Saignant ou bien cuit? L’autre contentieux entre Kim et Trump

8 mars 2019 05:15 Mis à jour: 8 mars 2019 09:48

Kim Jong Un préfère son steak saignant. Donald Trump apprécie la viande bien cuite. Mais au bout du compte, ce sont les divergences sur le dossier nucléaire qui ont fait dérailler le sommet de Hanoï, pas le fossé culinaire.

Le deuxième rendez-vous du dirigeant nord-coréen et du président américain fut l’occasion d’un dîner intime et d’un déjeuner manqué cette semaine dans un luxueux hôtel de la capitale vietnamienne. Si Donald Trump ne cache pas son appétit pour les mets simples, voire le fast food, les goûts du dirigeant du pays reclus sont plus mystérieux.

Mais Paul Smart, chef de cuisine au Sofitel Legend Metropole, a travaillé étroitement avec deux cuisiniers personnels de Kim Jong Un et lève un peu le voile sur cet aspect plus privé de l’homme fort de Pyongyang.

Kim Jong Un a mangé un steak « saignant, très saignant », préparé à la nord-coréenne « en croûte de poivre ». Donald Trump a eu droit à une viande « bien cuite » cuisinée à la française « avec de l’ail, du thym et du romarin, nappée de beurre ». La préférence du dirigeant nord-coréen pour la viande plutôt bleue montre qu’il aime la qualité, poursuit le chef australien dans un entretien avec l’AFP. « Il aime vraiment dîner et expérimenter la cuisine pour ce qu’elle est ».

Selon ses cuisiniers, tous deux appelés Kim, il goûte le haut de gamme, ajoute Paul Smart. « Il aime le caviar, le homard, les produits très luxueux, le foie gras. Il aime vraiment se faire plaisir avec la cuisine ». Chaque équipe préparait ses propres plats, les Nord-Coréens ayant acheminé leurs propres ingrédients, y compris les steaks, à bord du train blindé qui a conduit au Vietnam l’homme fort de Pyongyang.

Le steak était « très rouge, très marbré », relève l’Australien, qui suggère que les bœufs nord-coréens, à l’instar du wagyu japonais, sont peut-être libres de pâturer au vert en Corée du Nord. Hormis les charrettes tirées par les bœufs, il est cependant rare de voir du bétail dans les campagnes nord-coréennes. Le Nord est un pays pauvre où plus de 40% des habitants sont touchés par l’insécurité alimentaire, selon les Nations unies.

Donald Trump avait séjourné au Metropole lors d’une visite officielle en 2017, passant la nuit dans une suite à 4.800 dollars. Paul Smart avait alors prévu six pots de glace à la vanille mais il ne les avait pas touchés. Mercredi, le locataire de la Maison Blanche, qui mangeait probablement de la viande nord-coréenne pour la première fois, n’a rien laissé de son fondant au chocolat.

Un Américain ordinaire qui consommerait du steak fourni par un dirigeant nord-coréen serait potentiellement coupable d’une entorse aux sanctions américaines contre Pyongyang. En juin 2016, le Trésor américain avait placé Kim Jong Un et dix autres responsables du régime sur sa liste noire pour leur rôle dans les violations des droits humains au Nord.

Aux termes du paragraphe six de l’ordre exécutif 13722, les ressortissants américains ne peuvent recevoir des « biens » des mains des personnes ciblées par les sanctions. Mais M. Trump était en voyage officiel et la règle ne s’appliquait pas à lui car les transactions relevant « du gouvernement fédéral » sont exemptées.

En amont du sommet, des chiens renifleurs avaient été dépêchés en cuisine. Des « goûteurs » des deux camps ont échantillonné tous les plats. Les ingrédients nord-coréens étaient « empaquetés de manière très hygiénique », déclare M. Smart. « Ils ont même apporté de l’alcool pour nettoyer leurs couteaux et leurs planches à découper ».

Les deux Nord-Coréens « très talentueux » ont toutefois fait une découverte culinaire avec le cocktail de crevettes réclamé par Donald Trump, un classique américain des années 1980. « Ils étaient très intrigués par le goût » de la « sauce des mille îles » à base de mayonnaise, de ketchup et de tabasco. « Je leur ai donné la recette et ils l’ont emportée avec eux ».

En retour, ils ont expliqué comment confectionner le kimchi, chou fermenté traditionnel coréen. Le déjeuner du lendemain n’a pas eu lieu pour cause de désaccord sur la dénucléarisation de la Corée du Nord et les sanctions qui lui sont infligées. Les Nord-Coréens avaient prévu une gelée de foie gras à la pomme dont ils avaient fourni les ingrédients. Ils avaient façonné des oiseaux au long bec avec de la gelée d’algues pour la présentation.

« C’était quasiment un chef d’oeuvre », raconte M. Smart. Mais les deux dirigeants ne se sont pas assis à la table, écourtant leur sommet sans signer de déclaration conjointe, au grand regret des équipes en cuisine. Le déjeuner fut servi au personnel. « C’était délicieux », raconte Anthony Slewka, directeur commercial de l’établissement qui prévoit de proposer désormais le même menu à ses clients.

 

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