Est-ce que le virus de Wuhan est un cas de crise ou de « crise » ?

Par Roger Kimball
16 mars 2020 20:25 Mis à jour: 16 mars 2020 23:49

Comme le dit un vieil adage : « Jour de vent, jour de tourment ». C’est certainement vrai pour le cas de la « crise » du virus de Wuhan.

Tout d’abord, pourquoi ai-je mis des guillemets de chaque côté du mot « crise » ? Je ne veux certainement pas suggérer que la grande crise de notre époque n’est pas vraiment une crise, mais seulement une « crise » entre guillemets. Un tel acte de sabotage sémantique serait intolérable dans l’atmosphère de panique qui se propage aujourd’hui. Ce serait une insulte à tout le monde – comme faire de la publicité non pas pour du « poisson frais », mais pour du « poisson ‘frais’ ». Vous voyez la différence.

Je ne m’engagerai certainement pas sur la voie de la dépréciation, en suggérant sournoisement que cette dernière « importation chinoise » ne mérite pas d’être considérée comme une urgence internationale totale de la plus grande gravité. Cependant, j’espère qu’en lisant cet article mes lecteurs me comprendront.

Le cas de la grippe H1N1

Voici mon raisonnement. Dans un autre article que j’ai récemment écrit sur cet évènement de très grande importance survenu au cours de notre vie, j’ai parlé également de la grippe H1N1 survenue en 2009. « Il y a eu, ai-je dit, 115 000 cas aux États-Unis, 15 000 hospitalisations et 3 500 décès. »

Il s’est avéré que j’ai largement sous-estimé ces chiffres. Selon les Centres pour le contrôle et la prévention des maladies (CDC), il y a eu en fait quelque 50 millions de cas de grippe H1N1, environ 270 000 hospitalisations et plus de 12 000 décès aux États-Unis.

Était-ce une crise ? Ou seulement une « crise » ? Vous souvenez-vous d’ordonnances d’urgence émises en 2009 qui visaient à interdire les voyages, à fermer les restaurants, à interdire les événements sportifs ou les grands rassemblements populaires ?

Je ne m’en souviens pas non plus. Je suppose que cela signifie que les gens, bien qu’ils aient probablement eu une appréhension justifiée face à la grippe H1N1, n’ont quand même pas paniqué. L’épidémie de grippe de Wuhan – ou, disons, la « pandémie » car cela semble plus effrayant – est bien avancée : au 17 mars, aux États-Unis, on comptait un total de quelque 4 570 cas de contamination et 86 décès. Vous pouvez consulter ce site bien pratique pour les mises à jour.

Voici ce que je pense que vous trouverez comme évolution de la situation au cours des prochaines semaines. Le nombre de cas de contamination augmentera de 500 à 1 000 par jour au cours des prochains jours. Ensuite, le nombre de nouveaux cas commencera à diminuer. Le nombre de décès augmentera également, mais modestement. Je pense que, d’ici la fin de la semaine prochaine, le nombre total de cas sera d’environ 6 000 et le nombre total de décès entre 100 et 150. En comparaison, depuis le début de l’année, le nombre total de décès de la grippe ordinaire (pas celui de Wuhan) est au niveau d’environ 14 000.

Je parle de tout cela pour justifier la mise entre guillemets du mot « crise ».

La létalité du virus de Wuhan

Dans un autre sens, hélas, les guillemets sont totalement injustifiés. Dans mon article susmentionné, j’ai parlé de la menace à la vie que représente le virus de Wuhan. Je pense que cette menace est bien faible, sauf si vous êtes (a) âgé et (b) déjà en mauvaise santé. Dans ce cas, le virus est mortel. Mais il en va de même pour la grippe ordinaire, ainsi que pour les autres affections.

Cependant, en parlant de façon générale – c’est-à-dire en le considérant comme un phénomène social, psychologique, politique et économique – le virus de Wuhan est définitivement mortel.

