Au tribunal, les manifestants, le feu de poubelle et la relaxe

Par Epoch Times avec AFP
22 mars 2023 10:40 Mis à jour: 22 mars 2023 11:05

Trois manifestants, un feu de poubelle et la relaxe : jugés en comparution immédiate, deux hommes et une femme ayant participé à un rassemblement contre la réforme des retraites ont été relaxés mardi au tribunal de Paris, un dossier « symptomatique » pour la défense.

Il est 19h50 et dans le box sont escortés trois prévenus, 48 heures après leur interpellation dans le quartier des Halles, au cœur de la capitale, lors d’une des manifestations spontanées qui se sont multipliées depuis l’usage de l’article 49-3 par le gouvernement.

Dimanche soir, des policiers en patrouille sont prévenus par trois passants que « quatre individus », « vêtus de noir et portant des masques chirurgicaux », « sont en train de mettre le feu à une poubelle », résume le président du tribunal en lisant le procès-verbal d’interpellation. Les policiers arrêtent deux jeunes femmes ainsi qu’un homme qui avait « pris la fuite », poursuit le magistrat.

Lors de la fouille, deux fioles de sérum physiologique sont retrouvées sur Margot, 24 ans, graphiste au chômage. « C’est pour lutter contre le gaz lacrymogène ? » demande le président. « Oui », répond sobrement cette brune en blouson vert foncé. « Et vous, le cache-cou, c’est pour quoi ? » demande-t-il à Martin, 26 ans, agent immobilier à la haute stature, qui avait aussi sur lui « deux briquets ». « Parce qu’il fait 9 degrés, M. Le président », répond ce dernier.

Les policiers expliquent que, « dans la précipitation », ils n’ont « pas pu relever l’identité » des personnes qui leur ont signalé le feu, mais ils ont fait « une recherche de voisinage », précise le président, énumérant les commerces contactés – qui étaient soit « fermés », soit « ne répondaient pas », soit n’avaient « rien vu ».

Droit au silence

Sur les conseils de leur avocat, les trois prévenus ont exercé leur droit au silence en garde à vue. « Qu’est-ce que vous reconnaissez ? » leur demande le président. « Dimanche soir, je suis allée à la manifestation avec mon amie Clothilde, d’un coup deux policiers nous ont interpellées très violemment et on a pas compris pourquoi », déclare Margot, qui assure ne pas avoir « vu de feu ». « J’ai pas mis le feu, Monsieur », affirme à son tour Clothilde, 24 ans, frêle habitante de Marseille en service civique, également poursuivie pour « rébellion ».

À sa droite dans le box, Martin conteste également. Lui est en outre jugé pour avoir refusé de donner ses empreintes en garde à vue. « C’est une opposition de ma part au fichage systémique », explique-t-il. « Que pensez-vous des dégradations commises à Paris depuis quelques jours ? » leur demande la procureure. Les trois répondent ne « pas avoir d’avis ». « C’est leur droit le plus strict, mais je vais vous donner le mien », lance la représentante du ministère public en entamant ses réquisitions. « Je déplore et regrette que des messages politiques tout à fait légitimes soient brouillés par des casseurs », affirme-t-elle.

Un mois de prison avec sursis pour refus de donner les empreintes

Parlant d’un « procès-verbal d’interpellation très circonstancié et précis », la procureure stigmatise des « faits graves : mettre le feu à des poubelles, alors qu’il y a des commerces, des habitations à côté ».

Avant de requérir de 140 à 175 heures de travail d’intérêt général (TIG) ou si les prévenus le refusaient, quatre à cinq mois de sursis probatoire. « Vous n’êtes pas au service de la répression du mouvement social », lance Me Hannah Rajbenbach, qui cite un communiqué du Syndicat de la magistrature (classé à gauche), demandant la relaxe de Martin pour son refus de « palmage ».

« Ce dossier est très symptomatique de ce que nous observons depuis quelques jours », avec « des personnes interpellées très souvent à tort » puis « remises en liberté sans aucune suite judiciaire », plaide Me Raphaël Kempf. Tançant un dossier « extrêmement flou et insuffisant », des « déclarations ahurissantes » voire « surréalistes » des policiers, il demande la relaxe.

Après une demi-heure de délibéré, à 21h45, les trois prévenus sont relaxés pour le feu de poubelle. Seul Martin est condamné à un mois de prison avec sursis pour avoir refusé de donner ses empreintes.

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