« Le pire moment de l’histoire » : l’invasion russe en Ukraine pourrait déclencher la Troisième guerre mondiale, selon le journaliste Gordon Chang

Par Joshua Philipp
2 mars 2022 21:58 Mis à jour: 2 mars 2022 23:38

Selon l’auteur et journaliste chinois Gordon Chang, l’invasion de l’Ukraine par la Russie pourrait déclencher un conflit mondial, dans lequel Pékin et ses mandataires, enhardis, exploiteraient la situation pour réaliser leurs propres ambitions.

« Nous ne pensions pas que Poutine allait envahir l’Ukraine. Et donc, à l’heure actuelle, le monde est totalement différent, et nous devons abandonner nos suppositions, et nous devons commencer à nous défendre », a récemment déclaré M. Chang au cours de l’émission Crossroads d’Epoch TV.

Il y a deux raisons pour lesquelles le conflit militaire en Ukraine pourrait devenir mondial, selon M. Chang.

Du côté russe, « Poutine ne va pas s’arrêter à l’Ukraine », mais va probablement s’en prendre aux membres de l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (OTAN) et déstabiliser toute l’Europe de l’Est.

Ensuite, il y a la Chine, qui s’est largement alliée à la Russie dans leur opposition mutuelle aux États‑Unis, et qui sera influencée par la façon dont le monde réagira à l’attaque de la Russie.

« Je ne sais pas où cela va aboutir. Mais nous ne pouvons pas exclure les pires scénarios », poursuit M. Chang.

Le président russe Vladimir Poutine a placé les forces nucléaires du pays en état d’alerte, ce qui a fait monter les tensions et fait planer le spectre d’une guerre nucléaire.

« Nous parlons de l’impensable », continue M. Chang.

Absence de leadership américain

Avec l’éclatement de l’Ukraine par la Russie, les nations attendent des États‑Unis qu’ils prennent le relais en tant que leader mondial. Mais le modèle de réponse des États‑Unis depuis le début a été « extrêmement troublant », estime le journaliste.

Si l’administration Biden voulait montrer qu’elle était « sérieuse » dans sa volonté de dissuader Poutine, le président aurait dû prendre des mesures avant l’invasion.

« Avant que le premier soldat soviétique russe ne mette un pied en Ukraine, vous éliminez leurs banques de SWIFT. Vous arrêtez le gazoduc Nord Stream 2. Vous coupez complètement la Russie, non seulement du système bancaire mais aussi de l’économie mondiale. Vous vous en prenez à Poutine. Vous émettez des notices rouges à Interpol. »

Une vue de la place à l’extérieur de l’hôtel de ville local endommagé de Kharkiv le 1er mars 2022, détruit à la suite du bombardement mené par les troupes russes. (Sergey Bobok/AFP via Getty Images)

« Biden n’a rien fait. Sa seule idée était que nous imposions des sanctions après leur invasion. Eh bien, c’est trop tard. »

Gordon Chang y voit « une approche très peu enthousiaste de l’utilisation de la puissance américaine ».

« Nous voyons les mêmes motifs qui ont abouti au déclenchement de la Seconde Guerre mondiale en Europe. »

« La Chine voit cela, elle voit l’échec de la politique américaine, elle pense qu’elle peut faire ce qu’elle veut en ce qui concerne Taïwan, ou le Japon, les Philippines, l’Inde ou Dieu sait où. »

« Nous pourrions donc assister à des conflits simultanés aux deux extrémités du continent eurasien. Nous pourrions voir leurs mandataires, la Corée du Nord, l’Iran, le Pakistan, peut‑être même l’Algérie agir pour profiter de la situation lorsque des guerres auront lieu dans tous ces endroits. Oui, ça c’est une troisième guerre mondiale. »

Renforcer le partenariat

Pékin est loin d’être un simple observateur attentif en arrière‑plan, estime M. Chang.

Ces dernières années, le régime a renforcé ses liens avec Moscou. Avant la cérémonie d’ouverture des Jeux olympiques, le dirigeant chinois Xi Jinping a reçu Poutine comme son invité le plus en vue et a signé un pacte préconisant un partenariat « sans limites ».

Gordon Chang relève que le communiqué conjoint publié ultérieurement, de 5 000 mots, décrit cette relation bilatérale comme « supérieure aux alliances politiques et militaires de l’époque de la guerre froide ».

