En 2019, l’Université de Montréal a signé des protocoles d’entente avec un institut technologique chinois lié à l’armée chinoise

Par Kathy Han
27 mai 2023 19:56 Mis à jour: 27 mai 2023 19:56

Selon l’Université de Montréal (UdeM), les deux protocoles d’entente signés en 2019 avec un établissement d’enseignement basé en Chine et lié à l’armée chinoise n’ont jamais été mis en œuvre.

L’institution basée en Chine, l’Institut de technologie de Beijing (ITB), a été ajouté à la liste des entités du département du Commerce des États-Unis, « pour [avoir] acquis et tenté d’acquérir des articles d’origine américaine à l’appui de programmes pour l’Armée populaire de libération », une activité « contraire à la sécurité nationale et aux intérêts de la politique étrangère ».

Contactée par Epoch Times, la porte-parole et conseillère principale aux relations avec les médias de l’UdeM, Geneviève O’Meara, a déclaré : « ces protocoles d’accord indiquent qu’ils souhaitent explorer ce qui pourrait être fait conjointement entre les deux institutions, l’un concernant la gouvernance des données, l’autre les échanges étudiants. »

« Les deux protocoles ont expiré depuis et il n’y a pas eu de suivi », a déclaré Mme O’Meara, notant que « le laboratoire n’a jamais vu le jour et qu’aucun travail n’a été entamé ».

Mme O’Meara explique également que « le terme ‘laboratoire’ ne réfère pas à une infrastructure mais à des ateliers bilatéraux, par exemple. La pandémie a fait en sorte que les échanges étudiants n’ont pas pu avoir lieu. L’UdeM n’a pas l’intention de réactiver ces protocoles ».

La page LinkedIn de Wu Huishu indique qu’il était candidat à la maîtrise en droit à l’UdeM en 2015-16 et au doctorat en 2017-20. Il aurait pris la parole lors d’un colloque universitaire à Guangzhou, en Chine, en 2021, où il est décrit comme un chercheur du laboratoire conjoint.

Selon Mme O’Meara, « pour autant que nous le sachions, il n’y a pas eu de suivi après 2019. Wu Huishu était bien l’un de nos étudiants ». Elle ajoute : « nous procédons à des vérifications. Les dossiers de nos étudiants sont confidentiels, je ne peux donc pas vous en dire plus pour le moment. »

Laboratoire commun sur la gouvernance des données

Une « cérémonie de dévoilement du laboratoire conjoint sur la gouvernance des données de l’Institut de technologie de Beijing et de l’Université de Montréal et le Symposium international sur la gouvernance des données » ont eu lieu à l’ITB le 1er novembre 2019, selon un article de Gai Keke, membre du personnel de l’ITB, publié sur le site Web de l’institut le 13 novembre de la même année.

Le vice-président de l’ITB, Li Hezhang, et M. Guy Lefebvre, alors vice-recteur de l’UdeM, ont signé l’entente, selon l’article.

L’événement, avec photos, a également été rapporté sur le compte Twitter de Catherine Villemer, alors adjointe de M. Lefebvre, et actuellement adjointe à la vice-rectrice aux partenariats communautaires et internationaux. De 2014 à 2020, M. Lefebvre a été vice-recteur aux affaires internationales et à la Francophonie et est maintenant professeur émérite à la Faculté de droit de l’UdeM.

En présence des invités, Ding Gangyi, secrétaire du Comité du Parti communiste chinois (PCC) à l’École d’informatique et de technologie de l’ITB et M. Lefebvre ont inauguré le laboratoire commun, et des certificats ont été remis aux membres du comité technique du laboratoire, selon l’article de l’ITB.

Outre M. Lefebvre, Mme Villemer et M. Jiao Jie, professeur associé de droit à l’UdeM et responsable du programme Chine de l’UdeM, ont assisté à l’événement. Wu Huishu, chercheur doctorant à la faculté de droit de l’UdeM à l’époque, a prononcé un discours sur la gouvernance des données.

Était également présent, Yang Chunhui, fonctionnaire du ministère chinois de l’Industrie et des Technologies de l’information (MIIT), chargé superviser la cybersécurité pour le régime chinois.

