ENTRETIEN – Dimanche, le maire centriste de Bucarest Nicusor Dan a remporté l’élection présidentielle roumaine (53,6 %) face au candidat nationaliste George Simion (46,4 %). Une remontée spectaculaire pour le désormais président élu qui était arrivé loin derrière son adversaire au premier tour. Cette victoire de l’édile pro-européen intervient également cinq mois après l’annulation de la précédente élection par la Cour constitutionnelle. Le directeur de l’IREF Nicolas Lecaussin revient sur ce second tour qui n’a pas manqué de susciter des réactions et sur le profil du nouveau président roumain.
Epoch Times : Comment avez-vous réagi à la victoire du candidat pro-européen ?
Nicolas Lecaussin : Avec un grand soulagement. C’est grâce à une participation historique de 64,72 % (12 points de plus qu’au premier tour) que les Roumains ont finalement écarté le candidat George Simion qui était arrivé en tête le 4 mai avec plus de 40 % des voix, et élu le candidat de centre-droit, pro-européen et pro-occidental, Nicusor Dan.
Seule une forte mobilisation pouvait le faire gagner. Sans la diaspora roumaine, la différence est encore plus importante : 55,16 % contre 44,84 %. Et dans les grandes villes du pays, Dan a même obtenu des scores qui dépassent 70 %. Les jeunes, la classe moyenne, les minorités et les Moldaves ont largement voté en sa faveur.
George Simion a dénoncé des « fraudes ». Que s’est-il concrètement passé ?
Aucune preuve de « fraude » électorale n’existe à l’heure actuelle. George Simion, qui a d’ailleurs reconnu la victoire de son adversaire, est un grand expert en fake news et de mensonges en tous genres. Menteur, menaçant, agressif et insolent, il a montré son vrai visage, celui du meneur d’un groupe de supporters de foot, le seul passé « professionnel » qu’on lui connaisse.
À cela s’ajoutent ses innombrables changements de position et ses nombreuses promesses mensongères, dont celle d’offrir à chaque Roumain une maison à 35.000 euros.
Le patron de Telegram, Pavel Durov, a accusé la France d’ « ingérence » dans l’élection présidentielle roumaine. « Un gouvernement d’Europe occidentale a contacté Telegram pour nous demander de faire taire les voix conservatrices en Roumanie avant les élections présidentielles d’aujourd’hui », a-t-il publié sur X dimanche en ajoutant un emoji « baguette ». Qu’en pensez-vous ?
Le patron de Telegram est en train de négocier avec la DGSE son statut en France. Sortir ce genre d’énormité ne l’aidera pas beaucoup. Rappelons qu’il a soutenu aussi qu’il était un « dissident » en Russie. Ce qui ne l’a pas empêché de faire des dizaines d’allers-retours entre la France et la Russie ces dernières années.
Quand on sait comment Poutine traite ses opposants, on peut avoir pas mal de doutes sur les dires de Pavel Durov.
Quel programme Nicusor Dan a-t-il promis de mettre en œuvre – que ce soit en politique étrangère ou intérieure ?
Nicusor Dan a tenu un discours très clair pro-occidental et pro-européen (il faut rappeler que les sondages montrent qu’environ 80 % des Roumains sont pour l’Europe). C’est aussi un atlantiste et il va sûrement renforcer l’alliance avec les autres pays membres de l’OTAN.
La Roumanie est un pays stratégique, voisin de l’Ukraine et avec des bases en mer Noire. De nombreux militaires occidentaux, y compris français, sont présents sur son territoire. Sur le plan intérieur, le nouveau président renforcera la lutte contre la corruption et essayera de consolider les institutions. Le pays est divisé et il y a eu un rejet des partis politiques historiques au premier tour. Et c’est bien Nicusor Dan qui est le représentant de la société civile, indépendant et hors du « système ».
Simion est à la tête d’un parti politique qui existe depuis plusieurs années. De même, le nouveau président devra s’attaquer aux déficits publics et remettre le pays sur la voie de la croissance économique. Le PIB/hab (PPA) a été multiplié par 5 depuis l’adhésion de la Roumanie à l’UE en 2005 et il a dépassé aujourd’hui celui de la Grèce ou de la Hongrie. Il faut continuer sur cette voie.
Il a été élu pour la première fois maire de Bucarest en 2020, puis réélu en 2024. Quel est son bilan à la tête de la capitale roumaine ?
Le vainqueur, Nicusor Dan, est un mathématicien de renom qui a abandonné une brillante carrière en France (diplômé de Normale Sup’) pour se porter candidat et gagner la mairie de Bucarest où il s’est lancé dans la lutte contre la corruption locale. Il a réussi à s’opposer aux apparatchiks de la ville et à favoriser son développement économique.
Bucarest est aujourd’hui l’une des villes le plus riches d’Europe en PIB par habitant.
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