Mobilisation agricole devant le château de Versailles : « Non au Mercosur destructeur »

Le président e la FNSEA , Arnaud Rousseau (4ème à dr.), s'adresse aux agriculteurs et aux militants de la FNSEA lors d'une manifestation contre l'accord du Mercosur, sur la Place d'Armes du Château de Versailles, le 26 septembre 2025.
Photo: GEOFFROY VAN DER HASSELT/AFP via Getty Images
L’aube du vendredi a vu se dresser une scène inhabituelle sur la place d’Armes du château de Versailles. Dès les premières heures du jour, une centaine d’exploitants agricoles accompagnés de quinze tracteurs ont pris position face au symbole du pouvoir royal, transformé pour l’occasion en tribune de la colère paysanne.
Cette mobilisation spectaculaire répond à l’appel urgent lancé par la FNSEA-Jeunes Agriculteurs, première force syndicale du secteur, contre un projet qui fait trembler les campagnes françaises. « Le sens de cette mobilisation, c’est évidemment attirer l’attention du chef de l’État », a martelé Arnaud Rousseau, président de la FNSEA, présent dès l’aurore sur ce théâtre improvisé de la contestation agricole. Le choix du lieu n’est pas anodin : face au château qui incarne l’histoire française, les agriculteurs entendent faire entendre leur voix jusqu’aux plus hautes sphères du pouvoir.
Mercosur : la menace qui unit les campagnes
Au cœur de cette fronde agricole se trouve l’accord de libre-échange Mercosur, véritable épée de Damoclès suspendue au-dessus des exploitations françaises. Ce projet d’accord commercial entre l’Union européenne et les pays latino-américains du Mercosur a franchi une étape décisive début septembre, quand Bruxelles a enclenché le processus de ratification. Plus troublant encore pour les syndicats agricoles : la France, traditionnellement farouche opposante à cet accord, semble aujourd’hui tempérer sa position hostile.
« On a sur le plan international de nombreuses questions qui se posent quand des produits viennent envahir nos marchés et ne respectent pas nos normes de production », s’insurge Arnaud Rousseau. Cette déclaration résume l’angoisse profonde du monde agricole français face à une concurrence jugée déloyale, où les standards environnementaux et sanitaires européens se heurtent à des pratiques moins contraignantes venues d’ailleurs.
Une détresse agricole qui s’amplifie
Pascal Verriele incarne cette souffrance paysanne qui s’exprime aujourd’hui avec force. À 56 ans, ce secrétaire général de la FDSEA de Seine-et-Marne porte sur ses épaules quarante années d’expérience agricole, mais aussi le poids d’un désespoir grandissant. « J’ai plus de visibilité, plus de marge de manœuvre », confie cet exploitant en grande culture qui avoue « toucher le fond ».
Son témoignage révèle l’accumulation des défis auxquels font face les agriculteurs français. Au-delà du Mercosur, il dénonce « les dispositifs accordés à l’Ukraine de quotas d’importation sans droits de douane », autant de mesures qui, selon lui, « déstabilisent nos exploitations ». Cette multiplication des sources d’inquiétude alimente un sentiment d’abandon et d’injustice qui pousse aujourd’hui les agriculteurs dans la rue.
Un mouvement national qui prend de l’ampleur
La mobilisation versaillaise n’est que la partie visible d’un mouvement d’ampleur nationale. Sur la place d’Armes, l’ambiance mêle détermination et convivialité : les agriculteurs ont allumé un feu de camp, distribué café et viennoiseries, tandis que d’autres font crépiter des fumigènes verts. Une immense banderole proclame sans détour : « La révolte paysanne reprend à Versailles ».
Simultanément, la France rurale se mobilise de l’Aube à l’Hérault. À Torvilliers, la protestation se déroule dans le calme matinal, tandis que dans l’Hérault, dès 6h30, banderoles et rassemblements marquent la détermination du monde agricole. Près de Béziers, tracteurs, poids lourds et bennes témoignent de la diversité des acteurs unis dans cette contestation.
Un avertissement à l’exécutif
Les autorités prévoient environ 3 000 participants répartis sur 70 actions dans 65 départements, témoignage de l’ampleur du mécontentement. Mais Arnaud Rousseau ne compte pas en rester là : « On continue à rester motivés, on reviendra s’il y a besoin cet hiver, à un moment où dans nos champs, ce sera plus facile », prévient-il, agitant la menace d’une mobilisation hivernale potentiellement plus déterminée.
Cette journée de mobilisation constitue un signal d’alarme adressé directement à l’exécutif. « Le chef de l’État doit réagir. Le Premier ministre doit nous recevoir urgemment », exige le président de la FNSEA. Un appel qui résonne aujourd’hui aux portes de Versailles, là où l’Histoire française a souvent basculé sous la pression populaire.
Avec AFP

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