Jean Lassalle : « Je propose de faire des campagnes de France, une grande cause nationale »

Par Julian Herrero
26 janvier 2024 07:33 Mis à jour: 27 janvier 2024 07:48

ENTRETIEN – Dans un entretien exclusif accordé à Epoch Times, l’ancien candidat à l’élection présidentielle, ancien député et président du mouvement Résistons ! livre son analyse sur le mouvement de contestation des agriculteurs. S’il souhaite que la mobilisation prenne de l’ampleur, il craint que les autorités fassent tout pour décrédibiliser la colère des agriculteurs. Il propose également de faire des campagnes de France, une grande cause nationale.

EPOCH TIMES – La mobilisation du monde agricole ne faiblit pas. Partout sur le territoire, les agriculteurs continuent leurs actions et leurs manifestations. Ils exigent des réponses rapides de l’État. Vous avez apporté votre soutien au mouvement et participé à des manifestations. Hier, vous avez publié sur le réseau social X : « Ce n’est plus une vie. Que ceux qui sont dans cette situation se lèvent. Le moment est venu ». La mobilisation doit-elle prendre encore plus d’ampleur ? Certains comparent la colère des agriculteurs au mouvement des gilets jaunes de 2018. Établissez-vous aussi ce parallèle ?

JEAN LASSALLE – Je tiens à saluer tous ces agriculteurs qui ont le courage de se lever, mais aussi à faire part de ma tristesse quand je les vois réduits à cette extrémité. Personne ne manifeste par bonheur et surtout pas les agriculteurs qui, lorsqu’ils s’en vont de chez eux, laissent leur exploitation vide. Il n’y a personne pour effectuer le travail à leur place et c’est pour ça qu’ils ne sont pas souvent sur le pavé.

Néanmoins, je trouve que c’est un merveilleux espoir de voir des hommes et des femmes au bord du précipice se lever, se dresser pour faire face et exprimer des revendications. Je souhaite donc que le mouvement s’amplifie, et que les peurs, les inquiétudes se coagulent, tant au niveau français qu’européen. Je crois que le moment est venu. Il faut poursuivre les actions très pacifiquement, c’est une nécessité. J’ai d’ailleurs estimé nécessaire d’apporter dès le départ mon soutien et celui des résistants à ce merveilleux mouvement, qui a effectivement démarré un peu de la même manière que celui des gilets jaunes il y a 5 ans.

Aujourd’hui, tout le monde est dans la même souffrance, vit le même oubli face à ce système impitoyable auquel nous devons faire face. Il faut retrouver notre part de nous-mêmes, notre part de vie et les agriculteurs, leur capacité à survivre.

On a le sentiment que les autorités laissent le mouvement de contestation grandir. Hier à Agen dans le Lot-et-Garonne, des agriculteurs ont mis le feu devant la préfecture et la police n’a pas réagi. Est-ce selon vous une manière de laisser le mouvement aller jusqu’à Paris pour qu’il soit plus médiatisé et touche donc encore plus l’opinion publique ?

Je pense que les pouvoirs publics, quels qu’ils soient, l’État, le gouvernement, tous ceux qui représentent une forme de pouvoir, veulent gagner du temps. Et derrière, il y a une idée plus maligne qui est d’essayer de refaire le coup des gilets jaunes, c’est-à-dire attendre qu’il y ait des débordements pour retourner l’opinion publique et donc affaiblir le mouvement. Je pense que c’est le but poursuivi.

Les paysans français sont révoltés contre certaines attitudes des industriels. Dans le contexte d’inflation actuel, est-ce que ce sont les industriels qui font les plus grandes marges qui vont amortir la hausse de prix d’achat aux agriculteurs ou est-ce le consommateur qui va encore payer plus cher ?

Ce système est totalement fou et dérégulé. Comme d’habitude ce sont les consommateurs et les paysans qui payent cher. Le moment est peut-être venu de rentrer dans un nouveau paradigme, dans une nouvelle dimension, pour résoudre des problèmes qui, à priori, nous dépassent.

Mais pour ça, il faut que nous, les décideurs, les hommes politiques, les journalistes et surtout les fonctionnaires, retrouvions un peu d’humilité et retrouvions le chemin des étables du village. Il y a certes les enjeux autour de l’agriculture, mais sur ces barrages, vous voyez le maire désespéré parce qu’il a perdu le dernier poste d’instituteur, vous voyez le médecin ou l’infirmière qui pleurent parce que la dernière maternité a fermé.

C’est un problème beaucoup plus global et général. Et c’est pour ça qu’il faut que tous ces hommes et ces femmes aillent manifester pour nous pousser ensemble à trouver de vraies solutions.

Les agriculteurs qui manifestent dénoncent aussi la concurrence déloyale à plusieurs niveaux : celle qui existe entre les pays européens, mais aussi celle mondiale en lien avec les traités de libre-échange avec des pays qui n’ont pas à respecter les mêmes réglementations…

Nous sommes sortis du modèle démocratique et je crois que la soi-disant « mondialisation heureuse » dont on nous a vendu les vertus il y a des années ainsi que la financiarisation du monde y sont pour quelque chose.

Les pays que vous évoquez sont aussi perdus que nous, et eux-mêmes se trouvent concurrencés par d’autres pays dans d’autres domaines.

La France doit se replacer au centre du jeu mondial. C’est la patrie de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen. Elle a une dimension universaliste. Le moment est venu.

Pour ma part, je propose de faire des campagnes de France une grande cause nationale. Ensuite, comme je le propose aussi depuis des années, il faut investir 4 milliards d’euros dans nos territoires ruraux. Si on met 4 milliards d’euros pendant la durée d’un mandat présidentiel, ça va se voir. Je souhaite par ailleurs, donner un salaire à ceux qui, dans l’exploitation, ne s’occupent pas des animaux, mais qui peuvent aider, notamment ceux qui ne vivent qu’avec 400 ou 500 euros par mois.

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