La Chine emprisonne un éditeur taïwanais qui a publié des livres critiques à l’égard du PCC

Par Dorothy Li
30 avril 2023 15:57 Mis à jour: 30 avril 2023 15:57

Un éditeur de livres basé à Taïwan a été arrêté alors qu’il était en visite à Shanghai, ont confirmé mercredi les autorités chinoises. Les autorités taïwanaises ont déclaré que cette mesure témoignait de l’intimidation du régime communiste à l’égard de l’île autonome.

Li Yanhe, connu sous son nom de plume, Fu Cha, est né en Chine, mais vit à Taïwan depuis 2009. Il a été rédacteur en chef de Gusa Publishing, une société qui a publié des ouvrages critiques à l’égard du Parti communiste chinois (PCC).

En mars, M. Li s’est rendu à Shanghai pour rendre visite à des parents, mais un ami a, par la suite, perdu le contact avec lui. Les inquiétudes concernant la sécurité de Li Yanhe et le lieu où il se trouve se sont accrues après l’apparition, la semaine dernière, d’informations selon lesquelles la police chinoise l’aurait secrètement détenu.

Les autorités chinoises ont confirmé mercredi la détention de M. Li. Ce dernier fait l’objet d’une enquête pour « suspicion de participation à des activités mettant en danger la sécurité nationale », a déclaré Zhu Fenglian, porte-parole du bureau des affaires taïwanaises de Pékin, aux journalistes lors d’une conférence de presse.

« La détention de l’éditeur et animateur de radio Li Yanhe est un autre exemple de l’intolérance suffocante de la Chine envers une presse libre », a déclaré Iris Hsu, représentante du Comité pour la protection des journalistes (CPJ) basé aux États-Unis, dans un communiqué. « Les autorités chinoises doivent cesser d’accuser les journalistes étrangers et locaux d’atteinte à la sécurité nationale.

L’annonce de Pékin intervient le jour même où le Parlement chinois a adopté une loi anti-espionnage modifiée, élargissant la définition de l’espionnage à « tous les documents, données, matériaux ou articles liés à la sécurité et aux intérêts nationaux », a rapporté le média officiel Xinhua. Toutefois, la loi ne précise pas ce qui relève de la sécurité nationale, notent les analystes, ce qui pourrait accroître encore davantage les risques pour les entreprises et les journalistes étrangers en Chine.

M. Li n’est pas le premier à être détenu après avoir publié des livres interdits en Chine. En 2015, cinq éditeurs et employés de Causeway Bay Books, une librairie de Hong Kong connue pour vendre des textes critiques à l’égard des dirigeants du PCC, ont été arrêtés à Hong Kong et placés en détention sur le continent. Le plus connu d’entre eux, le suédois Gui Minhai, a été accusé de « fournir des renseignements » à l’étranger et purge actuellement une peine de dix ans d’emprisonnement.

Des pancartes montrant le libraire disparu Gui Minhai (à droite) ont été laissées par des membres du Parti civique devant le bureau de liaison avec la Chine à Hong Kong le 19 janvier 2016. (Philippe Lopez/AFP via Getty Images)

Li Yanhe, 52 ans, est né dans la province de Liaoning, dans le nord de la Chine. Il a épousé une Taïwanaise et s’est installé sur l’île en 2009.

Sur l’île démocratique de Taïwan, M. Li a créé la maison d’édition Gusa, qui publiait un large éventail de traductions en langue chinoise, notamment des ouvrages historiques ou politiques qui ne pouvaient absolument pas être publiés en Chine.

Parmi les traductions publiées par Gusa figure Xinjiang Uyghur Autonomous Region : 70 Years of Chinese Communist Rule, une analyse révélant les violations des droits de l’homme commises par le PCC à l’encontre des musulmans Ouïghours, rédigée par Jun Kumakura, professeur associé à l’université japonaise Hosei. Gusa a également publié la version chinoise de The People’s Republic of Amnesia : Tiananmen Revisited, un livre qui révèle la répression meurtrière des manifestations étudiantes en faveur de la démocratie en 1989 par la journaliste primée Louisa Lim.

La détention de M. Li montre que « le PCC met directement la main sur l’industrie de l’édition à Taïwan en supprimant la liberté d’expression et de publication », a déclaré sur Facebook Lee Ming-che, un militant taïwanais des droits de l’homme qui a déjà été emprisonné en Chine pendant cinq ans.

Ces dernières années, le PCC a détenu plusieurs Taïwanais alors qu’il intensifiait les pressions politiques, diplomatiques et militaires sur Taipei. Par exemple, le 24 avril, la police chinoise a officiellement arrêté Yang Chih-yuan, un militant politique taïwanais, accusé de « sécession ». M. Yang a été placé en garde à vue en août 2022, quelques heures après la fin de la visite à Taïwan de Nancy Pelosi, alors présidente de la Chambre des représentants du Congrès américain.

Le PCC revendique l’île autogérée comme son propre territoire, quitte à s’en emparer de force si nécessaire.

Le ministre du Conseil des affaires continentales de taïwan, Chiu Tai-san, a déclaré que la détention de Li et Yang montrait que le PCC exerçait sa juridiction sur Taïwan selon le principe du « bras long », à savoir, une juridiction étendue.

« Il y a un parfum d’intimidation dans tout cela, et c’est une démonstration de répression de la part du PCC », a déclaré M. Chiu à Taipei le 26 avril.

Le nouveau ministre du Conseil des affaires continentales (MAC) de Taïwan, Chiu Tai-san, s’exprime lors d’une cérémonie au siège du MAC à Taipei, le 23 février 2021. (Sam Yeh/AFP via Getty Images)

Des écrivains, des traducteurs et des groupes de défense des droits de l’homme à l’étranger ont appelé à la libération immédiate de M. Li.

« À Taïwan, la liberté d’expression et de publication, ainsi que la liberté académique, sont comme l’air que nous respirons. Elles font partie de la vie quotidienne de chaque lecteur, de chaque auteur, de chaque traducteur et de chaque éditeur », ont déclaré un groupe de 40 écrivains et le personnel de Gusa dans un communiqué commun.

« Nous pensons que Fu Cha n’a commis aucun crime en jouissant des libertés d’expression et de publication », lit-on dans la lettre ouverte. « Nous exhortons le gouvernement chinois à libérer immédiatement Fu Cha afin qu’il puisse retourner dans sa famille bien-aimée et à son travail d’éditeur. »

Angeli Datt, responsable de la recherche et du plaidoyer de PEN America en Chine, a qualifié la détention de Li comme « une tentative scandaleuse de museler le travail de la maison d’édition Gusa, alors que le Parti communiste chinois continue d’essayer de réduire au silence la liberté d’expression à l’extérieur de ses frontières ».

« Publier n’est pas un crime, et Li Yanhe devrait être libéré immédiatement et sans condition », a déclaré Angeli Datt dans un communiqué du 26 avril. « Sa détention est une attaque contre la liberté d’expression et un autre exemple de la belligérance du gouvernement chinois envers quiconque défend l’échange libre et ouvert d’idées. »

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