Si Netflix entre en Chine, les censeurs pourront influencer ce que nous regardons

26 mai 2015 11:00 Mis à jour: 18 octobre 2015 13:49

 

Netflix cherche à percer le marché de la vidéo en ligne en Chine continentale, selon de nouvelles informations.

Si Netflix prend de l’expansion en Chine, la compagnie aura accès à ce qui est en train de devenir l’un des plus grands marchés de la vidéo en ligne.

On s’interroge toutefois sur l’éventuelle autocensure qui est déjà évidente chez les studios de film hollywoodien.

Netflix est déjà populaire en Chine, mais les utilisateurs se connectent par serveurs mandataires et autres technologies qui leur permettent de contourner la Grande Muraille pare-feu qui censure l’Internet chinois. La série House of Cards peut être visionnée légalement en Chine, mais par l’entremise de Sohu, une plateforme chinoise.

Le régime chinois impose une limite sévère au contenu étranger pouvant entrer dans le pays. Il contrôle non seulement les titres, mais aussi le nombre de films pouvant être diffusés : 34.

Citant des sources anonymes au courant des négociations impliquant Netflix, Bloomberg rapporte que le géant de la diffusion en ligne est en pourparlers avec Wasu Media Holdings Co., une des premières compagnies en Chine à obtenir une licence de diffusion télévisuelle sur Internet.

Wasu est appuyée par le fondateur d’Alibaba, Jack Ma, ses réseaux télévisuels et Internet sont gérés depuis la base d’Alibaba à Hangzhou.

Marché chinois et censure

L’accès au marché chinois pourrait représenter un nouvel eldorado pour Netflix et cette perspective a fait monter ses actions en flèche.

Il y a 175 millions d’abonnés à l’Internet haute vitesse en Chine, soit plus du double des États-Unis (88 millions) et le marché de la vidéo en ligne a augmenté de 75 % de 2013 à 2014, selon les données de la firme d’experts-conseils iResearch basée à Shanghai. La firme évalue la valeur du marché chinois à 5,9 milliards et pourrait valoir 14,7 milliards de dollars d’ici 2018.

C’est un marché auquel les producteurs de contenu sont avides d’accéder. Toutefois, pour Hollywood, cela se traduit par une tendance à l’autocensure – une tendance maintenant bien familière pour les observateurs du domaine.

«Les cinéastes américains insèrent maintenant des scènes dans leurs films pour courtiser la Chine afin de pouvoir diffuser leurs produits en Chine et du même coup ils évitent de la placer dans le rôle du méchant», a écrit The Economist l’année dernière.

James Frazier, du Washington Times, a rapporté qu’avec l’importance grandissante du marché chinois, son implication dans la production cinématographique augmente et son influence sur la production de films américains fait de même.

Le dernier film Red Dawn, un remake du film de 1984, impliquait à l’origine une invasion des États-Unis par la Chine, mais le studio a finalement exigé que la Chine soit retirée et remplacée par un ennemi nord-coréen.

Paramount Pictures a modifié le scénario du film de zombies World War Z pour effacer la mention que la Chine était à l’origine du virus afin d’avoir la possibilité de diffuser le film en Chine.

D’autres films se sont vu refuser l’accès à la Chine en dépeignant le régime de manière négative, comme le film de Batman The Dark Knight.

Les studios étrangers peuvent contourner le système de quotas en faisant une coproduction avec un partenaire chinois et beaucoup de studios importants se sont liés à des studios chinois justement pour cette raison.

Cette tendance semble bien établie, alors que le marché chinois commence à récolter les plus grandes recettes au box-office. Furious 7 a généré plus d’argent en Chine qu’aux États-Unis et Avengers : Age of Ultron a connu une première gigantesque un jour de semaine en recueillant 33,9 millions de dollars en Chine, soit l’une des plus grosses recettes de tous les temps pour une première en semaine.

Ramasser les millions est cependant plus difficile pour les compagnies Internet avec leur contenu imprévisible.

Netflix en Chine

Si Netflix accède à la Chine, elle deviendra la première grande compagnie Internet à réussir. YouTube, Facebook et Twitter demeurent bloqués; Google a quitté la Chine en 2010 en raison de la censure et du piratage.

