Botswana: réactions passionnées après le rétablissement de la chasse aux éléphants

23 mai 2019 15:53 Mis à jour: 23 mai 2019 15:56

Scandale ou aménagement nécessaire ? La décision du Botswana de lever l’interdiction de la chasse aux animaux sauvages a suscité jeudi des réactions passionnées chez les défenseurs de la faune et les habitants de ce pays prisé des amateurs de safari.

Après des mois de réflexion, le gouvernement a annoncé le rétablissement de la chasse en soulignant qu’elle reprendrait « de manière ordonnée et éthique » et que « les animaux en danger » ne seraient pas concernés par sa décision. « Les conflits entre humains et éléphants ont augmenté en nombre et en intensité et affectent de plus en plus les moyens de subsistance » des habitants, a-t-il justifié sur la foi d’une étude.

Le Botswana abrite à lui seul un tiers des 415.000 éléphants sauvages d’Afrique. Leur chasse y était interdite depuis 2014, à la suite d’une décision du président de l’époque Ian Khama, un fervent défenseur des animaux. Mais des députés du Parti démocratique au Botswana (BDP), au pouvoir depuis l’indépendance en 1966, ont fait pression pour modifier la loi, estimant que le nombre d’éléphants était devenu ingérable dans certaines régions.

La levée du moratoire a suscité l’indignation de plusieurs organisations de défense des animaux. C’est « scandaleux », a dénoncé l’organisation Humane Society International, basée à Londres. La population des éléphants du Botswana est « vitale pour la survie régionale de cette espèce emblématique », a-t-elle estimé.

Si le nombre de pachydermes a augmenté dans certaines régions africaines, il a diminué de 111.000 dans le monde en une décennie, surtout à cause trafic d’ivoire, selon l’Union internationale pour la conservation de la nature (IUCN). « Reprendre la chasse des éléphants suscite des questions morales et va à l’encontre de tous les efforts internationaux pour protéger ces géants, mais en plus cela risque de porter préjudice à la précieuse industrie touristique », a encore prévenu Humane Society International.

Le tourisme, souvent haut-de-gamme, est l’une des principales ressources du Botswana, l’un des plus prospères du continent. La levée de l’interdiction de la chasse est « une décision politique qui n’est pas dans l’intérêt de la préservation (de la faune) au Botswana », a aussi estimé Jason Bell, du Fonds international pour la protection des animaux (Ifaw), basé aux Etats-Unis.

« Les éléphants sont utilisés comme des bouc-émissaires », a-t-il ajouté, « la chasse ne fera rien pour réduire le conflit entre les humains et les éléphants. On doit s’interroger sur les raisons de rétablir la chasse des éléphants au Botswana ». La décision de Gaborone pourrait se révéler populaire auprès des électeurs ruraux en prévision du scrutin présidentiel d’octobre, où le sortant Mokgweetsi Masisi, au pouvoir depuis 2018, se représente.

Sur le terrain, l’ONG locale Chobe Enclave Conservation Trust, qui regroupe cinq villages du nord du pays, s’en réjouit. « Nous sommes très contents », a expliqué à l’AFP son président, Amos Mabuku. « On veut remercier le gouvernement de nous avoir entendus parce que nous somment les plus touchés par la coexistence avec ces animaux. On a perdu des frères, des champs, notre bétail », à cause des animaux sauvages, a-t-il expliqué.

M. Mabuku a également souligné l’importance économique des chasses organisées pour les amateurs de trophée. Avant son interdiction, Chobe Enclave Conservation Trust engrangeait 6,5 millions de pula (534.000 euros) par an. Depuis, ses revenus ont chuté à 2 millions (164.000 euros).

« Les moyens de subsistance dépendent des revenus tirés de la chasse. On parle de chasse professionnelle, contrôlée, de conservation, pas de braconnage », a insisté Amos Mabuku. Le Fonds mondial pour la nature (WWF) a aussi souligné les avantages de la chasse, à condition qu’elle soit très encadrée.

« Dans certains cas rigoureusement contrôlés, notamment des espèces menacées, les preuves scientifiques montrent que le chasse peut être un moyen efficace de conservation » de la faune, a estimé l’ONG.

D.C avec AFP

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