Le tableau «pédopornographique» au Palais de Tokyo aspergé de peinture, Emmanuel Macron condamne une atteinte «à nos valeurs»

Par Etienne Fauchaire
9 mai 2023 17:26 Mis à jour: 9 mai 2023 17:26

En cette journée de commémoration de l’armistice du 8 mai 1945, le président de la République a décidé de s’arrêter sur la dégradation du tableau polémique de l’artiste suisse Miriam Cahn, actuellement affiché au Palais de Tokyo et accusé de promouvoir la pédopornographie, afin de dénoncer un acte qui constitue « une atteinte à nos valeurs ». De son côté, l’association de protection des droits des enfants Juristes pour l’enfance a annoncé dans un communiqué son intention de poursuivre son combat en faveur d’un retrait de la toile auprès de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE).

Le tableau « Fuck abstraction » exposé au Palais de Tokyo depuis le 17 février a été dégradé dimanche après-midi. Accusée de représenter une scène pédopornographique, la toile polémique représentant un homme qui impose une fellation à une jeune victime a été recouverte de peinture vers 15h30. Un homme âgé de 80 ans, arrêté par les surveillants du musée, avait dissimulé de la peinture mauve dans une bouteille de médicaments et en a aspergé l’œuvre, « malgré l’ensemble des précautions qui sont prises par le centre d’art depuis le début de cette exposition et encore plus depuis que cette polémique a éclaté », a fait savoir Mathieu Boncour, directeur de la communication du centre d’art parisien.

Inconnu de la justice selon le Parquet de Paris, l’homme suspecté des faits a ensuite été placé en garde à vue pour « dégradation de bien culturel exposé ». Il encourt sept ans de prison et 100.000 euros d’amende. Selon une source proche du dossier, l’octogénaire était « mécontent de la mise en scène sexuelle d’un enfant et d’un adulte représentée selon lui ».

Emmanuel Macron condamne

Établissant un parallèle entre la victoire des forces alliées sur l’Allemagne nazie, le président de la République a condamné ce lundi « l’acte de vandalisme » commis contre la toile de l’artiste suisse Miriam Cahn : « En ce 8 mai, où nous célébrons la victoire de la liberté, je condamne l’acte de vandalisme commis hier au Palais de Tokyo. S’en prendre à une œuvre, c’est attenter à nos valeurs. En France, l’art est toujours libre et le respect de la création culturelle, garanti », a lancé le chef d’État sur Twitter, qui devait rendre hommage à Jean Moulin et à la Résistance, à Lyon, après la traditionnelle cérémonie de la Victoire contre l’armée allemande à l’Arc de Triomphe.

Dimanche, la ministre de la Culture, Rima Abdul Malak, a fustigé sur place « l’instrumentalisation » de cette affaire par le Rassemblement national « pour susciter la polémique et attaquer la liberté de création des artistes » et sans laquelle, selon elle, « nous n’en serions certainement pas arrivés là ». En mars dernier, la députée RN Caroline Parmentier s’était rendue devant le tableau et, dans une vidéo partagée sur les réseaux sociaux, avait dénoncé « une scène de pédocriminalité ». Dans un entretien accordé à The Epoch Times, la femme politique soutenait que la silhouette forcée à une fellation est « très clairement un enfant » et qu’une scène pédopornographique s’exposait à une qualification pénale.

Suite à ces dégradations, le Palais de Tokyo a pour sa part annoncé qu’il déposerait plainte et continuerait « à présenter le tableau et l’exposition », qui a attiré 80.000 visiteurs, « avec les traces de la dégradation jusqu’à la fin prévue de la saison, le 14 mai ».

« La liberté artistique n’est pas sans limites »

Dans un communiqué de presse, sans s’attarder sur l’acte survenu hier, l’association de protection des droits de l’enfant Juristes pour l’enfance a quant à elle appelé à « plus d’ambition en matière de protection de l’enfance contre la pédocriminalité », rappelant que « si la liberté de la création artistique est importante, elle n’est pas sans limite : la diffusion de contenus pédopornographiques met les enfants en danger ».

L’organisme a indiqué également avoir déposé une plainte pénale et prévoir de se rendre devant la Cour de justice de l’Union européenne en faisant valoir la constatation d’une violation de la directive 2011/92/UE du 13 décembre 2011 relative à la lutte contre les abus sexuels et l’exploitation sexuelle des enfants, ainsi que la pédopornographie, qui la définit comme « tout matériel représentant de manière visuelle une personne qui paraît être un enfant se livrant à un comportement sexuellement explicite, réel ou simulé ».

Le tribunal administratif de Paris en mars, puis le Conseil d’Etat à la mi-avril, avaient débouté plusieurs associations de protection de l’enfance, dont celles-ci, dans leur demande de retrait du tableau ou, a minima, d’interdiction d’accès à la salle pour les mineurs. Devant les deux instances juridiques, le débat s’était alors articulé principalement autour de la confrontation de la liberté artistique à celle de la protection de l’intérêt supérieur de l’enfant.

Sur Twitter, le journaliste Karl Zéro, qui avait fustigé auprès de The Epoch Times une décision du Conseil d’Etat « à l’image de l’inanité de nos politiques contre la pédocriminalité », n’a pas hésité à faire preuve d’ironie à propos de la dégradation du tableau : « En ce 8 mai, où nous célébrons la victoire de la liberté, j’avoue avoir un petit faible pour la nouvelle version de « Fuck Abstraction » qui incarne parfaitement la liberté de dire non à la pédocriminalité. »

Dans une lettre en date du 2 mai, 16 associations de défense des victimes de pédocriminalité ont par ailleurs enjoint le Palais de Tokyo à revenir sur sa décision et à décrocher le tableau « Fuck Abstraction », une « mesure symbolique afin de préserver l’enfance, pour l’avenir, de toute complicité même involontaire avec la pédocriminalité ». Rappelant la directive européenne susmentionnée, elles demandent : « Votre prochaine exposition comportera-t-elle des photos de viols d’enfant, au motif qu’elles s’inscrivent dans une démarche artistique pour dénoncer les horreurs de la guerre ? Cette simple question révèle bien qu’il est nécessaire et légitime de poser des limites à l’exposition publique de la création, même artistique. »

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