Pourquoi le régime chinois a-t-il du mal à recruter davantage de soldats ?

Par Yue Shan
15 avril 2021 20:55 Mis à jour: 15 avril 2021 20:59

L’expansion militaire du régime chinois dans la région indo-pacifique devient un sujet brûlant, et le dirigeant chinois Xi Jinping a demandé aux troupes de se préparer à la guerre. Cependant, on observe un nombre croissant de réfractaires et de déserteurs en Chine. Quelles sont les raisons de ce phénomène ? Que reflète-t-il ?

J’ai travaillé à des niveaux proches des citoyens au sein des organisations gouvernementales et j’ai participé au processus de conscription. Je voudrais vous faire part de ce que je sais sur les insoumis et les déserteurs en Chine.

Tout d’abord, beaucoup de jeunes hommes refusent de servir dans l’armée parce qu’ils pensent que c’est trop difficile. En raison de la politique de l’enfant unique, de nombreux jeunes sont gâtés et ne veulent pas supporter les difficultés – ce phénomène est connu sous le nom de « syndrome du petit empereur« . Certains d’entre eux trouvent l’entraînement des recrues très difficile, et lorsqu’ils pensent aux jours difficiles qui les attendent, ils s’échappent des camps militaires quelles qu’en soient les conséquences.

La deuxième raison est liée aux obligations familiales. Par exemple, certains jeunes hommes ne veulent pas s’engager dans l’armée parce qu’ils se sont préparés à reprendre l’entreprise familiale. Ce type de famille est souvent assez riche et a des liens politiques.

La troisième raison est la résistance idéologique au PCC. Par exemple, de nombreuses personnes qui ont vécu la Révolution culturelle ne font pas confiance au PCC et pensent que l’armée ne fait que protéger les intérêts du régime. Certaines personnes peuvent ne pas passer la censure politique des autorités. Parmi les personnes susceptibles d’être inéligibles au service militaire, citons : les dissidents ou les critiques virulents du PCC ; les manifestants ; les pétitionnaires (ceux qui adressent leurs plaintes et leurs griefs aux autorités centrales de Pékin) ; les Falun Gong et d’autres membres des groupes religieux visés par le PCC.

La quatrième raison est la baisse de motivation. La situation s’est aggravée pour les insoumis chinois ces dernières années. Depuis que Xi Jinping a pris la tête de l’armée, le PCC a imposé des sanctions strictes aux personnes qui refusent de servir dans l’armée.

Le 4 avril, les autorités du district de Shushan de la ville de Hefei, dans la province de l’Anhui, ont publié un avis concernant le traitement d’une recrue qui avait refusé de continuer à servir dans l’armée.

Selon le site Internet du gouvernement local, Liu Shuai, originaire de la province du Hebei, a été admis à l’université agricole d’Anhui en 2019 et s’est engagé dans l’armée en septembre 2020. Il a été affecté au service d’une unité militaire relevant de la région militaire du Xinjiang. Peu de temps après son enrôlement, Liu a demandé à quitter l’armée. Deux mois plus tard, son nom a été retiré de l’armée. Mais cela a laissé une trace permanente dans son livret d’enregistrement de ménage, citant « l’objection au service militaire ». Les médias d’État ont publié l’histoire de Liu et l’ont qualifié d’« exemple négatif ».

Liu a été condamné à huit sanctions, dont une amende de 46 866 yuans (environ 6 000 euros). Il lui est interdit de travailler pour une agence gouvernementale ou une entreprise d’État, de se réinscrire à l’université agricole d’Anhui dans les deux prochaines années, de quitter le pays dans les deux prochaines années et de créer sa propre entreprise dans les trois prochaines années.

Ces sanctions sont sévères, car elles privent le jeune homme de son avenir en Chine. Sa seule issue est de quitter le pays après deux ans, lorsque l’interdiction sera levée.

Peu après que la situation de Liu a été rendue publique, divers services gouvernementaux ont à nouveau rapporté l’histoire de manière aussi médiatisée, dans le but de dissuader davantage de personnes de refuser ou de résister au service militaire. Mais cela n’a pas fonctionné.

Les incidents fréquents de jeunes gens refusant de servir dans l’armée, après une grande publicité officielle, peuvent également affecter ceux qui sont encore en service et apporter un choc subtil au moral des militaires.

Selon le site Web du PCC consacré à la conscription nationale, « les citoyens chinois de sexe masculin ayant atteint l’âge de 18 ans au 31 décembre doivent s’enregistrer conformément à la loi » et « ceux qui se sont enregistrés peuvent s’engager directement en ligne pour le service actif ».

En réalité, les citoyens masculins qui atteignent l’âge de 18 ans ne peuvent pas décider seuls de s’inscrire ou de s’enrôler, car ils sont déjà inclus dans les comptes globaux du bureau de conscription local. Quiconque refuse de s’inscrire ou de s’engager est considéré comme un problème politique grave et est traité comme un déserteur.

Il n’est pas difficile d’imaginer que les autorités ont dû faire un gros travail dit idéologique au préalable, en persuadant ces jeunes de s’inscrire et en les menaçant de sanctions au cas où ils refuseraient de s’engager eux-mêmes.

Il y a aussi des injustices sociales qui touchent l’armée. Il y a quelques années, dans le Yunnan, un militaire en activité a été arrêté après avoir pris une vidéo de la propriété de sa famille qui avait été démolie de force par les autorités locales. Au fil des ans, des millions de Chinois ont perdu leur maison à la suite de démolitions et de déplacements forcés de villages et de villes lorsque les gouvernements locaux ont décidé de récupérer les terres pour en faire un usage plus rentable.

Ces dernières années, de nombreuses protestations ont éclaté en raison du manque de droits et de protection des vétérans de l’armée.

L’armée du PCC a été corrompue tout au long de son histoire, et Xi Jinping n’a pas été en mesure de résoudre ce problème depuis son arrivée au pouvoir. Avec tous ces facteurs compliqués, l’armée du PCC peut-elle vraiment « agir à tout moment » et rester « prête au combat à plein temps », comme l’a demandé Xi Jinping dans son ordre de mobilisation pour la formation des forces armées ?

Yue Shan est un rédacteur indépendant qui a travaillé dans ses jeunes années pour des organisations gouvernementales du PCC et des sociétés immobilières chinoises cotées en bourse. Il connaît bien les rouages du système du PCC et ses relations politiques et commerciales et se consacre à l’analyse de la politique chinoise et des tendances actuelles. Il contribue depuis longtemps à plusieurs médias chinois basés aux États-Unis et à Taïwan.

Les opinions exprimées dans cet article sont celles de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement celles d’Epoch Times.

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