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Hong Kong : lourdes peines de prison pour 45 militants prodémocratie condamnés pour « subversion »

- La justice hongkongaise a condamné mardi 45 militants prodémocratie reconnus coupables de "subversion" à des peines de prison allant jusqu'à 10 ans -Le juriste Benny Tai a reçu une peine d'emprisonnement de 10 ans, la plus longue prononcée en vertu de la loi sur la Sécurité de 2020 -Pékin a estimé que les critiques des pays occidentaux contre ce procès "profanent et piétinent" l'état de droit

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L'activiste vétéran Chan Po-ying (C), épouse du militant pro-démocratie emprisonné Leung Kwok-hung, s'adresse aux médias devant le tribunal de première instance de West Kowloon, à Hong Kong, le 30 mai 2024. Un tribunal de Hong Kong a déclaré 14 personnes coupables de subversion le 30 mai, au début de l'audience du verdict dans la plus grande affaire de la ville contre le bloc pro-démocratique depuis que la Chine a imposé une loi de sécurité nationale pour écraser la dissidence.

Photo: PETER PARKS/AFP via Getty Images

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Durée de lecture: 9 Min.

La justice hongkongaise a condamné mardi 45 militants prodémocratie reconnus coupables de « subversion » à des peines de prison allant jusqu’à 10 ans, à l’issue du plus grand procès organisé à Hong Kong pour atteinte à la sécurité nationale.
Les États-Unis, l’Australie et des ONG de défense des droits humains ont immédiatement réagi en condamnant ces peines comme preuve de l’érosion des libertés politiques à Hong Kong depuis la ferme reprise en main par Pékin.
Le juriste Benny Tai a écopé d’une peine d’emprisonnement de 10 ans, la plus longue prononcée à ce jour en vertu de la loi de 2020, promulguée un an après les manifestations massives et parfois violentes en faveur de la démocratie dans cette région administrative spéciale (RAS) de la Chine.
Tous les militants ont été reconnus coupables d’avoir organisé une primaire officieuse destinée à sélectionner des candidats de l’opposition en vue des législatives, pour espérer décrocher une majorité au sein de l’assemblée locale et opposer leur veto aux budgets, et de contraindre potentiellement la dirigeante pro-Pékin de Hong Kong alors en place, Carrie Lam, à la démission.
En dépit des avertissements des autorités, 610.000 personnes avaient voté à la primaire en juillet 2020, soit près d’un septième des habitants de Hong Kong en âge de voter.
Quarante-sept personnes initialement arrêtées puis inculpées en 2021
Les autorités ont finalement renoncé à l’élection de l’assemblée locale et Pékin a instauré un nouveau système politique qui permet un contrôle strict des élus de Hong Kong.
Quarante-sept personnes avaient été initialement arrêtées puis inculpées en 2021 dans ce dossier. Parmi ces dernières, 31 avaient plaidé coupable, 16 ont été jugées dans un procès long de 118 jours l’année dernière, à l’issue duquel 14 ont été condamnées, encourant des peines pouvant aller jusqu’à la perpétuité, et deux acquittées en mai.
Les juges ont estimé que le groupe avait risqué de provoquer une « crise constitutionnelle ». 45 personnes ont été reconnues coupables de « conspiration visant à subvertir le pouvoir de l’État » et condamnées mardi à des peines allant de quatre ans et deux mois à dix ans de prison.
« Je veux être témoin de la façon dont Hong Kong devient la Chine continentale »
Mardi à l’aube, plus de 200 personnes ont fait la queue devant le tribunal, sous une bruine glaciale, dans l’espoir d’obtenir une place au tribunal pour le prononcé des peines visant certaines des figures les importantes de l’opposition hongkongaise.
« Je veux être témoin de la façon dont Hong Kong devient la Chine continentale », a indiqué Eric, un informaticien chinois venu du continent, à l’AFP.
Les 45 personnalités de l’opposition étaient entassées dans le box des accusés au tribunal, d’où elles saluaient parfois le public. Nombre d’entre elles ont déjà passé plus de 1.300 jours en prison.
Les « têtes pensantes » de l’organisation du scrutin  les plus lourdement condamnées
Les hommes politiques Au Nok-hin, Andrew Chiu, Ben Chung et le militant australo-hongkongais Gordon Ng, désignés comme « têtes pensantes » de l’organisation du scrutin, ont été condamnés à des peines allant jusqu’à 7 ans et 3 mois d’emprisonnement.
L’Australie s’est déclarée « gravement préoccupée » par ces peines, et notamment celle de Gordon Ng, qui a les nationalités hongkongaise et australienne.
La deuxième peine la plus longue a été infligée au jeune militant Owen Chow, avec sept ans et neuf mois, le tribunal considérant qu’il avait « joué un rôle plus actif dans le système que les autres accusés ».

