Un journaliste militant chinois résiste à la torture en prison

Par Zhang Bei
16 juillet 2020 16:02 Mis à jour: 16 juillet 2020 16:02

Lu Yuyu, le fondateur du média citoyen « Not The News », a été libéré le 15 juin après quatre ans d’emprisonnement. Il a dit à Epoch Times que malgré les tortures physiques et mentales qu’il a subies en prison, il ne céderait jamais au régime chinois.

Depuis octobre 2012, Lu et sa compagne, Li Yuting, avaient réussi à publier sur Twitter le blog quotidien Wickedonnaa sur les manifestations qui se déroulaient en Chine. Ce blog permet de suivre l’ampleur et le nombre d’incidents, le nombre de manifestants arrêtés et la raison des manifestations. Le site avait enregistré 28 950 incidents en Chine continentale en 2015, et 9 869 incidents au premier trimestre 2016.

Lu et Li s’efforçaient de contourner le mécanisme sophistiqué de censure en ligne du régime chinois, connu sous le nom de « Grand Pare-feu ». Certains sujets et informations que le régime juge sensibles étaient immédiatement supprimés par les censeurs du web.

Grâce à leur travail, Lu et Li ont constaté que les soulèvements et la répression violente des manifestants se produisaient plus fréquemment dans les régions éloignées.

« Cela est attribuable au fait que les paysans sont sujets de discrimination, qu’ils n’ont pas le droit de s’exprimer, qu’ils sont mis à l’écart de l’attention sociale et qu’ils sont stigmatisés depuis longtemps. Le blocus de l’information a également permis à la répression d’aller à l’extrême », a dit M. Lu.

CHINE : CE QUE VOUS DEVEZ SAVOIR

Dans leur dernier post du 13 juin 2016, ils ont documenté 94 manifestations, dont une manifestation de plus de 2 000 officiers militaires retraités à Pékin, selon le China Labour Bulletin.

Le 16 juin 2016, la police a kidnappé le couple dans leur ville natale, dans la campagne de Dali, dans la province du Yunnan, au sud-ouest de la Chine. Ils ont tous deux été accusés de « chercher querelle et de provoquer des troubles », une vague accusation souvent utilisée pour détenir les dissidents en Chine.

En novembre 2016, Lu et Li ont été les lauréats par contumace du prix Reporters sans frontières (RSF)-TV5 Monde pour la liberté de la presse et ont été récompensés dans la catégorie de journaliste citoyen.

Souffrir de dépression

Lu a dit qu’après un mois d’interrogatoire, fin de 2016, il a commencé à souffrir de dépression.

Il a expliqué que de 8 heures à 17 heures, il était dans une cellule isolée où des agents de sécurité et des responsables de la sécurité publique (police chinoise) l’interrogeaient.

Lu a été torturé avec la méthode du « banc de tigre ». Les gardiens de la prison utilisent des ceintures pour attacher les bras et les jambes de la victime à un banc. Ils superposent des briques ou d’autres objets durs sous les pieds de la victime, ce qui a pour effet de tirer davantage sur le lien, parfois au point que les ceintures se cassent. Les victimes endurent des douleurs insupportables causées par la pression des ceintures et s’évanouissent souvent.

Dans la torture appelée « banc du tigre », représentée sur ce dessin, l’élévation des jambes provoque éventuellement une douleur atroce. La torture est couramment utilisée dans les camps de travaux forcés chinois ainsi que dans les centres de lavage de cerveau où sont envoyés les prisonniers d’opinion. (Minghui.org)

Tandis que Lu était attaché à un banc, la police a tenté à plusieurs reprises de briser sa volonté en le persuadant de plaider coupable et de changer d’avocat, tout en lui montrant des vidéos d’autres dissidents plaidant coupable.

Plus tard, Lu a commencé à avoir des hallucinations. Il a dit : « Je suis devenu méfiant et j’avais l’impression que tout le monde parlait de moi. Je savais que ce n’était pas vrai, mais je ne pouvais pas m’en empêcher. »

Un jour, la police a dit à Lu de baisser la tête, mais il a refusé de le faire. Alors la police lui a donné un coup de pied et une bagarre a éclaté. La police a menacé de tuer Lu. Il a été sévèrement battu, puis menotté et enchaîné pendant plus de dix jours.

Le travail d’esclaves en prison

En août 2017, Lu a finalement été condamné à quatre ans de prison. Le 13 octobre de la même année, il a été transféré dans une prison de Dali. Il a été affecté à l’atelier de confection pour coudre des vêtements de marques populaires. Il travaillait sans arrêt de 7 heures du matin à 18 heures tous les jours.

Lu se réveillait à 6 heures du matin et se couchait à 21 h 30. Lorsqu’il ne travaillait pas, il subissait un lavage de cerveau et une « rééducation » en étant obligé de regarder certaines émissions télévisées qui contenaient de l’idéologie communiste. Un repas lui était servi le matin, après 6 heures.

Les travailleurs étaient à peine rémunérés pour un travail aussi pénible. Lu a révélé que les personnes qui pouvaient atteindre le quota recevaient des dizaines de yuans par mois, mais que ce quota était réduit plus tard à 10 yuans (1,25 euro) ou moins.

Ceux qui ne pouvaient pas respecter le quota étaient punis. Lu a décrit une forme de punition. « C’était l’exercice de discipline, comme tourner à gauche, tourner à droite, etc. après le journal télévisé. »

Lu s’est opposé à la punition. En conséquence, sa limite d’achat mensuelle a été considérablement réduite, passant de 300 yuans (37,5 euros) à 30 yuans (3,75 euros). « Les conditions de vie étaient vraiment mauvaises. C’est triste quand vous ne pouvez pas [vous permettre] d’acheter quelque chose à manger », a-t-il dit.

Fin 2019, Lu a dit à son avocat qu’il souffrait de dépression et de malnutrition. Lorsque l’avocat a soulevé le problème de santé avec la prison, la limite d’achat mensuelle de Lu a été réajustée pour qu’il puisse acheter plus de nourriture.

La prison a demandé à un policier de procéder à une évaluation psychologique de Lu avant d’accéder à sa demande d’un médecin pour traiter sa dépression, mais en payant de sa propre poche.

Pendant son incarcération, Lu n’a pas été autorisé à faire d’exercices, pas même de pompes ou de redressements assis. Il était puni s’il enfreignait cette règle.

Malgré diverses tortures, Lu n’a jamais plaidé coupable. Il a dit que la prison avait une formation de deux mois pour les nouveaux délinquants. « C’était pour vous faire un lavage de cerveau afin que vous fassiez des aveux et plaidiez coupable. Je l’ai rejeté. »

L’année dernière, la prison lui a dit que s’il « avouait » ses crimes, la peine serait réduite de huit ou neuf mois. Il a refusé l’offre.

« Si je pouvais persister (avec le blog) aussi longtemps, il n’y a aucune raison pour que je renonce à quoi que ce soit à moitié chemin », a-t-il dit.

Une cellule de prison plus grande

Le jour où Lu a été libéré, trois agents de sécurité l’ont accompagné au poste de police local où son père est allé le chercher.

Lu a reçu l’ordre de se rapporter au poste de police local et au secteur judiciaire avec son numéro de téléphone portable. Il lui a aussi été interdit de se rendre à Pékin, Shanghai et Xinjiang.

Un policier a également été chargé de surveiller Lu et de signaler ses allées et venues quotidiennes.

La surveillance rapprochée a donné à Lu l’impression d’être de retour en prison, mais dans une cellule plus grande. « C’est la loi chinoise, appliquée par le régime lui-même. »

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