Les instituts Confucius fragilisent la capacité du Royaume-Uni à appréhender correctement la Chine, alerte un think tank

Par Limin Zhou
16 octobre 2022 19:16 Mis à jour: 16 octobre 2022 19:16

Selon un rapport publié mercredi, les instituts Confucius (IC) des universités britanniques nuisent à une bonne compréhension de ce qu’est la Chine.

Le rapport (pdf), publié par le think tank axé sur la politique étrangère et la sécurité nationale Henry Jackson Society (HJS), indique que sur les 30 instituts Confucius du Royaume‑Uni, seuls quatre fonctionnent dans le cadre de la mission « langue et culture » qui leur est généralement attribuée.

La plupart des IC sont impliqués dans d’autres activités telles que le renseignement sur les politiques gouvernementales et les responsables politiques, la négociation de partenariats scientifiques et technologiques, l’offre de services de conseil aux entreprises et « la coopération avec des organisations britanniques qui travaillent avec le Département du Front Uni (DTFU), un organe du PCC [Parti communiste chinois] dont les activités d’ingérence ont récemment été dévoilées par le MI5 ».

Au cours de leur enquête sur les instituts Confucius, les auteurs Sam Dunning et Anson Kwong ont déclaré avoir découvert des liens avec le DTFU et le Département de propagande du PCC. Les instituts Confucius ont également versé de l’argent à des hommes politiques britanniques et mènent des activités politiques. Par ailleurs, ils sont très engagés dans l’expansion leur réseau universitaire.

Le rapport indique qu’un certain nombre d’universités britanniques ont pris favorablement la récente réforme des instituts Confucius (IC), qui selon eux n’ont désormais rien à voir avec le gouvernement chinois. En réalité, ils restent « supervisés par le ministère chinois de l’Éducation, financés principalement par une entreprise de propagande d’État et intégrés au système de propagande du PCC ».

Jamais rien sur le Xinjiang, le Tibet, Taiwan ni Hong Kong

L’éventail limité de séminaires et d’événements organisés par les IC montre également que le programme fait partie des « tentatives délibérées du PCC d’encadrer la sinologie », indique le rapport.

Parmi les centaines de conférences et d’événements « accueillis par les instituts », « seule une poignée » concerne les « 100 millions et plus » de minorités ethniques chinoises, comme les Ouïghours et les Tibétains, ou leurs territoires historiques, indique le rapport.

« Le pourvoi d’informations sur Taïwan, un pays dont la situation exige une réflexion et une planification très urgentes de la part du gouvernement, des universités et de l’industrie britanniques, est également essentiellement inexistante », ajoute le rapport. « De même, la situation difficile de Hong Kong n’a pas été traitée, alors même que la répression du PCC dans la ville a provoqué la consternation au Royaume‑Uni et exigé une réponse gouvernementale complexe. »

Selon le rapport, les sources en langue chinoise relatives aux IC prouvent sans équivoque que les instituts sont « conçus pour aider le PCC à être bien intégré dans les universités et pour exploiter cette bonne intégration afin de façonner la manière dont la Chine est comprise, [ainsi que pour façonner] les stratégies adoptées à la lumière de cette ‘compréhension’ par les universités et par tous ceux qui dépendent de leur production intellectuelle ».

Un processus d’embauche contrôlé par la Chine, à priori illégal

Les auteurs Sam Dunning et Anson Kwong ont également signalé que le processus d’embauche des IC est largement contrôlé par des partenaires chinois.

Un contrôle ethnique et politique vise à mettre en place un processus de discrimination qui cible la race, la religion, les croyances et autres. Cette discrimination enfreint sans aucun doute la loi britannique. Les auteurs du rapport demandent aux organismes de surveillance du Royaume‑Uni de mener une enquête urgente sur ce point.

Le rapport cite la première fermeture d’un institut Confucius, survenue à l’Université McMaster au Canada en 2013.

L’université a fermé son institut Confucius après avoir refusé de supprimer une clause discriminatoire à la suite d’une plainte déposée par Sonia Zhao, pratiquante de Falun Gong, qui « s’est sentie obligée de signer un contrat avec le Hanban [organisme gouvernemental des IC à l’époque] qui interdisait la pratique de Falun Gong, parce qu’elle avait peur d’être punie si elle reconnaissait qu’elle était elle‑même pratiquante de Falun Gong. »

Sonia Zhao s’exprimant  sur la persécution du Falun Gong en Chine lors d’un rassemblement à Toronto en août 2011. (Gordon Yu/Epoch Times)

Le Falun Gong est une discipline spirituelle populaire fondée sur les principes de « vérité, compassion, tolérance » qui compte non moins de 70 millions de pratiquants selon les estimations officielles. Depuis 1999, le Falun Gong est persécuté par le PCC.

