Frères musulmans: la chercheuse Florence Bergeaud-Blackler explique comment l’idéologie islamiste est entrée dans le milieu universitaire

Par Emmanuelle Bourdy
12 octobre 2023 05:45 Mis à jour: 15 avril 2024 12:53

Depuis l’attaque surprise de combattants du Hamas contre Israël samedi dernier, la classe politique a unanimement apporté son soutien à Israël, à l’exception de certains partis d’extrême-gauche, comme c’est le cas de La France insoumise (LFI) ou du Nouveau Parti anticapitaliste (NPA). Florence Bergeaud-Blackler, docteure en anthropologie, a très mal accueilli les propos des représentants de ces deux partis. Invitée d’Europe 1 ce mardi 10 octobre, elle a expliqué comment de tels discours sont entrés dans la société et notamment au sein de certains milieux universitaires.

Depuis les offensives menées par le groupe terroriste du Hamas en direction d’Israël ce samedi, les groupes politiques LFI et NPA ont affiché une opinion pour le moins ambigüe sur cette attaque. Pour Florence Bergeaud-Blackler, chercheuse au CNRS et spécialiste de l’islamisme, ce discours n’est pas nouveau et trouve un écho au cœur de certaines sphères universitaires accusées d’apologie du terrorisme.

Des propos permettant à LFI et NPA de « faire leur marché électoral »

Alors que Philippe Poutou du NPA a dit dans son communiqué « soutenir la lutte des Palestiniens », dans le même temps, Jean-Luc Mélenchon et ses proches ont quant à eux refusé de parler « d’attaque terroriste ». Concernant les positions de ces deux partis politiques, Florence Bergeaud-Blackler s’est montrée choquée, tout en précisant qu’« en même temps », ces propos n’ont « rien de surprenant », puisqu’ils sont « tenus depuis plusieurs années par ces deux partis qui viennent simplement faire leur marché électoral ».

Par ailleurs ces positions ne sont pas uniquement prônées par ces deux partis politiques mais se retrouvent également dans le monde universitaire, au sein d’associations étudiantes qui ne condamnent pas non plus ces attaques menées par le Hamas et appellent même à manifester en leur faveur. Florence Bergeaud-Blackler a effectivement relevé les propos du syndicat Solidaire étudiant, qui est actif dans la prestigieuse EHESS (École des hautes études en sciences sociales). La chercheuse au CNRS a précisé qu’« un certain nombre de groupes » – qui ne sont pas « très nombreux » mais sont en revanche « très bruyants » – « font partie d’une espèce de dérive qu’on voit au cours des 30 ou 40 dernières années ».

« Des influenceurs » capables « d’influencer des élites politiques et médiatiques »

« En réalité l’université, les centres de recherche, sont à l’avant-garde des mouvances politiques », a-t-elle encore stipulé, indiquant que depuis 1968, « l’université est devenue au fil du temps un lieu privilégié que les mouvements sociaux politiques religieux investissent en priorité pour se diffuser dans toute la société ».

« Donc ils ne cherchent plus l’approbation populaire de la base, ce qui nécessiterait un long travail, ils forment des influenceurs », a-t-elle poursuivi, signalant que ces influenceurs sont « hyper visibles », « capables de provoquer le buzz » et « d’influencer des élites politiques et médiatiques ».

Déplorant ce qu’est devenu le campus universitaire, elle a précisé que « parmi ces groupes, il y a ces mouvements islamistes et ces mouvements d’extrême-gauche », et ceux-ci se sont « immédiatement mobilisés » pour « soutenir ce qu’ils appellent la ‘Palestine occupée’, en réalité donc cette organisation terroriste qu’est le Hamas, qui est la branche palestinienne des Frères musulmans, il faut le rappeler ».

Ces « stratégies de boucliers humains qu’utilisent les terroristes du Hamas »

Ce professeur de l’université Paris-Panthéon-Assas – qui a seulement été suspendu pour avoir dit à ses élèves en retard ce lundi qu’il allait leur « faire comme à la rave », faisant allusion au massacre perpétré par le Hamas en Israël – devrait « être immédiatement mis à pied », s’est emportée Florence Bergeaud-Blackler qui n’a « pas de mots pour qualifier ça ». « Il faut prendre des mesures d’exclusion et traduire en justice ces groupes », a-t-elle réclamé.

Pour la spécialiste de l’islamisme, les Frères musulmans ont influencé la société avec leurs opinions et les tensions que connaît la France autour du conflit israélo-arabe sont « palpables depuis fort longtemps ».

« Les populations issues de l’immigration arabe et turc ont une vision assez différente de ce conflit », a-t-elle expliqué, cette conception ayant été réislamisée dans les années 80 « sous la pression de l’Iran et des Frères musulmans ». De ce fait, plusieurs générations de familles maghrébines ont vu en boucle, par le biais des télévisions marocaines algériennes et tunisiennes, des images d’enfants tués à Gaza. Cependant « rien n’est jamais contextualisé » et on ne parle pas des « stratégies de boucliers humains qu’utilisent les terroristes du Hamas », a-t-elle encore regretté, sans compter que les professeurs des écoles « ne peuvent pas aborder ces questions » et « ces tensions-là, c’est une étincelle qui peut les embraser ».

Le silence « inquiétant » de l’autorité musulmane en France

La docteure en anthropologie a aussi fait remarquer que la Grande Mosquée de Paris a réagi, en appelant au retour à la paix, mais sans toutefois condamner clairement cette attaque du Hamas. « Pareil pour le Conseil français du culte musulman » qui est « totalement absent depuis deux jours », a-t-elle ajouté, estimant cela « quand même inquiétant ». « L’autorité musulmane en France reste sur une position ambigüe qui est celle (en fait) de LFI. C’est plus qu’ambigu, c’est partial », a-t-elle conclu.

Florence Bergeaud-Blackler est l’auteure d’un livre intitulé Le Frérisme et ses réseaux, paru aux éditions Jacob le 25 janvier dernier. Cet ouvrage, racontant l’influence grandissante de cette idéologie politico-religieuse en France, lui a valu des menaces de mort. Notons également que son compte Twitter a été bloqué par une attaque sur les médias sociaux. « Pendant que les djihado-gauchistes font l’apologie d’actes terroristes et peuvent encore utiliser leur outil de propagande, Florence Bergeaud-Blackler est victime des censeurs algorithmiques, semble-t-il en raison d’une attaque coordonnée. Total soutien », a écrit à ce sujet David Lisnard, le maire de Cannes, ce mercredi 11 octobre sur X.

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