En ce 25 avril, un défilé met en lumière la guerre de la Chine communiste contre la foi

Une pratiquante de Falun Gong évoque sa participation à l'appel historique lancé à Pékin le 25 avril 1999 qui, sans le savoir à l'époque, annonçait la campagne de persécution brutale qui fait toujours rage aujourd'hui

Par Eva Fu
25 avril 2023 13:27 Mis à jour: 29 avril 2023 18:03

NEW YORK – Il y a 24 ans, des milliers de citoyens chinois se sont rassemblés devant le siège du Parti communiste chinois, Zhongnanhai, au cœur de Pékin.

Ils pratiquaient le Falun Gong et étaient là pour demander pacifiquement au régime communiste de mettre fin au harcèlement et à la répression infligés à leurs pairs par les autorités locales. Moins de trois mois plus tard, le régime allait lancer une campagne de persécution totale contre cette pratique spirituelle.

Ce dimanche, à Flushing, dans l’État de New York, environ quatre mille personnes ont participé à un défilé pour commémorer l’appel historique de Zhongnanhai et réclamer la fin de la persécution du Falun Gong par le PCC.

L’une de ces personnes se nomme Elsie He, une habitante de New York âgée d’une quarantaine d’années. Il y a 24 ans, presque jour pour jour, elle faisait partie de ceux qui se sont rassemblés à Pékin.

Avec le recul, son rôle s’apparente à celui d’un témoin de l’histoire. Ce fut une journée qui, bien qu’apparemment sans histoire pour elle à l’époque, allait laisser une trace profonde dans sa mémoire.

Une manifestation pacifique

Un tel dimanche pour Elsie, alors étudiante en première année d’université, aurait normalement été un jour de lecture, d’étude pour ses cours ou de méditation.

Pourtant, ce 25 avril 1999, sous un ciel nuageux, l’étudiante, vêtue de sa tenue habituelle — une veste légère en coton, un long pantalon sombre et des chaussures de sport — et ses longs cheveux noirs attachés en queue de cheval, a enfourché une bicyclette avec trois amis au petit matin. Leur destination fut Zhongnanhai.

Il était environ 7 ou 8 heures du matin, trop tôt pour qu’Elsie s’aventure hors du dortoir de l’école un jour de congé, et il y avait peu de piétons dans la rue. Jusqu’à ce qu’elle atteigne la rue Fuyou, qui mène au complexe. Là, des foules de gens et d’autres encore affluaient. Ils parlaient doucement, formant une longue file sur le trottoir, et évitaient soigneusement de marcher sur la route ou de bloquer la circulation. La plupart des gens se tenaient tranquillement immobiles. Certains s’asseyaient pour méditer ou lire. Quelques-uns se passaient des sacs en plastique pour ramasser les ordures.

À la fin de cette journée du 25 avril 1999, environ 10.000 personnes étaient venues de tout le pays pour réclamer un environnement leur permettant de pratiquer librement le Falun Gong, la discipline spirituelle qui, selon de nombreux observateurs, améliore le bien-être mental et physique. Il s’agissait de la plus grande manifestation pacifique organisée en Chine depuis que le régime, déployant des chars et des fusils, avait expulsé les manifestants pro-démocratie de la place Tian’anmen, située à proximité, dix ans plus tôt.

Des pratiquants de Falun Gong se tiennent au bord de la route, le long des murs de Zhongnanhai, le 25 avril 1999. (Minghui.org)

Elsie, qui portait un petit sac à dos en toile contenant le principal enseignement du Falun Gong, un livre intitulé « Zhuan Falun », ainsi qu’un pain plat au sésame comme repas de la journée, avait perdu de vue ses amis peu de temps après son arrivée. Elle a attendu dans la foule jusqu’à la tombée de la nuit, puis est partie lorsque la nouvelle s’est répandue : le Premier ministre de l’époque, Zhu Rongji, avait rencontré les délégués du Falun Gong et les avait assurés de son soutien.

Cependant, la persécution qui s’est abattue sur l’ensemble du pays trois mois plus tard a montré que les promesses formulées par le régime n’étaient rien d’autre que des paroles creuses.

Nous savons que vous n’avez rien fait de mal

Le Falun Gong, qui repose sur les principes fondamentaux de vérité, de compassion et de tolérance, ainsi que sur des exercices de méditation, a connu une popularité fulgurante dans les années 1990. Selon certaines estimations, un Chinois sur treize, parmi les 1,3 milliard d’habitants que comptait alors la Chine, avait embrassé cette pratique en 1999, année où le parti communiste chinois (PCC) athée a désigné ce groupe comme le nouvel ennemi de l’État.