« C’était, je pense, le langage de Moscou, et Pékin l’a accepté, ce qui décrit assez bien la situation dans laquelle ils sont aujourd’hui. »

Selon M. Chang, soutenir Poutine semble être la « ligne de fond » de la Chine. Ces derniers jours, le ministère des Affaires étrangères chinois a critiqué les sanctions occidentales à l’encontre de la Russie et a déclaré que les échanges commerciaux avec la Russie se poursuivraient normalement sur la base d’intérêts mutuels.

Le président russe Vladimir Poutine (à gauche) et le dirigeant chinois Xi Jinping arrivent pour une photo lors de leur rencontre à Pékin, le 4 février 2022. (Alexei Druzhinin/Sputnik/AFP via Getty Images)

La rencontre entre Poutine et Xi Jinping au mois de février a également débouché sur de nouveaux accords pétroliers et gaziers d’une valeur de près de 118 milliards de dollars. Un autre contrat, signé le 18 février, prévoit que la Russie fournira 100 millions de tonnes de charbon à la Chine dans les prochaines années. Le jour de l’attaque lancée par la Russie, la Chine a également levé les restrictions à l’importation de blé qui avaient été imposées à Moscou.

La Russie et la Chine « présentent désormais un front uni face aux États‑Unis » et au monde entier, conclut M. Chang, notant que les deux pays ont procédé à des exercices militaires conjoints ces derniers mois. Les soldats russes ont déployé du matériel militaire chinois pour la première fois en août dernier.

« La réalité est que, ici et maintenant, la Chine et la Russie sont sur la même longueur d’onde. Elles voient que leurs intérêts coïncident et qu’elles identifient le même adversaire, c’est‑à‑dire les États‑Unis, » ajoute‑t‑il. « Ces deux pays forment une coalition et s’attaquent au monde ».

La défiance de Pékin

La veille de la rencontre Poutine‑Xi, le porte‑parole du département d’État américain, Ned Price, a mis en garde les entreprises chinoises qui voudraient aider la Russie à contourner les sanctions en cas d’invasion. Le fait que la Russie et la Chine se soient associées dès le lendemain montre un certain degré d’affirmation et de défiance, déclare M. Chang.

« Rappelez‑vous, il s’agit d’une Chine qui, tout au long de l’année 2021, a affirmé que les États‑Unis ne décourageaient pas la Chine. Il s’agit donc d’un autre symptôme qui montre que Pékin regarde le monde et dit : ‘nous allons faire ce que nous voulons’. »

Avant l’invasion, les responsables de la Maison Blanche ont tenté d’inciter la Chine à empêcher une attaque en demandant à Poutine de se retirer, mais selon les déclarations d’un conseiller politique de la Maison Blanche du 28 février, la Chine a choisi de ne pas le faire.

Les menaces que le régime fait peser sur Taïwan, où règne la démocratie, apparaissent de plus en plus clairement. Un avion civil chinois a pénétré dans la zone de défense de l’île de Dongyin, contrôlée par Taïwan, le 5 février, au deuxième jour des Jeux de Pékin. Les responsables de la défense taïwanaise avaient alors averti que cet avion avait pour objectif de tester la réponse militaire de l’île. Depuis deux ans, les avions militaires chinois pénètrent régulièrement dans la zone de défense aérienne de l’île.

Des navires de la classe des corvettes produits par Taïwan démontrent leur aptitude au combat lors d’un exercice sur les mers au large de la ville de Keelung, dans le nord du pays, le 7 janvier 2022. (Sam Yeh/AFP via Getty Images)

« Il s’agit en fait d’une escalade », explique M. Chang à propos de l’incident du 5 février.

Gordon Chang estime que la période actuelle rappelle la fin des années 1930, « une époque où le danger était tangible partout dans le monde ».

« Mais au moins, vous pouviez encore garder l’espoir de voir les dirigeants gérer les événements. Mais nous savons que le pire, en fait, est arrivé. Ce qui s’est passé est pire que tout ce que l’on aurait pu imaginer à l’époque. Eh bien, nous sommes arrivés à ce stade ou même au‑delà. »

« Je ne vois pas de dirigeant occidental capable de l’arrêter. Cela veut dire que nous allons peut‑être assister au pire moment de l’histoire. »

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