La mère de Sonia Zhao a subi deux ans d’emprisonnement du fait qu’elle est pratiquante de Falun Gong.

Les auteurs ont appelé à l’adoption d’une législation exigeant que les accords régissant l’enseignement et les partenariats universitaires avec des puissances étrangères contiennent des clauses destinées à préserver la liberté d’expression et à garantir le respect de la législation sur l’égalité.

Parmi les autres recommandations figurent le financement d’études critiques sur la Chine, la demande aux membres du PCC au sein des IC de déclarer leur appartenance au PCC à l’université dans laquelle ils se trouvent, et le développement de nouveaux programmes linguistiques et culturels avec des pays tels que Taïwan.

Selon les députés, les étudiants chinois ont besoin des « mêmes libertés » que les autres étudiants

Lors de la soirée organisée à l’occasion de la publication du rapport, le député conservateur Bob Seely a déclaré que les recommandations, qui n’incluent pas l’interdiction des IC, sont « incroyablement sensées », mais il s’est demandé si elles étaient allées « assez loin ».

M. Seely a déclaré qu’il n’avait pas encore décidé s’il était en faveur d’une interdiction, mais qu’il fallait en débattre, car les IC sont incompatibles avec les libertés et la présence d’étudiants chinois, ce qui, selon lui, est « vraiment important pour le Royaume‑Uni ».

« Si nous devons avoir des étudiants chinois ici, et s’ils viennent ici dans un but précis, nous devons nous assurer qu’ils ont les mêmes libertés d’explorer des idées que les autres étudiants. Je me méfie donc toujours des instituts Confucius », a‑t‑il déclaré.

Le député Bob Seely à Westminster, Londres, le 20 janvier 2021. (Parliamentlive.tv/Capture d’écran)

À la question de savoir si le Royaume‑Uni devrait contrôler les étudiants chinois dans les universités britanniques, M. Dunning a répondu : « Ce n’est pas souhaitable et peu pratique. »

Un autre intervenant, le journaliste Stephen Vines, qui a travaillé à Hong Kong pendant 35 ans, a également déclaré que c’était une bonne chose pour les étudiants de Chine continentale d’être exposés à une culture différente et à un certain niveau de liberté.

Reconnaissant le risque d’avoir un grand nombre d’étudiants chinois ici, M. Vines a déclaré que, « dans l’ensemble », il ne devait pas y avoir de limites plus importantes à la présence d’étudiants chinois.

Il a rappelé qu’il existe d’autres partenaires possibles pour l’enseignement du mandarin, notamment Taiwan, la Malaisie ou Singapour.

M. Vines a fait valoir que le Royaume‑Uni dispose déjà des ressources nécessaires avec un groupe de personnes « hautement qualifiées » de Hong Kong capables d’enseigner le cantonais et le mandarin et qui sont actuellement exclues en raison de la dépendance du système vis‑à‑vis des instituts Confucius soutenus par le PCC.

Réactions du gouvernement

La réponse du gouvernement britannique au rapport est également devenue un point central de l’événement.

M. Seely a déploré l’absence de stratégie intergouvernementale sur la Russie et la Chine, affirmant que le gouvernement a « toujours eu un temps de retard » face aux menaces potentielles.

Louisa Clarence‑Smith, rédactrice en chef de la rubrique Éducation du Telegraph, qui a fait un article sur le rapport du HJS avant sa publication samedi, a déclaré qu’il semble y avoir « une confusion au sein du gouvernement sur ce que sera sa politique vis‑à‑vis de la Chine ».

Le ministère de l’Éducation a d’abord répondu au rapport par une déclaration disant que « la Chine est un membre important de la communauté internationale, et nous avons une relation forte et constructive avec la Chine dans de nombreux domaines. »

La première ministre Liz Truss lors de son premier discours à Downing Street, à Londres, le 6 septembre 2022. (Leon Neal/Getty Images)

On ne sait pas qui a autorisé la déclaration, mais « après avoir parlé à certains des principaux députés conservateurs, dont Bob Seely, qui étaient plutôt préoccupés par le ton de la déclaration », Mme Clarence‑Smith « a reçu à la hâte un appel dimanche soir disant que finalement, Downing Street et le Foreign Office veulent reformuler une déclaration différente, avec un ton beaucoup plus dure sur la Chine », a‑t‑elle déclaré lors de l’événement.

La nouvelle déclaration indique que la « détermination de la première ministre Liz Truss à tenir tête à la Chine est inébranlable et que le gouvernement britannique s’engage à faire davantage pour s’adapter à l’impact croissant de la Chine ».

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