Dans les mois et les années qui ont précédé la persécution, les pratiquants de Falun Gong ont été confrontés à des restrictions de plus en plus importantes de leurs libertés. Quelques jours avant l’appel de Zhongnanhai, les autorités ont battu et arrêté des dizaines de pratiquants de Falun Gong dans la mégalopole de Tianjin, invitant les autres pratiquants à adresser une pétition au gouvernement de Pékin pour demander la libération des détenus. Les télévisions et les journaux d’État ont diffusé des contenus vilipendant leur foi.

Un policier chinois bloque la prise de photos à l’extérieur de Zhongnanhai qui sert de siège central au Parti communiste chinois à Pékin le 11 avril 2012. (Mark Ralston/AFP/Getty Images)

« Parce que nous suivons les principes de vérité, compassion et tolérance, nous essayons de traiter tout le monde avec gentillesse, y compris le gouvernement », a déclaré Elsie, qui a aujourd’hui la quarantaine et vit à New York.

« Nous pensions que les arrestations qui ont eu lieu à Tianjin et toute cette couverture médiatique faussée s’expliquaient par le fait qu’ils ne nous comprenaient pas vraiment. Nous voulions leur donner une occasion de nous comprendre, leur montrer tous les aspects de la situation. Tel était le groupe de personnes que nous formions. »

Elsie estime que la gentillesse et la confiance dont ils ont fait preuve ce jour-là n’ont « jamais changé », même après avoir été victimes d’une féroce campagne de persécution.

« C’est le PCC qui a choisi de faire de la vérité, la compassion et la tolérance des ennemis », a déclaré Elsie. « Ils ont jeté ce groupe de personnes en pâture. »

Des pratiquants de Falun Gong participent à un défilé pour appeler à la fin de la persécution menée par le Parti communiste chinois contre leur foi dans le quartier de Flushing, dans le Queens, à New York, le 23 avril 2023. (Chung I Ho/Epoch Times)

Depuis juillet 1999, le régime a déployé des efforts extraordinaires pour éradiquer ce mouvement, soumettant les pratiquants à des détentions arbitraires, à de graves tortures, à de lourdes amendes, à des travaux forcés et à des discriminations sociales. Un nombre incalculable d’entre eux ont été victimes d’assassinats cautionnés par l’État pour leurs organes, connus sous le nom de prélèvements forcés d’organes.

Elsie décrit son expérience de la persécution comme une illustration de ce que d’autres familles ont subi dans d’autres régions du pays. En 2001, trois membres de sa famille, elle, son frère, également étudiant, et sa mère, professeur d’université, ont été arrêtés simultanément dans les établissements d’enseignement supérieur où ils étudiaient ou travaillaient.

L’immense pression mentale a blanchi les cheveux de son père en une nuit.

Chaque jour, au lieu d’aller en classe, Elsie se rendait au bureau du secrétaire du parti de son école. Le secrétaire du parti a même demandé à un de ses camarades de classe de se lier d’amitié avec elle pour recueillir secrètement des informations sur cette pratique, ce qu’elle n’a su que des années plus tard.

« Le Falun Gong n’a jamais eu de secrets. La façon dont nous pratiquons et étudions, tout ce qui nous concerne, ils le savent de bout en bout. Mais ils ont quand même utilisé de telles tactiques. C’est comme s’ils voulaient concocter des accusations contre nous », a-t-elle déclaré.

Elsie s’estime toutefois chanceuse, compte tenu du nombre d’étudiants de haut niveau des écoles de l’élite chinoise telles que Tsinghua et l’université de Pékin qui ont perdu la vie ou qui ont été atteints de maladies mentales à la suite de la persécution.

Fin 2012, après avoir trouvé sa maison saccagée à la suite d’une descente de police qui a conduit à l’arrestation de sa femme, le père d’Elsie a été victime d’un accident vasculaire cérébral et n’a jamais repris connaissance. Il est décédé environ sept semaines plus tard, le jour de Noël.

« Je sais que vous n’avez rien fait de mal, mais nous pouvons obtenir de l’argent en arrêtant des pratiquants de Falun Gong », lui a dit le policier lorsqu’elle a imploré la libération de sa mère, s’est-elle souvenue. « Mon fils va se marier et j’ai besoin d’argent pour lui. L’arrestation d’un pratiquant du Falun Gong me rapporte 4000 yuans [environ 640 dollars à l’époque]. »

« Ils vendent leur âme pour de l’argent et échangent leur vie contre de l’argent », a déclaré Elsie, ajoutant qu’elle considérait ces personnes comme pitoyables. « Ils sont capables d’abandonner leur conscience pour si peu d’argent. »

Des pratiquants de Falun Gong participent à un défilé pour appeler à la fin de la persécution de leur croyance par le Parti communiste chinois dans le quartier de Flushing du Queens, à New York, le 23 avril 2023. (Chung I Ho/Epoch Times)

Un événement marquant

Dans sa propagande, Pékin décrira plus tard l’appel de Zhongnanhai comme un « siège » afin de justifier la persécution.

