Le régime chinois indemnise la famille d’une prisonnière de conscience

10 août 2017 17:28 Mis à jour: 10 août 2017 20:36

Dans une décision sans précédent, un tribunal chinois a prononcé un verdict selon lequel une indemnisation importante doit être versée à la famille d’une prisonnière de conscience décédée en détention. Ce cas pourrait servir d’exemple à de nombreuses familles à travers toute la Chine pour demander une indemnisation d’État suite aux décès de leurs proches.

En mai 2012, moins de 14 heures après son arrestation, Xu Chensheng a été déclarée morte dans un hôpital près de la ville de Chenzhou, province du Hunan. Les autorités locales n’ont informé la famille que deux jours plus tard, affirmant que cette mère de 47 ans était « décédée subitement d’une maladie ». Son fils a déclaré que Mme Xu était en très bonne santé avant son arrestation.

Mme Xu a été arrêtée pour avoir distribué des documents sur le Falun Gong, une discipline spirituelle traditionnelle de type qigong comprenant des exercices, dont une méditation, et des enseignements fondés sur les principes d’authenticité, bienveillance et tolérance. Craignant la popularité grandissante de cette pratique, ainsi que son indépendance du Parti-État, en 1999 le chef du Parti Jiang Zemin a lancé une campagne de répression sur le plan national. Selon les sources officielles, au début de la persécution, le Falun Gong était pratiqué par environ 70 millions de Chinois issus de toutes les couches sociales.

Le cas de Xu serait le premier cas depuis 1999 dans lequel un tribunal chinois a officiellement remis une ordonnance d’indemnisation à la famille d’un pratiquant de Falun Gong tué, a déclaré Heng He, principal analyste politique de la chaîne de télévision libre New Tang Dynasty Television, partenaire d’Epoch Times. Fin 2016, la famille a reçu 319 000 yuans (40 300 euros).

Dans le passé, certaines familles dont les parents sont décédés suite à la persécution pouvaient recevoir une indemnisation sous la forme de versements de dessous-de-table, visant à les faire taire au lieu de réclamer un redressement des torts. « Les malfaiteurs voulaient dissimuler leurs crimes », précise Heng He.

L’information sur l’indemnisation a été pour la première fois diffusée le 31 juillet par Minghui.org, le site du Falun Gong qui recueille et publie les informations sur la persécution en Chine.

Après la mort de Xu Chensheng, son fils Yang Xujun a saisi les tribunaux et la police. Comme le poste de police du district de Beihu a refusé de reconnaître le délit, Yang a fait appel devant le tribunal du district. Le 19 décembre 2016, ce tribunal a décidé d’indemniser la famille.

« Depuis le début de la persécution du Falun Gong, le régime communiste a détourné le système juridique chinois. De nombreux pratiquants de Falun Gong ont été tués ou sont devenus handicapés à cause de la persécution. Mais ils n’avaient nulle part où adresser leurs revendications », explique Heng He.

Après que l’ancien chef du Parti communiste chinois Jiang Zemin a lancé en 1999 la persécution du Falun Gong, il a autorisé les responsables chinois à « déclarer comme suicides les cas de pratiquants battus à mort ».

Jiang récompensait financièrement et par des promotions les fonctionnaires qui persécutaient activement le Falun Gong. « Peu importe les crimes qu’ils avaient commis, ils n’assumaient pas la responsabilité », commente Heng.

Mais récemment, la campagne anti-corruption de l’actuel dirigeant chinois Xi Jinping a soumis à une purge et même à des poursuites judiciaires un grand nombre de responsables impliqués dans la persécution des pratiquants de Falun Gong.

Non seulement les fonctionnaires locaux, mais aussi des nombreux hauts responsables du régime ont été ciblés par une purge, y compris Zhou Yongkang, l’ancien patron de la sécurité, et Li Dongsheng, l’ancien chef du bureau 610, un appareil extrajudiciaire de type Gestapo établi spécialement pour mener la répression contre le Falun Gong.