Le militant pro-démocratie Owen Chow, l’une des 47 personnalités de l’opposition accusées de conspiration en vue de commettre un acte de subversion en vertu de la loi sur la sécurité nationale pour avoir participé à des primaires pro-démocratie non autorisées en juillet 2020, s’adresse aux médias à l’extérieur du quartier général de la police après avoir récupéré ses documents d’inculpation à Hong Kong, le 8 septembre 2021. (Photo PETER PARKS/AFP via Getty Images)

Dans un message publié sur Facebook avant le prononcé de sa peine, il s’était dit « absolument pas optimiste ». « Mais j’ai de l’espoir, car même si je suis loin du jour de la libération, nous avons maintenant vu le point final », a-t-il écrit.
Leung Kwok-hung, 68 ans, cofondateur du dernier parti d’opposition de la ville, la Ligue des sociaux-démocrates (LSD), a écopé d’une peine de six ans et neuf mois.
Chan Po-ying, son épouse et leader du parti, interrogée par l’AFP, a qualifié la peine de « conforme à (ses) attentes ».

Cette photo prise le 4 avril 2024 montre la militante hongkongaise Chan Po-ying en train de parler lors d’une interview avec l’AFP à l’extérieur du centre de détention où son mari et militant pro-démocratique Leung Kwok-hung est détenu. (Photo PETER PARKS/AFP via Getty Images)

« Pour ceux qui ont refusé d’être soumis, la peine est évidemment plus lourde »
Leticia Wong, ancienne conseillère municipale d’un parti pro-démocratie aujourd’hui dissous, qui a assisté à l’audience, a estimé que les conditions du procès « encourageaient les gens à plaider coupables et à témoigner contre leurs pairs ». « Pour ceux qui ont refusé d’être soumis, la peine est évidemment plus lourde », a-t-elle déclaré.
Les autorités de Chine et Hong Kong ont mis en garde contre toute « ingérence » d’autres pays.
Condamnation ferme aux États-Unis
Les États-Unis ont « condamné fermement » ces peines de prison prononcées contre des militants qui avaient mené « une activité politique normale protégée par la loi fondamentale de Hong Kong », selon un porte-parole du consulat.

WASHINGTON, DC – 03 JUIN : La directrice exécutive du Hong Kong Democracy Council, Anna Kwok, tient une bougie alors qu’elle participe à une veillée aux chandelles pour marquer l’anniversaire du massacre de la place Tiananmen, le 3 juin 2024 à Washington, DC. Demain marquera le 35e anniversaire du massacre de la place Tiananmen qui a eu lieu le 4 juin 1989 à Pékin, en Chine. (Photo Alex Wong/Getty Images)

« Les peines sévères prononcées aujourd’hui reflètent la rapidité avec laquelle les libertés civiles et l’indépendance judiciaire de Hong Kong se sont effondrées au cours des quatre dernières années », a déclaré Maya Wang, directrice associée pour la Chine de Human Rights Watch, dans un communiqué. Anna Kwok, directrice exécutive du Hong Kong Democracy Council, à Washington, a condamné « une attaque contre l’essence même de Hong Kong, qui aspire à la liberté, à la démocratie et au droit à l’expression politique ».

Cette photo prise le 27 novembre 2023 montre Sébastien Lai, fils du magnat des médias pro-démocratiques de Hong Kong Jimmy Lai, s’exprimant lors d’une interview dans un parc de Taipei. Le procès de Jimmy Lai, un magnat de la presse pro-démocratique emprisonné pour atteinte à la sécurité nationale, servira de « test décisif » sur la manière dont la Chine considère les libertés dans la région semi-autonome de Hong Kong, a déclaré son fils dans une interview à l’AFP. (Photo I-HWA CHENG/AFP via Getty Images)

Mercredi, le magnat des médias et militant prodémocratie Jimmy Lai, 76 ans, témoignera par ailleurs dans le cadre son procès pour atteinte à la sécurité nationale, rompant le silence après cinq autres procès et près de quatre années en prison.