La Chine défie furtivement la puissance militaire de l’Occident

Par Bin Zhao et Michael Zhuang
23 octobre 2023 21:15 Mis à jour: 23 octobre 2023 21:15

Il y a dix ans, l’État-parti chinois a présenté au monde son titanesque projet Initiative Ceinture et Route (Belt and Road Initiative – BRI ou ICR), souvent qualifié de « nouvelle route de la soie », qui a été officiellement destiné à promouvoir le développement économique en reliant la Chine aux marchés d’Asie, d’Afrique, d’Europe, d’Océanie et d’Amérique latine par le biais d’investissements dans diverses importantes infrastructures.

Ce projet a été considéré en tant que plan économique emblématique du dirigeant chinois Xi Jinping dans le cadre de sa stratégie de « diplomatie des grands pays ». Attirés par la promesse déguisée de développement économique, plus de 100 pays du monde entier ont adhéré à l’ICR. Au cours de la dernière décennie, de nombreux pays ont contracté d’énormes dettes, tandis que le régime chinois a pu s’engager dans une rivalité implicite avec l’Occident. Cependant, l’ambition de Pékin de dominer le monde en propageant son idéologie communiste par le biais de l’ICR ne s’est pas concrétisée.

Lors du sommet de l’ICR qui s’est récemment achevé à Pékin, Xi Jinping a déclaré qu’il injecterait 100 milliards de dollars supplémentaires dans cette Initiative.

Mike Sun, un consultant en investissement et expert sur la Chine, a expliqué à Epoch Times que le régime du Parti communiste chinois (PCC) profite de son progrès économique pour défier furtivement la puissance militaire de l’Occident – surtout des États-Unis en tant que première puissance occidentale – et que, en fin de compte, le régime cherche la domination mondiale.

L’objectif militaire de l’ICR

Les infrastructures sont au cœur de l’ICR. Qu’il s’agisse de ports, de barrages, d’autoroutes, de ponts, de chemins de fer, de gazoducs ou de télécommunications, Pékin y a investi massivement dans le monde entier. Au cours de la dernière décennie, l’État-parti a lancé plus de 3000 projets dans les pays membres de l’ICR pour un investissement total de près de 1000 milliards de dollars.

Il n’est pas difficile d’identifier les deux principaux objectifs de l’ICR : premièrement, exporter la capacité intérieure excédentaire du régime chinois tout en accédant aux ressources énergétiques et minérales nécessaires au développement de la Chine ; et, deuxièmement, utiliser l’initiative pour tenter de promouvoir l’internationalisation de la monnaie chinoise.

Mike Sun a également attiré l’attention sur les objectifs militaires de l’Initiative : « L’ICR est vouée à avoir des implications militaires et géopolitiques (…). Le PCC n’a pas la force militaire nécessaire pour affronter directement les États-Unis, alors il cherche à étendre son influence géopolitique par le biais de la connexion à la Chine par des voies terrestres. »

Après une décennie de mise en œuvre de l’ICR, de nombreux ports stratégiques à travers le monde ont été inclus dans le cadre de ce programme. Selon les données de 2018, Pékin a investi dans la construction d’au moins 35 ports à l’étranger. Ces ports sont situés en Asie, en Afrique, en Europe et au Moyen-Orient, et beaucoup d’entre eux sont stratégiques, notamment le port du Pirée en Grèce, le port de Gwadar au Pakistan, le port en eau profonde de Kyaukphyu au Myanmar, le port international de Hambantota au Sri Lanka, le port de Vado Ligure en Italie, le port en eau profonde de Laiki au Nigéria, etc.

Les statistiques montrent que, en comparaison avec les nombreuses bases militaires des pays occidentaux éparpillées dans le monde, la Chine a délibérément ciblé les ports les plus importants et stratégiques, élaborant discrètement un plan militaire pour faire face à l’Occident.

Chen Liangzhi, chercheur à l’Institut taïwanais de recherche sur la défense et la sécurité nationales, a écrit un article intitulé From Commercial Ports to Military Ports: Strategic Pivot Points and China’s Projection of Military Power (Des ports commerciaux aux ports militaires : points d’appui stratégiques et projection de la puissance militaire de la Chine) qui analyse les intentions réelles des efforts de Pékin pour obtenir l’accès aux ports à l’étranger.

M. Chen souligne que le port international de Hambantota, au Sri Lanka, a été le premier à être cédé à la Chine pour 99 ans, après que le Sri Lanka est tombé dans le « piège de la dette ».

Le port de Hambantota est la plus importante plaque tournante du transport maritime dans l’océan Indien. Il s’agit non seulement d’un carrefour sur les voies maritimes reliant l’Asie et l’Europe, mais aussi d’un nœud maritime reliant le Moyen-Orient et l’Afrique de l’Est à l’Asie du Sud et du Sud-Est. Le pétrole importé du Moyen-Orient par les pays asiatiques passe d’abord par Hambantota, puis se dirige vers l’est dans le détroit de Malacca. Contrôler le port international de Hambantota revient à contrôler la voie commerciale maritime entre l’Asie, le Moyen-Orient et l’Europe.