Netflix possède un avantage étant donné que les saisons entières sortent d’un coup, ce qui permettrait aux censeurs chinois d’approuver une émission dans sa totalité.

Quant au contenu original de Netflix, le service de diffusion en continu empruntera probablement le chemin des studios en s’assurant d’enlever tout contenu qui pourrait offusquer le régime chinois à l’étape de la scénarisation. De ce fait, la censure chinoise aurait un effet dans les salons des Canadiens.

L’entrée de Netflix en Chine était le sujet de discussion depuis un certain temps, mais cela semblait improbable jusqu’à tout récemment.

Le directeur du contenu de Netflix, Ted Sarandos, avait déclaré en mars dernier lors d’une conférence de presse à Shanghai que la compagnie cherchait à entrer en Chine sans l’aide d’un partenaire chinois.

Il s’agissait d’un vœu pieux.

Le régime chinois impose habituellement aux grandes entreprises voulant entrer en Chine de former une coentreprise avec un partenaire chinois et de partager leur savoir-faire avec celui-ci. Les restrictions sont plus sévères avec les entreprises médiatiques et Internet.

Récemment, M. Sarandos a affirmé que ses propos à Shanghai avaient été mal interprétés. Selon le Los Angeles Times, M. Sarandos a déclaré à une conférence d’investisseurs à New York que la compagnie étudiait différents modèles, dont des partenariats, et qu’il avait été mal cité.

Il a aussi indiqué que le marché chinois n’était pas vital à leur stratégie d’affaires globale.

«Il y a peu de coûts marginaux à ne pas être en Chine. Ce n’est pas urgent, ce n’est pas une question brûlante, mais alors que nous tentons de nous implanter à l’international, nous voulons aussi être en Chine», a mentionné M. Sarandos, selon le LA Times.

Si M. Sarandos était plutôt tiède concernant l’importance de la Chine pour Netflix lors de son entrevue avec le quotidien californien, il l’était beaucoup moins quelques jours plus tard à Cannes. Ses commentaires résonnaient davantage avec les informations avancées par Bloomberg.

«La Chine est trop grande pour y mettre un astérisque», a déclaré M. Sarandos à Cannes, devant un public essentiellement composé de producteurs, d’acheteurs et de dirigeants du monde du cinéma.

Il a reconnu les défis auxquels Netflix fait face et les changements que son entreprise devra probablement effectuer.

«Nous n’avons pas de partenaires ailleurs dans le monde, alors il faudrait développer cette nouvelle habileté», a-t-il dit.

«Nous n’avons pas fait l’acquisition d’entreprises, nous avons travaillé avec un partenaire dans aucun autre pays, mais si c’est le prix pour faire des affaires en Chine, nous allons trouver un moyen», a-t-il ajouté.

Netflix avait la Chine bien en vue avec la production de son premier long métrage, la suite de Tigre et Dragon, qui s’appellera Crouching Tiger, Hidden Dragon: The Green Legend.

Netflix s’est associé à IMAX pour produire le film, et IMAX a connu beaucoup de succès en Chine. IMAX a indiqué qu’il y a bon espoir que le film soit diffusé en Chine.

Tandis que le modèle d’affaires que Netflix va adopter en Chine n’est pas encore déterminé, il est sûr que l’entreprise fera face aux mêmes restrictions qui s’appliquent à tous les producteurs de cinéma et de télé, c’est-à-dire une censure sévère.

Netflix redouble d’efforts avec son plan d’expansion international, souhaitant augmenter de 50 à 200 le nombre de pays où il opérera d’ici 2017.

Selon Bloomberg, Netflix cherche un partenaire chinois qui possède des licences sur tous types d’appareils, dont les téléphones, les boîtiers décodeurs et les ordinateurs. Le Wall Street Journal a rapporté que BestTV est un autre partenaire potentiel, bien que les discussions avec Wasu et BestTV n’en sont qu’à leurs débuts.

Les actions de Netflix ont franchi la barre des 600 $ avec les discussions concernant son désir d’accéder au marché chinois.

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