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Le nombre 40 : un symbole millénaire de transformation et de renouveau

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« Christ dans le désert », 1872, par Ivan Kramskoï. Galerie Tretiakov, Moscou. Jésus jeûna dans le désert pendant 40 jours.

Photo: Domaine public

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Durée de lecture: 11 Min.

Certains nombres portent une signification presque mystérieuse dans la manière dont l’humanité raconte ses histoires. Le nombre 40 se distingue comme l’un des plus puissants. Encore et encore, dans les Écritures, les traditions, le folklore, et même dans la vie contemporaine, 40 marque une période d’épreuve, de transformation et de renouveau. C’est le nombre de l’attente, de l’épreuve, de la transition. Suffisamment longue pour nous transformer, mais heureusement limitée, afin que les héros qui la traversent puissent y survivre.
La Bible en est remplie d’exemples. Le déluge de Noé a duré 40 jours et 40 nuits, lavant un monde corrompu pour qu’une nouvelle alliance puisse commencer. Moïse a jeûné 40 jours sur le mont Sinaï avant de recevoir la loi de Dieu, et il a passé à nouveau 40 jours en intercession après le péché d’Israël. Les Israélites ont erré 40 ans dans le désert jusqu’à ce qu’une génération infidèle disparaisse et qu’un peuple renouvelé puisse entrer dans la Terre promise. Lorsque le prophète Élie était au plus bas, prêt à tout abandonner, il fut fortifié par une nourriture céleste et marcha 40 jours et 40 nuits jusqu’au mont Horeb, où il reçut une nouvelle mission.

Noé et son Arche, par Charles Willson Peale, 1819. Le Déluge dura 40 jours. (Domaine public/Wikimedia Commons)

Ce schéma se poursuit dans le Nouveau Testament. Jésus lui-même jeûne pendant 40 jours dans le désert, résistant à la tentation et se préparant à son ministère public. Après sa résurrection, il apparaît à ses disciples pendant 40 jours avant de monter au ciel, les enseignant et les envoyant en mission pour l’avenir. Dans chaque cas, le nombre 40 fait office de pont entre deux états : entre la corruption et l’alliance, le désespoir et la vocation, la tentation et le triomphe, la résurrection et la mission. C’est, en quelque sorte, un espace liminaire – un temps de transition – qui mène à quelque chose de totalement nouveau et inattendu.
La signification du nombre 40
Pourquoi 40 ? La réponse est à la fois pratique et symbolique. Ce nombre est le produit de 4 multiplié par 10. C’est le chiffre de la plénitude terrestre (les quatre points cardinaux, les quatre vents, les quatre coins de la terre) multiplié par celui de la loi et de l’ordre (les Dix Commandements). Traverser 40 jours, c’est subir la mesure complète de l’épreuve dans l’ordre créé, sous la surveillance divine. Même la punition, dans la Bible, obéit à cette logique : le maximum de coups de fouet autorisés par la loi mosaïque est de 40 – un jugement encadré par la miséricorde. Dans le judaïsme, le bain rituel de purification (mikvé) doit contenir au moins 40 séa d’eau (équivalant à 650 litres). La tradition rabbinique considère également que l’embryon devient une vie formée au bout de 40 jours.
Même dans le monde laïque, les résonances demeurent. Le mot « quarantaine » vient de l’italien quaranta giorni, « quarante jours », soit la durée pendant laquelle les navires devaient rester isolés lors des épidémies de peste avant d’être autorisés à revenir à quai. Une grossesse humaine, de la conception à la naissance, s’étend sur environ 40 semaines : une période naturelle de croissance cachée avant le commencement d’une nouvelle vie. Dans de nombreuses cultures, 40 jours de repos post-partum sont observés (parfois appelés « le mois d’or »), reconnaissant le besoin de récupération du corps et celui de création de liens au sein de la famille.
Encore et encore, le nombre 40 réapparaît comme celui de l’épreuve, de la purification et du passage. C’est la durée qui met à l’épreuve notre préparation à ce qui vient ensuite. Elle est assez longue pour faire tomber les illusions, mais pas interminable : le nombre 40 porte en lui la promesse qu’un renouveau est possible.
Le symbolisme du 40 ne s’arrête pas aux sphères de la foi ou des coutumes anciennes. Il imprègne encore notre quotidien, parfois d’une manière que nous ne percevons même plus.
Le nombre 40 dans les arts et la culture
Prenons le folklore et le célèbre conte d’« Ali Baba et les quarante voleurs ». Pourquoi 40 ? Parce que ce nombre évoque à la fois la multitude et la menace – une mise à l’épreuve du courage et de la ruse. Ali Baba n’affronte pas une poignée de brigands, mais l’incarnation même du danger, concentrée dans l’archétype du chiffre 40. Ici, ce nombre ne signale pas seulement un défi, mais une épreuve initiatique, exigeant ingéniosité et endurance.
Dans nos propres expressions, « la vie commence à 40 ans » est devenue un véritable proverbe culturel. Cette formule reconnaît le chiffre 40 comme un tournant, un moment où l’énergie de la jeunesse cède la place à une maturité affirmée. Les Anciens voyaient dans le nombre 40 le temps de l’épreuve avant le renouveau ; notre dicton moderne en fait un écho : à 40 ans, on est prêt pour un nouveau chapitre, plus ancré, plus résilient.
Les écrivains et les hommes d’État ont souvent joué avec cette symbolique. Winston Churchill est fréquemment crédité de cette remarque pleine d’esprit : « Si vous n’êtes pas libéral à vingt ans, c’est que vous n’avez pas de cœur. Si vous n’êtes pas conservateur à quarante ans, c’est que vous n’avez pas de cervelle. » Que cette citation soit authentique ou apocryphe, elle joue sur l’association culturelle entre le nombre 40 et la maturité et le discernement.

