Dermatose : les forces de l’ordre prennent le contrôle d’une ferme ariégeoise après des affrontements
Les forces de l’ordre ont pris, dans la soirée de jeudi, le contrôle d’une ferme ariégeoise où plusieurs dizaines d’opposants s’étaient retranchés pour empêcher l’abattage d’un troupeau de vaches atteint par la dermatose nodulaire contagieuse (DNC), a constaté un journaliste de l’AFP présent sur place.

Des gendarmes mobiles font face à plus de 500 agriculteurs de la Confédération paysanne et de la Coordination rurale lors d’une mobilisation contre l’abattage total des troupeaux touchés par la MDC, aux Bordes-sur-Arize (Ariège), le 11 décembre 2025.
Photo: Antoine Berlioz / Hans Lucas / AFP via Getty Images
Peu avant 23 heures, les gendarmes mobiles ont donné l’assaut sur l’exploitation située dans le village des Bordes-sur-Arize, en utilisant des gaz lacrymogènes pour disperser les manifestants. La soirée a été marquée par des affrontements sporadiques : aux grenades lacrymogènes répondaient des jets de projectiles dans une atmosphère tendue, éclairée par les flammes des bottes de foin et des palettes incendiées.
Un dispositif de force pour « sécuriser l’exploitation »
« L’action conjointe des forces de sécurité intérieure a permis de sécuriser l’exploitation agricole. La situation est désormais sous contrôle », a indiqué la préfecture de l’Ariège peu avant minuit.
Depuis mercredi matin, après l’annonce du cas de DNC, des agriculteurs s’étaient rassemblés pour bloquer l’accès aux services vétérinaires venus procéder à l’euthanasie de 207 blondes d’Aquitaine. Au plus fort de la mobilisation, plusieurs centaines de personnes — membres de la Coordination rurale (CR), de la Confédération paysanne ou simples sympathisants — avaient protesté dans le calme.
Le préfet de l’Ariège avait affirmé jeudi soir que les deux frères propriétaires du troupeau avaient donné leur accord pour l’abattage, conformément au protocole sanitaire prévu. Une version contestée par Pierre-Guillaume Mercadal, dirigeant de la CR du Tarn-et-Garonne, présent sur place. « Ils sont deux frères, un a cédé, l’autre non. Ils sont en train de déchirer cette famille, en plus de l’accabler du deuil de leurs vaches », a-t-il rétorqué.
L’abattage, « seule méthode efficace »
Selon la préfecture, l’abattage restera « la seule méthode efficace pour éviter que la maladie se diffuse dans l’ensemble du cheptel français ». Il doit intervenir « dès que possible », avant le lancement d’une campagne de vaccination départementale. Sur les 33.000 bovins que compte l’Ariège, 3.000 ont déjà été vaccinés le mois dernier dans les zones proches des Pyrénées-Orientales, où plusieurs foyers ont été repérés.
Les syndicats agricoles locaux et la chambre d’agriculture avaient proposé au ministère de l’Agriculture un protocole expérimental, visant à limiter l’abattage aux seules bêtes contaminées et à lancer une vaccination massive. Leur requête est restée lettre morte. La réglementation actuelle impose en effet l’abattage intégral du troupeau touché et la création de « zones réglementées » dans un rayon de 50 km autour du foyer, restreignant les déplacements de bovins.
Dans les Hautes-Pyrénées, un autre troupeau d’une vingtaine de bêtes doit être euthanasié ce vendredi, a annoncé le préfet Jean Salomon. Une mobilisation d’éleveurs s’y est également formée pour tenter de s’y opposer. « Les tentatives de blocage ou les regroupements observés en proximité des exploitations font courir à tous les éleveurs un risque de propagation supplémentaire de la maladie », a prévenu M. Salomon.
Tensions croissantes dans le monde agricole
En Ariège, la résistance demeure vive. « C’est vraiment une place de résistance et j’espère qu’elle va tenir le plus longtemps possible », lançait jeudi après-midi Bertrand Venteau, président de la CR. « La mobilisation paye, ça a retardé l’échéance », affirmait-il encore, appelant à « une grande unité du monde agricole » et à une vaccination généralisée.
Très critique envers le gouvernement, il a interpellé la ministre de l’Agriculture : « Annie Genevard doit changer sa politique, sinon elle va nous foutre le feu dans les campagnes », estimant que la maladie « n’est pas sous contrôle ».
Apparue en France en juin, la DNC — non transmissible à l’homme mais mortelle pour les bovins — serait pourtant « sous contrôle », assure le ministère de l’Agriculture, qui a lancé mardi une réflexion sur la vaccination préventive du cheptel.
La FNSEA, contrairement à la CR et à la Confédération paysanne, se montre plus prudente. Son président, Arnaud Rousseau, a rappelé mardi son opposition à une vaccination généralisée, en raison du « risque d’effondrement des exportations et des prix » qu’elle pourrait provoquer. Jeudi soir, il s’est toutefois dit favorable à « une extension de la zone vaccinale au-delà des zones réglementées ».
Les cas de DNC recensés en Ariège et dans les Hautes-Pyrénées sont les premiers enregistrés dans ces départements depuis la découverte du foyer initial en Savoie, le 29 juin 2025.

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