Logo Epoch Times

La Nièvre, eldorado de l’hélium, pour la première fois extrait en Europe de l’Ouest

top-article-image

Une partie des installations de traitement du gaz de la première unité pilote de production d'helium en Europe, Saint Parize le Chatel, France, le 11 septembre 2024.

Photo: FREDERIC MOREAU/Hans Lucas via AFP/AFP via Getty Images

author-image
Partager un article

Durée de lecture: 6 Min.

Pour la première fois en Europe de l’Ouest, de l’hélium, gaz rare jusqu’alors totalement importé, est extrait du sous-sol en pleine campagne à Saint-Parize-le-Chatel (Nièvre) et les promoteurs du projet espèrent couvrir jusqu’à 15% des besoins de la France. L’exploitation pourrait déboucher sur la création d’un pôle industriel pourvoyeur de nouveaux emplois. 
Entre prés à vaches et épaisses forêts, cette petite unité pilote de production d’hélium a été inaugurée cette semaine à Saint-Parize-le-Chatel (Nièvre), à environ 250 kilomètres au sud de Paris, et commencé à extraire ce gaz, non toxique et ininflammable, devenu incontournable dans l’électronique ou l’aérospatial.
Le bien-nommé hameau des Fonts-Bouillants recèle depuis des millénaires des sources d’eaux gazeuses.
Selon la légende, des thermes romains y avaient été installés, après la guérison d’une Légion entière atteinte de la lèpre. Au XIXe siècle et jusqu’en 1975, ces eaux étaient exploitées en tant qu’eaux minérales. Mais la « Fontaine des vertus » était depuis longtemps tombée dans l’oubli. Jusqu’à ce que deux ingénieurs fondent en 2017 la société 45.8 Energy, basée à Metz (est) qui ambitionne de produire un « hélium européen et souverain », selon leur credo.
« L’empreinte carbone est incomparable »
L’hélium constitue à la fois « un non-sens écologique et économique », déplore la start-up : les 32 millions de mètres cubes consommés en Europe de l’Ouest, soit le deuxième marché mondial, sont totalement importés, principalement des États-Unis, du Qatar et d’Algérie.
Pour être transporté sur une longue distance, l’hélium doit être liquéfié à une température de -269° C degrés, « donc ça demande beaucoup d’énergie », explique à l’AFP Antoine Petat, chargé d’exploitation chez 45.8 Energy. Et l’opération doit être inversée une fois le gaz arrivé chez les clients : « on le liquéfie, on le transporte et on le regazéifie pour l’utiliser ».
En revanche, en l’extrayant en Europe même, près des consommateurs et donc sur de courtes distances, 45.8 Energy peut transporter l’hélium à l’état gazeux. « L’empreinte carbone est incomparable », assure Antoine Petat.
« Un gaz clef »
Sans compter l’intérêt strictement économique, puisque le cours de l’hélium importé a triplé ces cinq dernières années.
Ce gaz est devenu essentiel à nombre de secteurs. Bien plus que les usages de loisirs pour lesquels il est connu du grand public, comme la plongée ou les ballons, dont celui transportant la vasque des Jeux olympiques et paralympiques de Paris, l’hélium est incontournable dans l’électronique, notamment les semi-conducteurs, la fibre optique, les laboratoires…
« L’hélium est un gaz clef », souligne Jacques Pironon, chercheur du CNRS au laboratoire GéoRessources de Nancy.
À tel point que l’Union européenne « l’a inscrit sur la liste des ressources critiques » en 2023, rappelle-t-il. D’ici à 2030, 10% de l’hélium devront être extraits localement dans l’UE, a décrété l’Union.
« Il faut vraiment sortir de cette vision importatrice, car le bilan carbone est déplorable. Il ne devrait y avoir aujourd’hui qu’un seul mot d’ordre : recentrer la production », estime ce spécialiste des ressources gazières.
Dans cette quête de « souveraineté », 45.8 Energy découvre à l’été 2018, en étudiant des rapports géologiques de plus de 200 sources naturelles en France, que des gaz s’échappent des Fonts-Bouillants. « On a voulu venir voir par nous-mêmes et, effectivement, on s’est rendu compte que ces sources recrachaient bien de l’hélium en forte concentration », se souvient Nicolas Pelissier, cofondateur et président de 45.8 Energy.

En cliquant sur le bouton Suivant, vous acceptez que le contenu de twitter soit chargé.

Des emplois à la clef
En 2021, un permis de recherches est accordé et, la société a réussi plusieurs levées de fonds (31,5 millions d’euros au total).
« Aujourd’hui, c’est une unité pilote, donc c’est encore modeste. Mais on travaille déjà à une production industrielle », précise Nicolas Pelissier, devant un forage en cours qui analyse les sols jusqu’à 1300 mètres de profondeur en lisière d’un champ bordé de forêts.
L’implantation d’une unité de production à Saint-Parize-Le-Châtel constitue une bonne nouvelle pour le territoire. « Ce sera un surplus économique pour le département et la commune. On va devoir embaucher. On a fait une étude en 2021, pour un emploi direct chez nous, deux seront créés. L’hélium est une ressource très stratégique. On s’attend à créer un pôle industriel, avec l’arrivée de nouvelles entreprises sur le site », explique à France3 la responsable de la communication à 45-8 energy, Camille Sigu.
« On a identifié plusieurs gisements potentiels sur le territoire. L’objectif est que la production apporte jusqu’à 15% des besoins français en hélium », selon le président de 45.8 Energy.
« C’est significatif », juge Jacques Pironon. « Oui, il y a un potentiel en Europe, même si c’est encore difficile d’en avoir une vision claire. »