Les impôts qui pèsent sur les particuliers sont aussi néfastes aux entreprises

Par Philbert Carbon
4 avril 2023 15:55 Mis à jour: 4 avril 2023 15:55

On croyait le sujet des « super-profits » remisé au placard. Bruno Le Maire n’avait-il pas déclaré qu’il ne savait pas ce que c’était ? Mais voilà qu’Emmanuel Macron, dans son allocution télévisée du 22 mars, l’a remis sur la table. Qui dit « super-profits » dit « super-dividendes ». Les propos présidentiels vont donc faire resurgir l’idée de LFI de « faire cotiser les revenus du capital », et notamment les dividendes, à l’assurance retraite, et bien sûr celle de rétablir l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF). Tout cela ne ferait qu’appauvrir le pays.

Dans une étude à paraître dans The Accounting Review, les chercheurs Raul Barroso Casado, Donald N’Gatta et Gaizka Ormazabal examinent l’effet de l’impôt sur la fortune des particuliers sur la politique de distribution des dividendes.

L’accroissement de l’impôt sur la fortune entraîne une hausse des dividendes

En s’appuyant sur des données publiques provenant de 4381 entreprises cotées en bourse dans 26 pays européens entre 2000 et 2017, les auteurs de l’étude montrent qu’il existe une corrélation entre, d’un côté l’existence d’impôts sur la fortune et des augmentations substantielles du prix des actions, et de l’autre une augmentation significative des dividendes versés.

Pour bien comprendre de quoi il s’agit, rappelons d’abord que les impôts sur la fortune, tel que l’ISF qui a existé en France, sont des impôts annuels récurrents sur la « richesse nette » d’une famille ou d’un individu, la richesse nette étant définie par l’OCDE comme la valeur totale des actifs d’un ménage, y compris l’immobilier, les comptes bancaires, les obligations, les actions, les fonds d’investissement, les assurances-vie et autres biens de luxe, moins leurs dettes en cours telles que les hypothèques ou les prêts.

Dans les entreprises étudiées par Casado et ses collègues, la richesse des propriétaires est essentiellement liée à la valeur de leurs actions. Ainsi, quand le cours des actions monte en bourse, la richesse des actionnaires croît et leur impôt sur la fortune augmente automatiquement.

Mais, cette augmentation de la richesse liée à la hausse du cours des actions n’implique pas obligatoirement que les propriétaires aient davantage de liquidités pour payer les impôts qui augmentent. Pour ce faire, ils ont plusieurs solutions : changer de résidence fiscale et s’établir dans un pays qui taxe moins le capital ; emprunter ; vendre une partie de leurs actifs, notamment des actions. Mais ces solutions coûtent cher et, dans le cas de la vente d’actions, peuvent avoir des conséquences fâcheuses comme la perte de contrôle de l’entreprise.

Une autre solution consiste à augmenter les dividendes. L’étude de Casado, N’Gatta et Ormazabal montre, qu’en moyenne, les années où leurs actionnaires doivent s’acquitter d’impôts sur la fortune en augmentation, les entreprises distribuent environ 3,5% de dividendes supplémentaires. Cette augmentation des dividendes a cependant des conséquences économiques significatives et regrettables…

En général, quand une entreprise annonce le versement de dividendes plus importants qu’à l’accoutumée, le cours de l’action grimpe. L’étude montre que, dans le cas de dividendes induits par l’impôt sur la fortune, la croissance du cours des actions est d’environ 50 points de base inférieure à ce qu’elle est pour les actions dont les dividendes augmentent pour d’autres raisons. Les marchés ne s’y trompent pas et n’apprécient pas à la même valeur une hausse des dividendes due à de bons résultats et une hausse des dividendes destinée à soutenir la trésorerie des actionnaires. Peut-être plus inquiétant, l’étude montre également que les entreprises qui ont versé des dividendes induits par l’impôt sur la fortune baissent ensuite leurs investissements.

Pour les auteurs de l’étude, « Bien que les augmentations de dividendes motivées par les impôts puissent aider à satisfaire l’obligation fiscale des actionnaires majoritaires et offrir une satisfaction à court terme aux actionnaires minoritaires recevant également des dividendes, cela ne peut pas être dans le meilleur intérêt de l’entreprise, car elle aurait pu utiliser ces fonds pour financer des projets rentables. »

Ce dernier argument a d’ailleurs été utilisé en Norvège pour supprimer l’impôt sur la fortune.

Pour Casado, N’Gatta et Ormazabal, les résultats de l’étude « sont cohérents avec l’idée que, dans certaines circonstances, les impôts sur la fortune peuvent induire des paiements de dividendes sous-optimaux. L’effet est important lorsque les cours des actions augmentent au point d’alourdir considérablement la facture de l’impôt sur la fortune des actionnaires de contrôle. Face à ce besoin de liquidités, les actionnaires de contrôle incitent l’entreprise à verser des dividendes, car un rachat d’actions saperait le contrôle qu’ils exercent sur la société ».

En d’autres termes, « il existe un lien direct entre la manière dont les actionnaires sont imposés et la prise de décision des entreprises », notamment en matière d’investissement. Taxer les actionnaires fait prendre de mauvaises décisions aux entreprises qui, à terme, risquent d’être moins compétitives et moins rentables. C’est donc néfaste pour l’ensemble de l’économie.

Trop d’impôts sur le capital tue le capital et l’impôt

Cette étude vient confirmer qu’il était nécessaire de supprimer l’ISF en France. Nous avons d’ailleurs pu observer, ces dernières années, que la transformation de l’ISF en impôt sur la fortune immobilière (IFI) a eu des effets positifs : baisse du nombre d’expatriations et une hausse du nombre d’impatriations fiscales de ménages français fortunés, et recettes supérieures aux prévisions.

De même, la baisse de l’impôt sur les sociétés (IS) a augmenté considérablement ses recettes – 3 milliards d’euros supplémentaires. Comme l’a déclaré le ministre des Comptes publics Gabriel Attal, « C’est le montant le plus élevé de l’histoire, alors qu’on a le taux le plus bas de l’histoire » (sur ce dernier point, il exagère ou alors il a une vision très courte de l’histoire).

On a également observé que l’instauration du PFU (ou flat tax) de 30% sur les revenus du capital, dont les dividendes, n’a pas entraîné une perte de recettes pour l’État.

Ces résultats, qui prouvent que « Trop d’impôt sur le capital tue le capital et l’impôt », devraient encourager nos politiques à aller plus loin, en supprimant l’IFI, en allégeant encore les impôts qui pèsent sur les entreprises et en instaurant une flat tax sur les revenus du travail.

Malheureusement, ce n’est pas le chemin que nous prenons comme nous le rappelions au début de cet article. En France, la « folie taxatrice » finit toujours par s’emparer de nos dirigeants.

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