Illustration des 40 voleurs, 1945, par Albert Robidat dans Ali Baba et les quarante voleurs. (Domaine public)

De la même façon, Bob Hope plaisantait : « Elle disait approcher de la quarantaine, et je me suis demandé de quelle direction. » Victor Hugo, quant à lui, notait : « Quarante ans, c’est la vieillesse de la jeunesse ; cinquante ans, c’est la jeunesse de la vieillesse. » Et Mae West, avec son mordant habituel, affirmait : « Un homme a plus de caractère dans le visage à quarante ans qu’à vingt ans – il a souffert plus longtemps. » Toutes ces remarques traduisent une même intuition : la quarantaine marque le passage de l’épreuve à l’identité assumée.
Même la science et l’industrie reflètent cette thématique. L’un des produits ménagers les plus célèbres du XXe siècle, le WD-40, porte ce nombre dans son nom. Pourquoi ? Parce que ce fut la 40e tentative de son inventeur, Iver Norman Lawson, pour trouver la bonne formule d’un produit anti-humidité. Le succès est venu après une série d’échecs – une parabole moderne parfaite de l’association entre le nombre 40, la persévérance, et l’émergence d’un accomplissement.
L’histoire, elle aussi, fait écho à cette symbolique. Après la guerre de Sécession aux États-Unis, le général Sherman avait promis de redistribuer des terres aux anciens esclaves affranchis, avec des allocations de « 40 acres et une mule ». Bien que cette promesse fût en grande partie non tenue, l’expression est restée dans la mémoire collective et fut plus tard immortalisée par le réalisateur Spike Lee, qui donna ce nom à sa société de production. Une fois de plus, le nombre 40 apparaît comme un symbole d’espoir, de justice et de possibles nouveaux départs après l’épreuve et la servitude.
Le fait que ces motifs réapparaissent dans des contextes aussi variés – religion, folklore, littérature, invention, politique et culture populaire – suggère que le 40 reste ancré dans l’imaginaire humain comme un nombre seuil. Il est assez long pour éprouver, mais suffisamment limité pour donner de l’espoir. Il évoque la patience, la résilience et la possibilité d’une transformation.
Ce n’est pas qu’un simple symbole. Certains psychologues et coachs de vie aujourd’hui (bien que d’autres théories existent) soulignent que 40 jours constituent une période efficace pour changer des habitudes, instaurer de nouvelles disciplines ou rompre avec des addictions. La « détox digitale » moderne s’appuie souvent sur un modèle de 40 jours : assez long pour réinitialiser les circuits neuronaux, assez court pour rester réaliste. Ainsi, intuition ancienne et science moderne convergent.
En définitive, le nombre 40 nous rassure : nos épreuves ne sont pas sans fin. Il marque ce moment où la difficulté laisse place à la croissance, où l’épreuve se transforme en métamorphose. Que ce soit dans les textes sacrés, le folklore ou les expressions familières de notre langage quotidien, le 40 murmure toujours la même vérité : le chemin de l’épreuve, bien que exigeant, n’est pas infini, mais limité, et c’est à partir de là qu’il mène au renouveau.