Ces derniers jours, des avis provenant de clubs, de restaurants et de diverses autorités nationales et locales ont été la forme la plus fréquente de spam déposée dans ma boîte de réception d’e-mails. Ces avis et annonces se composent généralement de deux parties. La première partie parle généralement de la vertu et de la situation humanitaire préoccupante. L’utilisation des mots « sécurité » et « communauté » y est cruciale. Ainsi que le « distancement social ». S’ensuivent un peu de jargon pseudo-médical, souvent assorti de quelques statistiques, puis l’annonce que l’activité ou l’établissement, quel qu’il soit, sera annulé ou fermé.

« Dans les cas d’épidémies à expansion rapide comme celle-ci, peut-on lire dans un avis typique, une action rapide pour empêcher la transmission du virus peut sauver de nombreuses vies. La seule façon de la contenir est de respecter immédiatement le distancement social pour éviter toute exposition aux personnes infectées. » Parfois, les dates de la durée de la fermeture ou de l’annulation sont indiquées mais, souvent, il ne s’agit que d’une annulation « jusqu’à nouvel ordre ».

C’est le contenu principal de l’avis. Toutefois, il crée une sorte de sillage ou de courant tributaire qui peut affecter et rassembler de nombreuses personnes. Un bulletin d’information communautaire peut également « déborder » de ce genre de choses.

« Agissez aujourd’hui ou des gens vont mourir », criait le titre d’un de ces avis. « J’aimerais dire oui à mes enfants quand ils demandent à voir leurs amis, a lancé un autre, mais plus vite nous prendrons tous nos responsabilités et imposerons un distancement social à nos enfants, plus vite ce sera fini.» L’auteur de cette notification avait au moins un peu d’humour, car il a poursuivi en affirmant : « Je ne juge pas, je demande juste à tout le monde que nous fassions tous notre part pour ralentir la propagation. »

Ce qui rend cela drôle, bien sûr, c’est l’affirmation « je ne juge pas », alors que tout le monde sait que le but de telles déclarations est de porter un jugement. En fait, le jugement est même double : un jugement négatif à l’encontre de tout pauvre bougre qui daignerait être en désaccord avec l’évaluation des risques supposés par de telles déclarations, et un jugement positif implicite de la moralité de la personne qui a émis un avis pour le bien de l’humanité.

Les précautions

Au cours des dernières semaines, alors que les gens se sont habitués à prononcer le mot « coronavirus » et ont appris de nouveaux éléments de jargon comme le « distancement social », j’ai cité à plusieurs reprises l’observation de l’un des plus grands enseignants du XIXᵉ siècle, le Britannique Benjamin Jowett : « On met toujours la faute sur les mesures de précaution. Lorsqu’elles ont été efficaces, on dit qu’elles ont été inutiles. »

Les précautions sont une chose, une bonne chose. La panique est une autre chose, mais une mauvaise chose. Dans tous les cas, lavez-vous les mains, faites attention lorsque vous toussez ou éternuez, prenez des précautions raisonnables. Cependant, ce à quoi nous assistons aujourd’hui, c’est à un exemple d’hystérie irrationnelle fondée plutôt sur l’hypocrisie que sur la sécurité.

Cela fait également le jeu des politiciens avides de pouvoir qui n’aiment rien de mieux que d’interdire ce qu’ils n’ont pas encore rendu obligatoire. Ce sont des gens qui vont bénéficier du jour de tourment amené avec le vent du virus de Wuhan. Quiconque en doute devrait considérer le cas de la ville de Champaign, dans l’État de l’Illinois, dont le conseil municipal vient de se doter de pouvoirs d’urgence pour faire face à cette crise, ou « crise ».

Mon ami, l’écrivain David Horowitz, dit souvent cette phrase : « Grattez un libéral et vous découvrirez un totalitaire qui hurle pour en sortir. » L’évolution de la réaction et de la surréaction à la grippe de Wuhan est un exemple parfait qui illustre la véracité de cette observation.

Roger Kimball est le rédacteur en chef et l’éditeur du magazine The New Criterion et l’éditeur de Encounter Books. Son livre le plus récent est The Fortunes of Permanence: Culture and Anarchy in an Age of Amnesia.

Les opinions exprimées dans cet article sont celles de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement celles d’Epoch Times.

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