Mais « malgré ce que le PCC voudrait vous faire croire en tant qu’État matérialiste et athée », la campagne de persécution, aux yeux de l’expert sur la Chine James Gorrie, est en réalité une « bataille spirituelle contre la méchanceté et les forces du mal ».

« Les gens trouvent leur force dans quelque chose qui ne peut pas être étouffé par une balle ou une peine de prison », a déclaré M. Gorrie, auteur de « The China Crisis » [La crise chinoise, ndr] et collaborateur du journal Epoch Times, à la chaîne de télévision partenaire NTD. « C’est pourquoi la Chine la craint. C’est pourquoi elle la craint à juste titre. Les régimes illégitimes ont peur de tout. »

Gregory Copley, président de L’Association internationale d’étu  des stratégiques et collaborateur du journal Epoch Times, a ajouté qu’il trouvait inspirante la capacité de résistance dont fait preuve le Falun Gong.

« L’une des caractéristiques propres à la philosophie du Falun Gong est d’élever l’esprit de l’individu à un sentiment de noblesse, de patience et de persévérance », a-t-il déclaré à la chaîne de télévision NTD.

« Il est très difficile pour une organisation telle que le Parti communiste chinois de réprimer ce mouvement. »

Les observateurs de la Chine et la communauté Falun Gong, suggère-t-il, devraient « commémorer et célébrer » l’appel du 25 avril comme « un événement emblématique ».

« L’histoire de cette manifestation mérite d’être écrite de telle sorte qu’elle soit perçue comme un événement marquant de l’histoire chinoise, qui annonce le début du déclin du Parti communiste chinois ».

Des pratiquants de Falun Gong participent à un défilé pour appeler à la fin de la persécution par le Parti communiste chinois de leur foi dans le quartier de Flushing du Queens, à New York, le 23 avril 2023. (Chung I Ho/Epoch Times)

Le choix de l’Ouest

Le député américain Gus Bilirakis (Parti Républicain – Floride) a appelé le monde à agir contre cette persécution qui dure depuis près de 24 ans et qui viole « les droits de l’homme les plus élémentaires ».

« Nous avons l’obligation de parler au nom de ceux dont les voix ont été réduites au silence pendant trop longtemps, car si nous restons silencieux face à ces transgressions, nous le faisons au péril de la société civile », a-t-il déclaré au journal Epoch Times.

À l’instar de M. Bilirakis, Elsie et d’autres participants à la manifestation de dimanche à Flushing ont exhorté le monde libre à adopter une position plus claire.

« Les gens ont l’habitude de dire que la ‘cécité sélective’ des spectateurs est en partie la raison pour laquelle les méchants peuvent arriver à leurs fins », a déclaré Zhao Ruoxi, un ancien journaliste de Tianjin qui a été témoin des arrestations qui ont conduit à l’appel du 25 avril, lors d’un discours prononcé à l’occasion d’un rassemblement qui a suivi le défilé de dimanche.

Zhao Ruoxi participe au défilé pour appeler à la fin de la persécution par le Parti communiste chinois de leur foi dans le quartier de Flushing du Queens, à New York, le 23 avril 2023. (Chung I Ho/Epoch Times)

« Certains pensent peut-être qu’ils n’ont pas persécuté le Falun Gong et qu’ils ne sont donc pas responsables. Mais votre silence et votre inaction reviennent à tolérer de tels abus. C’est l’une des principales raisons pour lesquelles la persécution peut se poursuivre sans entrave jusqu’à aujourd’hui ».

Même les pratiquants qui ont trouvé refuge aux États-Unis craignent toujours pour la sécurité de leurs proches dans la Chine communiste.

Wang Shanshan et sa fille participent à une manifestation pour appeler à la fin de la persécution par le Parti communiste chinois de leur foi dans le quartier de Flushing du Queens, à New York, le 23 avril 2023 (Chung I Ho/Epoch Times).

Wang Shanshan, qui a fui la Chine il y a dix ans pour donner naissance à un enfant qui n’aurait pas été autorisé en vertu de la politique de l’enfant unique, a demandé de l’aide pour sa mère Liu Aihua, qui a été arrêtée 11 fois et récemment condamnée à quatre ans de prison pour sa foi dans le Falun Gong. Elle a également demandé la libération de Zhou Deyong, dont la femme et le fils résident en Floride. M. Zhou a été condamné à huit ans de prison le 20 avril.

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