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Que pourrait signifier l’évolution des modèles d’investissement en Chine ?

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Des banlieusards se précipitent au travail alors que les immeubles du quartier central des affaires sont enveloppés d'un épais brouillard, le 15 novembre 2024 à Pékin, en Chine.

Photo: de Kevin Frayer/Getty Images

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Durée de lecture: 6 Min.

Les investissements étrangers des entreprises chinoises – privées, publiques et étatiques – ont chuté brutalement. Certes, les données provenant de sources chinoises sont assez fragmentaires, ce qui rend les conclusions qui en sont tirées au mieux provisoires.
Néanmoins, les informations disponibles permettent de tirer trois conclusions.
Premièrement, Pékin doit utiliser les ressources nationales qui étaient auparavant envoyées à l’étranger pour contrer les effets de la crise immobilière et les problèmes économiques et financiers qui y sont associés. Deuxièmement, l’initiative « la Ceinture et la Route », qui mobilisait auparavant d’énormes sommes de Pékin et des entreprises publiques, a rencontré des problèmes qui ont incité les autorités chinoises à la prudence. Troisièmement, et c’est là l’hypothèse la plus spéculative, ces tendances ont pris le dessus sur un mouvement inverse, les investisseurs privés chinois cherchant des moyens de sortir leurs actifs du pays.
Avant même d’en considérer la signification, les chiffres bruts des investissements sortants sont frappants. Selon le China Global Investment Tracker (CGIT), compilé par Derek Scissors de l’American Enterprise Institute, les investissements chinois – provenant de sources privées, d’entreprises publiques et de Pékin – ont culminé en 2017, à l’équivalent de 175,1 milliards de dollars. Après ce pic, les flux financiers à l’étranger ont diminué d’environ 45 % au cours des deux années suivantes. Ils ont naturellement diminué à nouveau pendant l’année de la pandémie de 2020, avant de rebondir d’environ 16 % pendant la reprise économique de 2021.
Ce bond reflète peut-être une volonté de trouver des opportunités alors que l’économie chinoise souffrait des quarantaines et confinements décrétés par Pékin pour lutter contre le Covid-19. Mais les flux financiers internationaux ont repris leur déclin en 2022 et ont poursuivi cette tendance jusqu’au premier semestre de cette année, où les sorties de capitaux d’investissement ont atteint en moyenne l’équivalent d’environ 44 milliards de dollars, soit environ 75 % de moins que le pic de 2017.
Certes, les chiffres du CGIT diffèrent quelque peu de ceux fournis par le ministère du Commerce de Pékin, mais les deux montrent néanmoins le déclin des investissements à l’étranger. Et si les incertitudes suscitées par les droits de douane imposés et les menaces brandies par le président américain Donald Trump exagèrent l’ampleur du déclin en 2025, la tendance à la baisse est indéniable, surtout si on la compare à la croissance spectaculaire de ces flux avant 2017.
Bien qu’il n’existe pas de lien clair entre ces flux d’investissement en baisse et les difficultés économiques et financières plus générales de la Chine, il est difficile de nier tout lien. L’effondrement de plusieurs grands promoteurs immobiliers et les faillites de prêts hypothécaires qui ont suivi ont certainement privé la finance chinoise – privée et publique – de fonds, notamment de moyens pour investir à l’étranger.
Le ralentissement de l’activité économique chinoise qui a suivi ne pouvait être dû qu’à la disponibilité de ces fonds. Le fléchissement des flux témoigne clairement de la gravité des difficultés économiques et financières de la Chine, au point de contrecarrer l’impulsion donnée aux transferts de capitaux à l’étranger, implicite dans la baisse de confiance des ménages et des entreprises chinoises.
Le déclin des investissements à l’étranger semble également refléter le besoin de Pékin de disposer de fonds pour stimuler l’activité économique nationale. Il convient de noter que les efforts déployés par les autorités chargées de la planification en 2023 et 2024 pour développer considérablement le secteur technologique chinois ont certainement détourné des milliards de dollars au détriment de l’ambition de Pékin d’utiliser les investissements à l’étranger pour renforcer son influence mondiale. Les chiffres relatifs à cette demande intérieure de fonds sont fragmentaires, mais les estimations avoisinent les 100 milliards de dollars consacrés à ce développement technologique, dont 8 milliards pour les start-ups spécialisées dans l’intelligence artificielle.
Pendant ce temps, l’initiative « la Ceinture et la Route » (BRI) tant vantée par Pékin s’est heurtée à la résistance de ses partenaires actuels et potentiels, ce qui pourrait suffire à ralentir les flux financiers provenant du gouvernement et des entreprises publiques vers cette initiative internationale. Vous pouvez lire plus de détails à ce sujet ici.
En 2023 et 2024, le dirigeant chinois Xi Jinping a tenté de surmonter cette résistance en allouant davantage de fonds à « la Ceinture et la Route », notamment sous forme de prêts aux pays bénéficiaires. Cependant, la baisse continue des flux internationaux indique que cet effort pourrait bien avoir lui aussi échoué.
Bien que ces flux d’investissement – ou plutôt leur relative absence – ne permettent pas de tirer de conclusions définitives sur la gravité des difficultés économiques internes de la Chine ou sur la résistance à la BRI, ils confirment néanmoins d’autres signes de difficultés économiques et financières fréquemment évoqués dans cette chronique. À tout le moins, ils rappellent l’existence de ces graves difficultés et méritent donc d’être surveillés.

Les opinions exprimées dans cet article sont celles de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement celles d’Epoch Times.

Milton Ezrati, auteur, est collaborateur de la rédaction de The National Interest, une filiale du Centre d'études sur le capital humain de l'université de Buffalo (SUNY), et économiste en chef de Vested, une société de communication basée à New York. Avant de rejoindre Vested, il a été chef de la stratégie de marché et économiste pour Lord, Abbett & Co. Il écrit également fréquemment pour le City Journal et blogue régulièrement pour Forbes.

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