La CNIL craint que les fichiers de dépistage Covid soient utilisés par les policiers

Par Emmanuelle Bourdy
27 juillet 2021 11:35 Mis à jour: 27 juillet 2021 11:36

La présidente de la CNIL (Commission nationale de l’informatique et des libertés) Marie-Laure Denis, a tiré la sonnette d’alarme auprès des sénateurs de la commission des lois, le 21 juillet dernier. Elle estime que le projet de loi relatif à l’extension du passe sanitaire porte gravement atteinte aux libertés et dénonce notamment le fait que les fichiers de dépistage du Covid-19 puissent être utilisés par les personnels de police et de gendarmerie.

Un récent texte du gouvernement modifie les personnes ayant accès aux fichiers sanitaires SI-DEP (Système d’informations de DEPistage), en y ajoutant les agents de police judiciaire et les agents de contrôle. Cela permet ainsi de faire respecter à la lettre les dix jours d’isolement pour les cas positifs au Covid en les contrôlant, ainsi que le rapporte Public Sénat.

Depuis mai 2020, une loi permet uniquement aux professionnels tels que les médecins, pharmaciens, biologistes des laboratoires de dépistage Covid-19, mais également aux professionnels habilités par la CNAM (Caisse nationale d’assurance maladie), la SPF (Santé publique France) et aux ARS (Agences régionales de santé), d’avoir accès aux dossiers des patients qui se sont fait dépister au Covid-19. Après s’être fait tester, la personne reçoit un SMS lui indiquant si elle était positive ou non, ses données étant jusque-là stockées par le laboratoire, sur une plateforme sécurisée.

Cela « change complètement la finalité d’un fichier »

« C’est la philosophie même du traitement de données qui s’en trouve modifiée », a déclaré Marie-Laure Denis, la présidente de la CNIL. Jean-Yves Leconte, sénateur PS, craint que ne s’installe un « phénomène de contournement ». Les patients ne vont plus aller « se faire tester gratuitement et librement de peur d’être placés sous surveillance », craint-il. De plus, les patients risquent alors d’attendre « le dernier moment avant d’être pris en charge », souligne-t-il encore à Public Sénat. « On ne va pas mettre la moitié des policiers de France à la surveillance des cas positifs au Covid », s’exclame-t-il. Selon lui, « il faut plutôt essayer de nourrir une éthique de responsabilité ».

Le sénateur de Haute-Savoie et membre du groupe Union centriste Loïc Hervé, considère quant à lui que cette nouvelle donne « change complètement la finalité d’un fichier ». « On l’a créé pour qu’il soit médical, et il devient finalement un fichier policier, ça fait réfléchir », réagit-il. Il a d’ailleurs récemment déposé un amendement dans lequel il demande la suppression de l’extension du passe sanitaire aux lieux de la vie quotidienne, jugeant cette mesure discriminatoire et liberticide.

Uniquement dans des cas tout à fait exceptionnels…

Selon Philippe Bas, le rapporteur (LR) du texte, « la divulgation de données de santé à des personnels de police et de gendarmerie ne peut être envisagée que dans des cas tout à fait exceptionnels et avec de grandes précautions dans ce cas ». Il a toutefois précisé qu’il œuvrerait pour « préserver les chances de réussite du dispositif sanitaire » proposé par le gouvernement.

« Dans l’hypothèse où la nécessité d’un tel traitement serait démontrée, la CNIL s’interroge sur la nécessité de créer un fichier distinct ou de réfléchir à des modalités permettant de cloisonner hermétiquement ces traitements de nature très différente, afin que les services préfectoraux n’aient pas accès à l’ensemble des données que peut consulter le médecin ou l’enquêteur sanitaire », a préconisé la présidente de la CNIL, invitant les sénateurs à « inscrire toutes les précautions nécessaires dans la loi », ainsi que le rapporte encore Public Sénat.

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