L’Industrie française a gagné du terrain en 2022 mais est encore loin d’un rétablissement satisfaisant

Par Michel Pham
5 mars 2023 09:35 Mis à jour: 5 mars 2023 09:35

Les données économiques apparues dans le dernier rapport du cabinet Trendeo démontrent que l’industrie française poursuit son redressement depuis 2016, avec un nombre excédentaire d’usines et d’emplois créés en 2022. Une bonne nouvelle pour l’économie française dans un contexte de turbulences économiques et sociales. Cependant, il est trop tôt pour évoquer une réindustrialisation significative de la France.

L’éditeur de données économiques Trendeo a publié le 2 mars un rapport sur « l’emploi et l’investissement en 2022 en France », dont les conclusions suggèrent que l’industrie française se porte bien malgré les incertitudes liées aux crises successives provoquées par le Covid-19 et la guerre en Ukraine.

En effet, la France a enregistré l’an dernier l’ouverture de 150 sites industriels contre la fermeture de 70 d’autres, soit 80 créations nettes d’usines. Ainsi, la relance industrielle observée depuis 2016 dans les données collectées par Trendeo se poursuit en France en 2022, avec un certain ralentissement par rapport à 2021 où le nombre d’ouvertures nettes de sites industriels avait atteint le niveau « record » de 123. En revanche, l’industrie française a créé davantage d’emplois en 2022 (environ 41.500) qu’en 2021 (32.155).

Au micro d’Europe 1 vendredi 3 mars, le fondateur et gérant de Trendeo, David Cousquer, reconfirme cette bonne nouvelle pour l’industrie française : « On est effectivement dans une phase de réindustrialisation assez marquée avec beaucoup d’efforts volontaristes d’aide au développement industriel depuis 2021. Mais [il s’agit] d’une chose qui a été déjà amorcée depuis 2016. Cela a été interrompu avec le Covid et a redémarré avec plus d’ampleur en 2021. »

Une relance portée par de nouveaux secteurs innovants

À en croire les décryptages de David Cousquer sur Europe 1, plusieurs secteurs ont contribué à la reprise du développement industriel en France, notamment ceux qui relèvent de la transformation énergétique et de la décarbonisation de l’industrie.

Parmi les bons élèves de ces nouveaux secteurs industriels, le rapport de Trendeo en a notablement évoqué deux : STMicroelectronics, dans la production de microprocesseurs, et Verkor, qui fabrique des batteries automobiles de dernière génération.

Le dernier a choisi en 2022 Dunkerque pour construire sa première giga-factory de cellules et de batteries bas-carbone, dans un projet dont le coût total a été estimé à 2,5 milliards d’euros selon une annonce officielle. La société française créée en 2020 a lancé une campagne de recrutement de 1200 postes en octobre dernier dans la perspective de l’ouverture de sa méga-usine dunkerquoise.

STMicroelectronics, quant à elle, a investi des milliards d’euros en France, notamment à Crolles en Isère, « pour développer nos capacités et complexifier les technologies pour le marché de l’automobile autonome », a souligné sur le plateau de BFM Business Jean-Marc Chéry, son directeur général, au début de l’année 2022.

En juillet dernier, le Président Emmanuel Macron a visité le site de STMicroelectronics à Crolles où il a annoncé un investissement du gouvernement français de l’ordre de 5,7 milliards d’euros pour une nouvelle entité de semi-conducteurs, avec la création de mille emplois à l’horizon de 2026.

Les exemples de Verkor et de STMicroelectronics à eux seuls peuvent expliquer en grande partie pourquoi Trendeo a observé davantage de créations nettes d’emploi en 2022, malgré une baisse significative du nombre d’ouvertures nettes de sites industriels, par rapport à 2021.

Est-il trop tôt pour parler de la fin de la désindustrialisation de la France ?

Le mot « réindustrialisation » a été évoqué par le directeur de Trendeo au micro d’Europe 1. Cependant, selon les analyses dans le dernier rapport du même cabinet sur l’emploi et l’investissement en France, relayées par Le Monde, il faudra patienter encore quelques années pour en arriver là : « Nous pourrions récupérer en quatre ans les pertes de sites industriels accumulées depuis 2009 » ; et ce, seulement à condition que le rythme de relance de l’industrie française observée depuis 2021 se poursuive.

L’année 2009 est en effet un tournant pour l’industrie française. Cette année-là, au lendemain de la crise financière de 2008, l’Observatoire de l’investissement de Trendeo a constaté un nombre record de suppressions de sites industriels en France, qui était de l’ordre de 258 fermetures nettes. Depuis, le cabinet a annuellement constaté que le nombre de fermetures des sites industriels dépassait régulièrement celui des créations.

Il a fallu attendre l’année 2016 pour que cette tendance soit renversée.

Après un ralentissement observé entre 2018 et 2020, l’industrie française a connu une « année record » en matière de création de sites industriels en 2021. Cette relance industrielle se poursuit en 2022 avec un solde net positif de 80 sites industriels créés. Cependant, ces résultats encourageants ne font que ramener les pertes cumulées quant aux fermetures nettes d’usines depuis 2009 à un niveau deux fois inférieur à celui observé en 2015, à savoir 343 contre 610.

D’après France Industrie, le tissu industriel ne représente que 13,4% du PIB de la France en 2022, alors qu’en 1980 il représentait jusqu’à 23% de la richesse produite dans l’Hexagone. Ce ratio est considérablement plus faible que celui des pays européens voisins comme l’Italie (17%) ou encore l’Allemagne (22%).

L’une des raisons expliquant la lenteur de la réindustrialisation française est mentionnée dans un autre rapport de Trendeo publié également au début de cette année, cette fois-ci sur « l’industrie mondiale 2022 ». Selon cette étude, le problème vient de l’absence de mégaprojets industriels :

« Alors que l’Europe est bien positionnée sur la R&D, elle néglige le passage à l’échelle dans ses productions locales et n’obtient qu’un très faible pourcentage de gigafactories mondiales. On retrouve au niveau européen, en un peu moins marqué, un positionnement comparable à celui de la France : des positions de niches qui peuvent être solides mais un retard sur la production de masse ».

« L’année 2022 a été très bonne, prise globalement, mais si l’on regarde trimestre par trimestre, il y a quand même une tendance à la baisse dans le courant de l’année. Ce qui fait que l’on peut avoir un peu d’inquiétude sur 2023 ». Après avoir annoncé au micro d’Europe 1 de bonnes nouvelles concernant le bilan de 2022 de l’industrie française, David Cousquer reste prudent quant au résultat escompté pour la fin de l’année en cours.

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