La loi Avia contre la haine en ligne, censurée au Conseil constitutionnel

Par Epoch Times avec AFP
18 juin 2020 20:15 Mis à jour: 19 juin 2020 11:12

Le Conseil constitutionnel a jugé que le texte portait « une atteinte » inadaptée à la liberté d’expression.

Jugeant certaines nouvelles dispositions attentatoires à la liberté d’expression, le Conseil constitutionnel a censuré jeudi 18 juin le cœur de la proposition de la loi controversée de Lætitia Avia (LREM) contre la haine en ligne, une « grande victoire » pour les associations du net et une « lourde défaite » de la majorité, selon les oppositions.

Dans le droit fil de l’engagement d’Emmanuel Macron depuis 2018 à renforcer la lutte contre la haine raciste et antisémite qui prospère sur internet, le texte porté par la députée LREM Lætitia Avia prévoyait pour les plateformes et moteurs de recherche l’obligation de retirer sous 24 heures les contenus « manifestement » illicites, sous peine d’être condamnés à des amendes allant jusqu’à 1,25 million d’euros.

Le Conseil a considéré que cette mesure pouvait « inciter les opérateurs de plateforme en ligne à retirer les contenus qui leur sont signalés, qu’ils soient ou non manifestement illicites ». Il a ainsi considéré que « le législateur a porté à la liberté d’expression et de communication une atteinte qui n’est pas adaptée, nécessaire et proportionnée au but poursuivi ».

Le Conseil constitutionnel a également censuré la disposition prévoyant un retrait en une heure pour les contenus terroristes ou pédopornographiques en cas de notification par les autorités publiques. Ces deux censures entraînent mécaniquement celle d’autres articles du texte, par effet domino.

Le ministère de la Justice a indiqué dans la soirée que le gouvernement prenait « acte de la décision » et « étudiera la possibilité de retravailler ce dispositif ».

« Je sais que c’est un combat de longue haleine et qui demande une prise de conscience. C’est devenu un débat de société, le sujet n’est plus minoré, ce qui est positif », a réagi Mme Avia.

« La loi décapitée sur la place publique »

Philippe Latombe (MoDem), unique député de la majorité à avoir voté contre le texte, a lui regretté « l’énergie et le temps dépensés à un dispositif législatif mort-né » après avoir cherché en vain à attirer l’attention « sur les faiblesses du dispositif proposé, sur ses effets pervers et contre-productifs, sur son inconstitutionnalité ».

« La loi est décapitée sur la place publique », s’est félicité Bruno Retailleau, le chef de file des sénateurs LR. Ceux-ci avaient déposé un recours au nom de la défense de la « liberté d’expression ». « On ne doit pas confier aux Gafa le pouvoir exorbitant de privatiser la censure et d’entraver la liberté d’expression », a-t-il réaffirmé. La décision des Sages est « une victoire pour les amoureux de la liberté » et « un désaveu pour tous ceux qui font profession de bien-pensance », a-t-il ajouté.

« Le gouvernement se heurte à l’État de droit », a réagi la présidente du Rassemblement national Marine Le Pen, pour qui la loi Avia « portait une atteinte sans précédent à la liberté d’expression ».

Le gouvernement « désavoué »

Selon une marcheuse, « le gouvernement n’a jamais été à l’aise avec ce texte », qui avait suscité de nombreuses réserves au-delà du monde politique, notamment du Conseil national du numérique, de la Commission nationale consultative des droits de l’Homme, ou encore de la Quadrature du Net, qui défend les libertés individuelles dans le monde du numérique.

Cette dernière a salué jeudi « une grande victoire collective à l’issue de plus d’un an de lutte ». « Le Conseil constitutionnel a désavoué le gouvernement dans l’ensemble de sa stratégie numérique, qui est complétement dépassée. Ce n’est pas comme ça qu’on régule internet », a déclaré Arthur Messaud, juriste à la Quadrature du Net.

« Le droit a eu le dernier mot ! », s’est félicité Christiane Féral-Schuhl, présidente du Conseil national des barreaux, tandis que l’Association des services internet communautaires (Asic), qui compte Google et Facebook parmi ses membres, poussait « un grand soupir de soulagement ».

 

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