L’État-parti chinois est également impliqué dans la construction du port maritime de Gwadar au Pakistan et du port en eau profonde de Kyaukphyu au Myanmar qui, avec le port international de Hambantota, forment un triangle donnant sur le Moyen-Orient et l’océan Indien.

En outre, le contrôle étendu de Pékin sur les ports du monde entier dans le cadre de l’ICR s’étend également à des pays qui sont des alliés clés des pays occidentaux au Moyen-Orient. En 2021, des documents top secrets divulgués par les services de renseignement américains ont révélé l’imagerie satellite confirmant des activités suspectes au port Khalifa d’Abou Dhabi, aux Émirats arabes unis – un port clé pour plusieurs pays occidentaux au Moyen-Orient. La Chine a été soupçonnée de construire des installations militaires, ce qui a alarmé en particulier la Maison-Blanche, et les constructions concernées ont été temporairement interrompues après des demandes répétées du gouvernement américain.

Un incident similaire s’est produit au port de Haïfa en Israël. En 2015, le gouvernement Netanyahou a accordé un bail de 25 ans, à partir de 2021, au Shanghai International Port Group (SIPG) pour un terminal dans ce port fréquemment visité par la marine américaine. Le gouvernement américain y voyait une menace militaire et a demandé à Israël de prendre des mesures pour réglementer ces investissements chinois.

« En apparence, l’initiative Ceinture et Route est un plan stratégique purement économique, mais la vérité est que le PCC a un programme militaire clair derrière cette initiative. Ces dernières années, les bases militaires qui sont apparues le long de l’ICR sont devenues de plus en plus évidentes », a constaté Chen Liangzhi.

La Chine vise à dominer le monde par le biais de l’ICR

Selon Mike Sun, le véritable objectif de l’ICR est de promouvoir dans le monde le concept de la « communauté de destin commun pour l’humanité » – un concept qui représente essentiellement la « philosophie » du communisme. Après son arrivée au pouvoir en Chine, Xi Jinping a rebaptisé le communisme « communauté de destin commun ».

Le PCC a également indiqué clairement que son Initiative Ceinture et Route et la « communauté de destin commun » sont étroitement liées, de sorte qu’elles se soutiennent et se renforcent mutuellement. Le 10 octobre, le Conseil d’État chinois a publié un livre blanc indiquant que l’ICR est un élément majeur de la « communauté de destin commun ».

Yuan Hongbing, un universitaire chinois qui a eu des contacts étroits avec Xi Jinping et d’autres hauts responsables du PCC, a expliqué que Xi Jinping avait hérité du fondamentalisme de Mao Zedong et qu’il avait maintenu à l’époque l’objectif de la domination mondiale par le communisme. M. Yuan s’est rappelé que Xi Jinping lui avait confié qu’il faudrait au moins 4 milliards de Chinois pour « diriger le monde » si le communisme était installé à l’échelle mondiale.

Les problèmes de l’ICR

Alors que Pékin étend son influence géopolitique grâce au « piège de la dette » dans le cadre de l’ICR, les pays occidentaux élaborent des stratégies pour le contrecarrer. Lors du sommet du G20 récemment tenu à New Delhi, les dirigeants des États-Unis, de l’Inde, de l’Arabie saoudite, des Émirats arabes unis, de la France, de l’Allemagne, de l’Italie et de la Commission européenne ont dévoilé un projet d’infrastructures du corridor commercial Inde-Moyen-Orient-Europe (IMEC).

Ce projet se compose de deux corridors distincts : le corridor oriental, qui relie l’Inde au golfe Persique, et le corridor septentrional, qui relie le golfe Persique à l’Europe. Selon un document de la Commission européenne, outre la ligne ferroviaire, l’IMEC comprend une ligne de transmission électrique, un pipeline d’hydrogène et une ligne d’abonné numérique à haut débit.

En outre, certains des signataires de l’IMEC sont également membres de l’ICR, comme l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis.

Bien que le projet de l’IMEC soit très récent, l’ambition du PCC d’exporter son idéologie et de parvenir à une domination mondiale a peu de chances de se réaliser. Le commentateur indépendant Zhuge Mingyang a laissé entendre à Epoch Times que l’organisation du récent sommet de l’ICR à Pékin semble être un grand geste, mais que ce gigantesque projet chinois fait face en réalité a de gros problèmes.

« La pandémie qui dure depuis trois ans ainsi que la crise économique imminente de la Chine ont rendu le régime chinois incapable de s’occuper de lui-même, et l’Initiative Ceinture et Route n’est plus qu’une promesse vide de sens. Xi Jinping tente de rassembler davantage de partisans en injectant plus d’argent dans cette initiative, mais aucun pays ne veut plus s’engager vraiment avec le PCC (…). En outre, l’Occident comprend de mieux en mieux la nature du régime chinois, et le PCC n’a plus de marge de manœuvre pour commercialiser son idéologie communiste. »

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