Opinion
L’État de droit en Chine communiste n’est pas ce que l’on imagine
En Chine communiste, l’« État de droit » est par essence arbitraire.

Le bâtiment de la Cour populaire suprême de Chine, à Pékin, le 30 mars 2006. STR/AFP via Getty Images
Il arrive parfois que Xi Jinping fasse des déclarations si grandiloquentes que cela prête à sourire. Celle du 18 novembre en est un parfait exemple, relayée sans recul par le quotidien officiel China Daily :
« Le président Xi Jinping a appelé à préserver l’unité entre la direction du Parti, la gouvernance du pays par le peuple et l’État de droit, et à déployer des efforts concertés pour ouvrir de nouvelles perspectives dans l’avancement de l’État de droit en Chine. »
Une formule emphatique et creuse, car le Parti communiste chinois (PCC) décide en permanence de ce qu’est la loi, de ceux à qui elle s’applique et de la manière dont elle est appliquée, chaque jour et à chaque instant.
Examinons le système.
Le système juridique chinois
Le droit chinois repose sur les « quatre principes cardinaux » : maintien de la voie socialiste, de la « dictature démocratique du peuple », de la direction du PCC, et du marxisme-léninisme (ainsi que de la « pensée de Mao Zedong » et de la « pensée de Xi Jinping »).
S’il existe bien une Constitution écrite, celle-ci n’offre aucune protection constitutionnelle réelle, en particulier pour les 1,3 milliard de Chinois qui ne sont pas membres du Parti.
Il y a ensuite sur six institutions qui appliquent ces principes et contrôlent l’ensemble du système juridique.
Assemblée nationale populaire
L’Assemblée nationale populaire (ANP) est une chambre d’enregistrement chargée de rédiger et de modifier les lois. Elle est composée quasi exclusivement de membres du Parti, auxquels s’ajoutent quelques représentants de partis satellites entièrement contrôlés.
En pratique, seuls les quelque 100 millions de membres du Parti participent à l’élaboration du droit. Les 93 % restants de la population n’ont aucun pouvoir sur la loi ni sur son application.
Conseil des affaires d’État
Cet organe exécutif adopte l’essentiel des règles du quotidien sous forme de « règlements administratifs » qui régissent la vie économique, sociale et administrative du pays. Jusqu’à une trentaine de règlements par an sont ainsi promulgués, tous juridiquement contraignants.
Cour populaire suprême
La Cour populaire suprême (CPS) dirige de fait l’ensemble du système judiciaire. Le droit réellement appliqué en Chine est celui qu’elle interprète et met en œuvre, bien plus que le texte voté par l’ANP.
Elle publie des « interprétations judiciaires » obligatoires, impose des jurisprudences-guides, contrôle les budgets et les nominations des juges, évalue leurs performances et fixe les règles de procédure civile, pénale et administrative.
Parquet populaire suprême
Le Parquet populaire suprême (PPS) est l’autorité de poursuite la plus élevée. Lui seul peut engager des poursuites pénales. La police ne peut pas inculper directement : toute affaire grave doit passer par une décision du parquet.
Le PPS peut également engager des actions dites « d’intérêt public » contre des administrations, entreprises ou individus, notamment pour atteinte à l’environnement, à la sécurité alimentaire, à la réputation des « héros et martyrs », ou à la propriété publique. Il constitue un instrument central des campagnes anticorruption et des offensives politiques décidées par le Politburo.
Commission nationale de supervision
Prévue par la Constitution, cette commission est l’organe disciplinaire et d’enquête le plus puissant en matière d’exercice du pouvoir public. Elle peut émettre des « recommandations de supervision », véritables ordres écrits imposant des changements immédiats à des institutions publiques. Autrement dit, elle fait la loi en temps réel.
Commission centrale des affaires politiques et juridiques
Connue sous le nom de Zhengfawei, cette instance du Parti surplombe toutes les autres institutions juridiques. Son secrétaire rend directement compte au Politburo et à Xi Jinping.
Si l’ANP vote les lois et si les autres organes les appliquent, c’est bien le Zhengfawei qui décide de leur interprétation concrète, des poursuites engagées et de l’issue des affaires judiciaires. Ce que dit le Parti fait loi.
Conclusion
La Chine dispose de nombreuses lois et d’un appareil juridique complexe. Mais c’est la Commission centrale des affaires politiques et juridiques, agissant pour le compte du Politburo et de Xi Jinping, qui détermine ce que la loi signifie réellement, qui sera poursuivi et qui gagnera ou perdra devant la justice.
Derrière les discours sur la « gouvernance par le droit », l’objectif semble être d’étendre la coordination entre le Zhengfawei et le Parquet afin d’imposer rapidement des politiques et de poursuivre des cibles politiques en contournant les procédures établies.
Voilà ce que recouvre l’« État de droit à caractéristiques chinoises ».
Les opinions exprimées dans cet article sont celles de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement celles d’Epoch Times.

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