« Même si ça a été fait au nom de la lutte contre la corruption, cela montre que les fonctionnaires qui avaient persécuté le Falun Gong ne bénéficient plus d’immunité », souligne Heng, avant d’ajouter : « Cela sert sans aucun doute d’avertissement aux fonctionnaires qui continuent à persécuter le Falun Gong. »

Heng He pense que l’indemnisation d’État accordée dans le cas de Xu Chensheng est un signe que la persécution dirigée par le Bureau 610 et perpétrée par la police, le Parquet et le système judiciaire est devenue plus difficile à poursuivre en Chine.

« Les anciens mécanismes et politiques de persécution commencent à ne plus fonctionner », a-t-il confié. « Les juges et même les responsables locaux du Parti communiste impliqués dans ce cas ne veulent pas non plus être tenus pour responsables de la persécution. »

Selon les cas documentés par Minghui, au moins 4 120 pratiquants de Falun Gong ont été persécutés en Chine jusqu’à la mort. Toutefois, en raison du strict contrôle de l’information par le régime chinois, ce chiffre ne devrait représenter qu’une fraction du nombre réel de décès.

Teresa Chu, avocate des droits de l’homme taïwanaise, attend que davantage de victimes de persécution et de membres de leurs familles exigent une indemnisation à tous les nivaux du gouvernement chinois.

« Concernant le niveau de compensation, il faut tout d’abord noter que Jiang Zemin a utilisé la machine nationale pour lancer la persécution. Les victimes devraient poursuivre en justice Jiang Zemin et exiger une indemnisation d’État », a déclaré Mme Chu.

« Ensuite, les malfaiteurs qui ont recouru à la violence devraient être tenus pour responsables du point de vue civil et pénal. Enfin, comme dans le cas en question, les victimes devraient exiger une indemnisation d’État pour les actes illégaux perpétrés par la police. »

Tout au début, la famille de Xu Chensheng a réclamé une autopsie indépendante après avoir constaté des contradictions dans le rapport officiel. Mais la police et les fonctionnaires du Parquet et du tribunal ont empêché la famille d’engager un médecin indépendant pour effectuer une autopsie et ont également menacé de virer le frère de la victime de son poste dans une organisation gouvernementale.

Par la suite, afin de rendre publiques les circonstances de la mort de Xu Chensheng, les membres de sa famille, aidés par d’autres pratiquants de Falun Gong, ont lancé une campagne d’information en collant des affiches dans toute la ville.

Des habitants lisent une affiche demandant d’effectuer une autopsie indépendante pour Xu Chensheng et de traduire en justice les auteurs du crime. (Minghui.org)

Les résidents locaux qui ont lu les affiches ont critiqué publiquement les fonctionnaires impliqués dans cette affaire. Selon le rapport de Minghui, les policiers ont été dépêchés pour « maintenir la sécurité » dans la région, mais ils ont dû se retirer à cause des questionnements incessants de la part des habitants.

Teresa Chu pense que le soutien de la communauté locale et la persistance de la famille de la victime, ont finalement abouti à la décision du tribunal d’accorder une indemnisation. Ce cas sert de jurisprudence pour des futures poursuites judiciaires.

« Ce n’est pas seulement par rapport à la persécution du Falun Gong que les gens devraient aider les pratiquants qui demandent justice », a souligné Mme Chu. « Partout en Chine, les personnes qui ont été persécutées par le régime ne devraient pas se désespérer et abandonner leur cause. Avec l’entraide mutuelle, ils devraient continuer à se battre pour leurs droits, qu’il s’agisse d’une compensation administrative, d’une indemnité civile légale ou de la poursuite en justice des auteurs des crimes. »

« Si ce phénomène peut se propager dans toute la Chine, la machine dictatoriale ne pourra plus fonctionner », a-t-elle martelé.

Tina Lin de NTD Television a contribué à cet article.

Version anglaise : For the First Time, China Officially Compensates Persecuted Victim’s Family

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