels abus lors d’une audition devant le Sénat au début de l’année.
Instagram fait partie du conglomérat Meta, dont le siège se trouve à Menlo Park, en Californie. La fonction de flou de nudité ne s’appliquera toutefois qu’à Instagram et non aux autres applications de Meta comme Facebook ou WhatsApp.
Demandes d’images intimes
Selon Instagram, les demandes d’images intimes proviennent souvent d’escrocs via des messages directs dans les boîtes de réception des utilisateurs. La fonction de protection contre la nudité brouillera toutes les images de nudité des messages directs, en plus d’« encourager les gens à réfléchir à deux fois avant d’envoyer des images de nudité ».
« La fonctionnalité est conçue non seulement pour protéger les gens contre des images de nudité non désirées qui pourraient apparaître dans leurs messages directs, mais aussi pour les protéger contre les escrocs qui envoient des images de nu pour inciter les gens à envoyer leurs propres images en retour », a déclaré Instagram.
La fonction sera activée par défaut pour les moins de 18 ans, tandis que les utilisateurs adultes recevront une notification les encourageant à l’activer pour leur protection. Un avertissement concernant les images de nudité sera émis en parallèle, avec une option permettant soit de voir l’image, soit de bloquer et de signaler le tchat.
Les personnes qui envoient des messages directs contenant de la nudité seront invitées par message à faire preuve de prudence lorsqu’elles enverront des photos sensibles. Elles auront également la possibilité d’annuler l’envoi de ces images par la suite si elles changent d’avis, bien qu’il y ait un risque que les photos auront déjà été visionnées entre-temps.
Déconnexion familiale
Selon Rachel Goldberg, thérapeute conjugale et familiale, qui s’est entretenue avec NTD, une rupture entre les parents et leurs enfants contribue au problème, ce qui conduit finalement les enfants à ne pas aborder la question avec leurs parents lorsqu’elle se pose.
« Ces adolescents s’adressent d’abord à moi s’ils sont mes clients, plutôt qu’à leurs parents, ce qui est une question à laquelle il faut s’attaquer. Les parents doivent peut-être avoir cette conversation avec leurs enfants sur ce qui peut arriver et sur le fait qu’ils n’auront pas d’ennuis en s’adressant à eux », a expliqué Mme Goldberg.
Par ailleurs, certains estiment que la nouvelle mesure est un pas dans la bonne direction, même si elle ne va pas assez loin.
« Je pense que les outils annoncés peuvent protéger les expéditeurs, et c’est une bonne chose. Mais qu’en est-il des destinataires ? » a souligné Arturo Béjar, ancien directeur de l’ingénierie chez le géant des médias sociaux, connu pour son expertise en matière de lutte contre le harcèlement en ligne.
Selon M. Béjar, les avances non souhaitées faites aux adolescents sont fréquentes, environ une sur huit chaque semaine, d’après les recherches internes qu’il a menées chez Meta et qui ont fait l’objet d’un témoignage devant le Congrès en novembre dernier.
« De quels outils disposent-ils pour leur part ? Que peuvent-ils faire s’ils reçoivent un nu non désiré ? »
M. Béjar a estimé qu’aucun changement significatif n’interviendrait dans ce cas tant que les adolescents ne pourront pas dénoncer ouvertement les avances indésirables et que la question ne sera pas traitée en toute transparence.
La Maison Blanche s’est également exprimée sur le sujet, la secrétaire de presse adjointe Robyn Patterson notant le 11 avril que le président Biden a ouvertement exprimé son opinion quant à la possibilité pour les entreprises de médias sociaux de faire davantage pour lutter contre l’exploitation sexuelle en ligne.
Les procureurs généraux de 33 États, dont la Californie et New York, ont intenté une action en justice contre Instagram en octobre, l’accusant d’avoir trompé le public à plusieurs reprises sur les dangers de sa plateforme.
Instagram a indiqué qu’elle travaillait sur une technologie permettant d’identifier les comptes qui pourraient potentiellement être impliqués dans des escroqueries d’extorsion sexuelle « sur la base d’une série de signaux qui pourraient être révélateurs d’un comportement de sextorsion ».
Des mesures supplémentaires sont également prises pour empêcher les criminels d’entrer en contact avec les jeunes. Il s’agit notamment de ne pas montrer le bouton « message » du profil d’un adolescent aux comptes de sextorsion potentiels, même s’ils se suivent déjà l’un l’autre, et de tester de nouvelles façons de rendre les adolescents invisibles pour ces comptes.
Augmentation des cas de sextorsion
Le FBI a signalé en janvier une augmentation significative des cas de sextorsion visant spécifiquement les enfants. Il s’agit notamment de sextorsion financière, quand la victime est menacée d’être exposée publiquement à moins qu’elle ne paie l’auteur du crime.
Selon le FBI, bien que la majorité des cas visent des garçons âgés de 14 à 17 ans, les enfants de tout âge sont en danger.
D’octobre 2022 à mars 2023 plus précisément, le FBI a constaté une augmentation de plus de 20% des cas signalés de sextorsion financière impliquant de jeunes mineurs par rapport à la même période de l’année précédente.
L’Associated Press a contribué à la rédaction de cet article.
De NTD News
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