Selon l’article de l’ITB, le lancement du laboratoire commun visait à reconnaître les « données en tant que ressource stratégique nationale de base », dans le contexte de « développement rapide de technologies et d’applications telles que les mégadonnées, l’informatique en nuage, l’Internet des objets, l’intelligence artificielle et la chaîne de blocs » des dernières années.

L’article de l’ITB indique que l’événement symbolise l’entrée du laboratoire commun dans la « phase opérationnelle en substance », menant à une « coopération approfondie visant à construire une plateforme de gouvernance des données de classe mondiale et une plateforme d’échange internationale, par le biais de séminaires, de visites d’échange entre membres clés, l’éducation collaborative et les applications conjointes, et entreprendre des projets de coopération internationale ».

Selon un article de l’ITB du 17 juin 2019, M. Lefebvre a visité l’ITB en juin 2019 et discuté d’une éventuelle coopération entre les deux institutions avec la vice-présidente exécutive de l’ITB, Mei Hong.

Zhu Liehuang, professeur à l’ITB, s’identifie comme « directeur du laboratoire commun de gouvernance des données ITB-UdeM » sur sa page de profil ScholarMate.com, une plateforme de réseau social pour les chercheurs basée à Hong Kong.

Selon Researchgate.net, Zhu Liehuang et Wu Huishu ont cosigné plusieurs articles de recherche, dont certains ont été publiés en avril 2020 ou après.

Une institution à « très haut risque »

Fondé par le Parti communiste chinois en 1940 à Yan’an, ville-bastion de guerre des communistes chinois du milieu des années 1930 à 1949, l’ITB joue un rôle de premier plan dans le soutien de l’armée chinoise et le secteur de la défense.

L’ITB est l’un des « Sept fils de la Défense nationale », un groupe de sept universités nationales chinoises de recherche publique affiliées au MIIT et financées par ce dernier, selon l’Australian Strategic Policy Institute (ASPI).

Selon le « China Defence Universities Tracker« , une base de données développée par l’ASPI qui identifie le niveau de risque associé aux institutions (soit très élevé, élevé, moyen ou faible), l’ITB présente un « risque très élevé en raison de ses qualifications en matière de sécurité très secrète, du nombre élevé de laboratoires de défense et de champs de recherche en matière de défense, et de son implication profonde dans la recherche en matière d’armement ». La base de données indique que l’ITB possède 10 grands laboratoires de défense et 34 champs de recherche liés à la défense.

En mai 2020, l’ancien président américain Donald Trump a publié un décret, entré en vigueur le 1er juin de la même année, visant à restreindre l’entrée aux États-Unis des étudiants diplômés et des chercheurs chinois ayant des liens avec la stratégie d’acquisition de technologies étrangères visant à renforcer les capacités militaires de la République populaire de Chine. Les diplômés de l’ITB feraient partie des personnes visées par ce décret.

En décembre 2020, l’ITB a été ajouté à la liste des entités américaines. Cette liste est régulièrement mise à jour par le Bureau de l’industrie et de la sécurité du ministère du Commerce des États-Unis afin d’identifier les entités étrangères et les individus impliqués dans des activités contraires à la sécurité nationale ou aux intérêts de la politique étrangère des États-Unis, ou les deux.

Epoch Times a contacté l’ITB et M. Lefebvre par courriel, mais n’a pas reçu de réponse à l’heure de la publication. M. Lefebvre a antérieurement affirmé avoir joué un rôle déterminant dans l’obtention d’un don important à l’UdeM de la part de deux hommes d’affaires liés au Parti communiste chinois, ayant également fait des dons à la Fondation Pierre Elliott Trudeau.

Zhu Liehuang et Gai Keke, de l’ITB, n’ont pas répondu aux demandes de commentaires d’Epoch Times.

Un certain nombre d’universités canadiennes, dont l’Université de Montréal, l’Université de Waterloo et l’Université McGill, ont déclaré qu’elles mettaient fin à leurs partenariats avec l’entreprise chinoise Huawei. Le géant des télécommunications, fondé par un ancien officier de l’armée chinoise, est considéré par les agences de renseignement comme ayant des liens étroits avec le régime chinois.

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