Chasse: pourquoi les tentatives de régulation ont du plomb dans l’aile

Par Epoch Times avec AFP
5 avril 2023 14:00 Mis à jour: 5 avril 2023 14:25

Les élus qui ont la chasse dans le viseur parviennent rarement à atteindre leur cible face à ce qu’ils dénoncent comme un « lobby » qui a l’ « oreille attentive de l’Élysée », un argument rejeté par ses partisans qui défendent un « patrimoine rural ». 

« Je ne suis pas un fada de la chasse, je ne suis pas pour l’interdire, mais je passe quand même pour un anti-chasse », déplore auprès de l’AFP le député écologiste Charles Fournier, qui propose d’en interdire la pratique le dimanche dans une proposition de loi qu’il présentera jeudi lors de la journée réservée à sa formation à l’Assemblée nationale.

Né à Salbris, ville de Sologne qu’il décrit comme « la capitale de la chasse », l’élu présente sa proposition comme un « bon compromis » et s’indigne du tir nourri subi en commission avec pas moins de « 25 amendements de suppression » déposés contre l’unique article du texte par la majorité présidentielle, le groupe Les Républicains (LR) et le Rassemblement national (RN).

S’il ne se fait guère d’illusion sur le sort réservé à sa proposition de loi, d’autant qu’elle a peu de chance d’être débattue car elle figure en septième et dernière position de la « niche parlementaire » des Verts, M. Fournier déplore un « lobby » de la chasse « qui a l’oreille attentive de l’Élysée ». Un rôle complètement assumé par Thierry Coste, lobbyiste professionnel au service de la cause des chasseurs depuis 29 ans. « Ce n’est pas un gros mot pour moi », assure-t-il à l’AFP, tout en soulignant « que la force de la chasse, c’est qu’il y a bien d’autres choses que la chasse ».

Prés de 10% du corps électoral

À ses yeux, ce qu’il définit comme un « loisir » voire une « passion » fait « partie du patrimoine rural » français et constitue à ce titre « une bonne illustration de ces territoires pour les politiques, qu’ils pratiquent la chasse ou pas ».  M. Coste estime à plus de « quatre millions le nombre de Français qui détiennent un permis de chasse », chiffre auquel il ajoute « les familles et les connaissances » pour le porter à pas moins de sept à huit millions d’électeurs, soit environ 10% du corps électoral. « Il y a donc un fort réseau d’influence qui explique que les politiques soient prudents », argumente-t-il.

Un poids électoral également mis en avant par Willy Schraen, président de la Fédération nationale des chasseurs : « Comment voulez-vous ne pas parler à une corporation qui représente autant de monde ? Quel est l’homme d’État qui ne lui parlerait pas, qu’il l’aime ou pas ? » Il va plus loin, défendant un « acquis du peuple lors de la Révolution (…) avec des notions de convivialité, de partage, de transmission et surtout de tradition. Tout cela dépasse le lobbying ». Des arguments contestés par M. Fournier, qui assure que les personnes qui pratiquent la chasse sont « un peu plus de 900.000, soit à peine 2% de la population », tout en soulignant que la majorité des Français sont favorables au dimanche sans chasse « y compris dans les territoires ruraux ».

À ses yeux, « il existe donc un décalage très important entre ce que défend la représentation nationale » et la réalité sur le terrain. Un autre élément entre en jeu : lors des législatives de juin, une vague Rassemblement national a déferlé sur les territoires ruraux. Normal donc pour Thierry Coste que les élus « n’aient pas envie de maltraiter cet électorat » après « un vote de protestation qui dépasse la chasse ». D’autant « qu’une partie non-négligeable de l’électorat chasseur vote aujourd’hui Marine Le Pen », reconnaît-il.

Des « accords locaux » plutôt qu’une « règle unique nationale »

Face à l’impossibilité de se mettre d’accord à l’échelon national, la commune de Saint-Dié-des-Vosges a peut-être trouvé le bon angle : la chasse y sera désormais interdite le dimanche après-midi dans deux de ses massifs forestiers en vertu d’un « commun accord » entre la mairie et les chasseurs. Un compromis salué par M. Coste : « Nous avons toujours été favorables aux accords locaux, fruits d’une concertation ». M. Fournier est plus réservé : « Cette possibilité existe dans la loi, mais son utilisation est exceptionnelle. Je préfère une règle unique nationale ».

A l’influente Association des maires de France (AMF), son secrétaire général adjoint Joël Balandraud se déclare quant à lui « partisan des accords locaux ». « Localement, les gens se connaissent et dans les territoires ruraux, c’est à la commune que ça se joue », ajoute-t-il.

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