Après la victoire, le chemin à parcourir est encore long pour Bruno Retailleau

Par Julian Herrero
21 mai 2025 16:04 Mis à jour: 21 mai 2025 18:52

ANALYSE – Le 18 mai, Bruno Retailleau remportait largement la présidence de LR face au chef des députés de droite. Une grande victoire confirmant l’ascension politique de l’homme âgé de 64 ans. Pour autant, s’il entend peser en vue de la prochaine élection présidentielle, le nouveau leader des Républicains devra franchir une série d’étapes et pas des moindres.

Dimanche, un raz-de-marée retailliste s’emparait de LR. Le ministre de l’Intérieur était élu président des Républicains avec 74,3 % des voix contre 25,6 % pour Laurent Wauquiez. Longtemps considéré comme un parti en voie de disparition, plus particulièrement depuis la constitution de l’alliance entre le RN et l’Union des Droites pour la République d’Éric Ciotti, LR s’est retrouvé un nouveau leader et a renoué avec l’espérance.

Cette victoire n’a pas manqué de propulser l’ancien sénateur vendéen dans les enquêtes d’opinion. Une étude Ifop pour Le Figaro et Sud Radio réalisée entre les 19 et 20 mai faisait état d’une nette progression de Bruno Retailleau en cas de participation à l’élection présidentielle de 2027. Si le premier tour avait lieu dimanche prochain, il obtiendrait 16 % des voix et arriverait derrière Marine Le Pen (31 %) et Édouard Philippe (21 %). Une hausse de cinq points par rapport au sondage publié fin mars.

Autre fait notable, ce mardi, lors d’un hommage à Villiers-sur-Marne à la policière municipale tuée il y a 15 ans Aurélie Fouquet, l’ancien président de la République et homme fort de la droite, Nicolas Sarkozy, a affiché son soutien à son lointain successeur. « Ce n’est pas le lieu des félicitations, mais peut-être que tu as senti ma joie et ma confiance », a-t-il notamment déclaré.

Un RN toujours en tête

Mais pour l’ex-proche de Philippe de Villiers, le soutien massif des adhérents LR et la dynamique sondagière risquent de ne pas suffire. Le parti à la flamme va incontestablement constituer un obstacle majeur à franchir pour le nouveau leader de la droite. Malgré sa récente condamnation, Marine Le Pen reste solidement installée à la première place des intentions de vote au premier tour.

Le Rassemblement national a aussi la chance d’avoir sous la main un « joker » si la cheffe des députés RN n’était plus en mesure d’être candidate en 2027, notamment en la personne de Jordan Bardella. Le jeune président du parti, connu du grand public depuis les élections européennes de 2019 est lui aussi en pleine ascension politique. Toutes les études montrent qu’il arriverait, comme Marine Le Pen, en tête du premier tour des élections présidentielles. Il séduit également une part importante de la jeunesse. En mai 2024, 34 % des moins de 30 ans envisageaient de voter pour lui aux élections européennes. Un segment de la population que la droite a traditionnellement du mal à attirer.

Le parti nationaliste a aussi pour lui un argumentaire solide face à Bruno Retailleau. Celui qui consiste à revenir sur les échecs ou les promesses non tenues des Républicains lorsqu’ils étaient aux responsabilités.

Une rhétorique à laquelle le ministre de l’Intérieur devra répondre. « [Bruno] Retailleau nous fait croire qu’il peut régler les problèmes d’immigration en travaillant avec les macronistes et les socialistes et en refusant de travailler avec les patriotes. C’est un Sarkozy bis, il parle comme nous, mais n’agit pas », s’est d’ailleurs moqué le député RN de Moselle Laurent Jacobelli à l’antenne de BFMTV dimanche après l’annonce de la victoire de l’ancien président du groupe LR au Sénat.

La concurrence de Philippe et Attal

Le nouveau président de LR devra aussi composer au sein même du bloc central avec des concurrents de taille, notamment deux anciens Premiers ministres d’Emmanuel Macron : Édouard Philippe et Gabriel Attal.

L’ancien soutien d’Alain Juppé se prépare à l’élection présidentielle depuis plusieurs années et est en meilleure position que l’ex-sénateur LR dans les sondages. Même si dans le camp Horizons, on observe avec attention la trajectoire de Bruno Retailleau, il semble, pour l’heure, improbable qu’Édouard Philippe renonce à ses ambitions pour se ranger derrière le nouveau leader de la droite.

De son côté, le prédécesseur de Michel Barnier n’entend pas renoncer non plus à une éventuelle participation à la course pour l’Élysée en 2027. Il n’hésite d’ailleurs pas à empiéter sur les sujets de prédilection de Bruno Retailleau, à l’instar du séparatisme islamiste. Selon des informations du Parisien, l’ex-locataire de Matignon souhaite notamment interdire le voile dans l’espace public pour les mineurs de moins de 15 ans, créer un délit de contrainte au port du voile contre les parents obligeant leurs filles mineures à le porter et a appelé à une nouvelle « loi contre l’entrisme islamiste » dans la continuité de celle adoptée il y a quatre ans sur le séparatisme.

Par ailleurs, même si le Vendéen parvenait à se démarquer de ses rivaux, le soutien du bloc central serait loin d’être acquis. Le conservatisme de Bruno Retailleau sur les sujets de société en refroidit plus d’un au sein de la macronie. L’homme fort de Beauvau s’est, par exemple, déclaré opposé au texte sur la fin de vie actuellement débattu à l’Assemblée et porté par le député MoDem Olivier Falorni. « Ce n’est pas un texte de fraternité, c’est un texte d’abandon », dénonçait-il sur LCI en avril. Le rapporteur du texte avait alors fustigé la « violence » des mots du ministre de l’Intérieur.

Pour poursuivre son ascension, le nouveau président des Républicains devra aussi anticiper un énième obstacle politique : la possible censure du gouvernement Bayrou. La dynamique de Bruno Retailleau se poursuivrait-elle si ce dernier venait à être privé du « tremplin » de la place Beauvau ? Rien n’est moins sûr.

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