Birmanie: l’éléphant blanc, un signe de bon augure récupéré par la junte

Par Epoch Times avec AFP
4 janvier 2023 11:45 Mis à jour: 4 janvier 2023 18:22

C’est un signe qui ne trompe pas : la naissance d’un éléphant albinos augure un avenir radieux pour la Birmanie, assure la junte au pouvoir, dans une quête désespérée de légitimité depuis le coup d’État de février 2021.

Paria sur la scène internationale et aux prises avec une forte résistance intérieure, l’armée s’est réjouie de la venue au monde en juillet de ce spécimen blanc, vénéré de tout temps par les dirigeants d’Asie du Sud-Est.

Dans le quotidien d’État, l’image du petit pachyderme joueur, dont la peau tire en réalité sur le gris, a relégué au second plan une actualité meurtrière, marquée par des violences quotidiennes entre militaires et milices auto-constituées qui s’accusent d’avoir tué des centaines de civils.

L’éléphanteau mâle né dans l’État de Rakhine (ouest) figurera sur un timbre-poste spécial émis cette semaine pour marquer le 75e anniversaire de l’indépendance vis-à-vis du Royaume-Uni, ont déclaré mardi les médias d’État.

Un ensemble de pièces commémoratives en or et à son effigie est déjà en cours de fabrication pour l’occasion.

Selon des experts dépêchés sur place, l’éléphant possède sept des huit caractéristiques associées à ces spécimens rares, notamment « des yeux de couleur perle » et « un dos en forme de branche de plantain ».

En octobre, il a été présenté en grande pompe au chef de la junte Min Aung Hlaing.

L’engouement pour les éléphants albinos, symboles de bon augure, remonte à des centaines d’années, les chroniques racontant que les monarques des royaumes bouddhistes qui forment aujourd’hui la Thaïlande, le Laos et la Birmanie se les disputaient entre eux.

Le coût exorbitant nécessaire à l’entretien de ces symboles de prestige a laissé dans le langage courant l’expression « un éléphant blanc » pour désigner des réalisations irrationnelles d’un point de vue économique.

La naissance de l’éléphanteau aurait eu lieu alors que, durant le même week-end, se tenait l’exécution de deux célèbres dissidents. Il s’agissait de la première exécution capitale en Birmanie depuis des décennies, ce qui a suscité une vague d’indignation internationale.

En reliant les dates entre elles, les militaires ont « laissé entendre sans vergogne » que les exécutions étaient « en quelque sorte justes », a déclaré à l’AFP Richard Horsey, de l’International Crisis Group.

L’éléphanteau demeurera à Naypyidaw avec d’autres éléphants aux caractéristiques peu communes, pour être visible des poignées de visiteurs du site qui consiste en une rangée d’abris aux allures d’étable.

Deux autres éléphants blancs célébrés par une ancienne junte se trouvent à Rangoun, la capitale économique.

Avec des pans entiers du pays encore ravagés par les combats et une économie en lambeaux, l’arrivée à Naypyidaw de « Rattha Nandaka », « le précieux éléphant blanc aimé du pays qui apportera prospérité et bonheur à la nation » a été accueillie avec scepticisme et incrédulité, certains doutant de l’authenticité de son albinisme.

« On dirait qu’ils ont oublié de lui mettre de la crème solaire », a ironisé sur les réseaux sociaux un utilisateur après avoir assisté à la cérémonie de baptême à Naypyidaw.

« Maintenant il a la peau foncée. »

Noir ou blanc, a écrit un autre, le bébé est « maintenant un prisonnier ».

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