L’amour, le contrôle et le lâcher prise dans la famille tout comme en politique

Par Paul Adams
5 novembre 2019 08:13 Mis à jour: 5 novembre 2019 08:13

Tous les parents doivent apprendre un certain degré d’équanimité, une sorte de paix avec les choses telles qu’elles sont et ce que nous pouvons et ne pouvons pas faire à ce niveau-là.

Nous aimons nos enfants, mais nous avons un contrôle limité et décroissant sur eux. Nous voulons qu’ils soient heureux, mais nous réalisons qu’en fin de compte, leur bonheur dépend plus de leurs choix que des nôtres. Il en va de même pour les autres que nous essayons d’aider, que ce soit dans le monde de la politique ou sur le plan personnel.

Tous les parents doivent apprendre un certain degré d’équanimité, une sorte de paix avec les choses telles qu’elles sont et ce que nous pouvons et ne pouvons pas faire à ce niveau-là.

Nous aimons nos enfants, mais nous avons un contrôle limité et décroissant sur eux. Nous voulons qu’ils soient heureux, mais nous réalisons qu’en fin de compte, leur bonheur dépend plus de leurs choix que des nôtres. Il en va de même pour les autres que nous essayons d’aider, tant sur le plan politique que sur le plan personnel.

Nous avons, et nous devrions avoir, moins de contrôle que nous le pensons ou le voulons.

Le contrôle

Certains « professionnels de la protection de l’enfance », même s’ils travaillent dans le domaine de la protection de l’enfance ou de la sécurité du voisinage, aiment nier ou minimiser l’aspect de contrôle qui est impliqué lors de soins.

Il y a près de 20 ans, j’ai fait un exposé lors d’une conférence internationale à Istanbul. Ma femme et mon jeune fils, qui à l’époque était capable de ramper rapidement mais pas de marcher, sont arrivés, ce qui m’a fait vivre des aventures intéressantes. Dans mon article, j’ai établi un lien entre les soins sociaux et le contrôle, et un participant (européen) m’a dit que le travail social et les autres formes d’aide professionnelle concernaient l’éducation et non le contrôle. J’ai soutenu que l’attention ou l’amour étaient inséparables du contrôle – savoir quand on en a besoin et quand le parent ou le tuteur doit se retirer.

Dans le cas de notre bambin, le contrôle était essentiel, comme mon critique l’a reconnu lorsqu’il l’a vu courir vers la piscine de l’hôtel où nous étions en train de nous reposer. J’ai pris mon enfant, je l’ai ramené là où nous étions allongés au soleil, et il est reparti en rampant. Et encore une fois. Mon collègue a reconnu, en regardant la scène, que l’exercice du contrôle faisait partie des responsabilités familiales, surtout pour un parent.

Ce contrôle serein ne visait pas à manipuler ou à diriger la vie d’une personne, mais, dans ce cas-ci, à assurer la sécurité d’un enfant qui n’a pas l’expérience ou le jugement pour se rendre compte du danger.

L’équanimité

Mais comme tous les parents le savent, les enfants grandissent. Ils suivent leur propre voie, qu’on le veuille ou non. Ils apprennent par leur propre expérience et les conseils des parents, des enseignants et d’autres personnes que certaines choses qui les attirent sont dangereuses. Certains choix sont autodestructeurs, comme nous le disons avec amour (ou parfois avec exaspération). Mais c’est à eux de faire les choix.

Nous les aimons et leur souhaitons le bien, mais leur bonheur dans la vie dépend en fin de compte de leurs choix et non de nos souhaits les concernant.

À mesure que nos enfants deviennent plus indépendants, ils apprennent, nous l’espérons, les habitudes et les vertus du jugement pratique et de la prudence. Ils apprennent la maîtrise de soi afin de ne pas être dominés par leurs appétits ou leurs dépendances. Et ainsi de suite. Mais en tant que parents, nous devons en même temps apprendre et accepter que notre contrôle est limité et doit le rester.

Comme tous les humains, nos enfants ne sont pas des robots sans volonté propre. Apprendre cette attitude de lâcher prise, abandonner notre contrôle sur eux, qui n’a toujours été que temporaire et en cas de nécessité, exige pratique et humilité. Nous devons cultiver une attitude d’objectivité dans nos interventions face au monde, ce qui nous permet d’être en paix avec la réalité telle qu’elle est. C’est le contraire de l’agitation que nous ressentons lorsque nous avons envie que les choses soient différentes de ce qu’elles sont. Mais ce n’est pas la même chose que l’indifférence, qui peut sembler similaire, mais qui consiste plutôt à tourner le dos à la réalité dans une attitude de désintéressement.

En cultivant notre propre équanimité, nous la façonnons et l’enseignons aussi à ceux qui nous entourent. Nous espérons cultiver la gratitude comme une manière d’être dans le monde – par exemple, en comptant nos faveurs et en enseignant à nos enfants les habitudes de la gratitude plutôt que de croire que tout leur est du. De la même manière, nous apprenons et enseignons les limites de notre emprise sur les autres et les événements. Nous pratiquons une attitude de lâcher prise réaliste, mais pas indifférente ou insensible.

Une telle façon d’être dans le monde est nécessaire non seulement pour l’épanouissement de nos enfants en tant qu’individus, dans les relations avec les autres et dans la société. C’est aussi nécessaire à leur capacité de se libérer de leurs propres pulsions impatientes pour contrôler leurs aînés et transformer le monde à leur guise.

La politique de l’équanimité

De nombreux hommes d’État, premiers ministres et présidents, dont Clemenceau, Bismarck, Disraeli, Woodrow Wilson et Churchill, sont cités comme disant qu’un jeune homme qui ne serait pas socialiste (ou communiste ou libéral) avant un certain âge, n’a pas de cœur mais un homme qui l’est encore après cet âge, n’a pas de tête.

Les âges varient et nous ne pouvons pas prendre littéralement le contraste de la tête et du cœur, comme si la croissance de l’un signifiait la dégradation de l’autre. Mais les jeunes sont davantage attirés par la gauche de l’échiquier politique, à la fois en raison de la compassion qui lui est associée et de leur propre sentiment d’urgence face aux problèmes qu’ils identifient et de la nécessité d’agir maintenant, de balayer tous les obstacles de côté.

La vertu de prudence ou de jugement pratique, par contre, ne s’acquiert qu’avec maturité et expérience. L’équanimité en tant qu’habitude et manière d’être vient aussi avec l’âge et l’expérience. Elle reconnaît les limites de nos connaissances et de notre capacité à contrôler notre monde et notre société. Elle ne cherche pas à forcer les autres à accepter notre point de vue ou à imposer une orthodoxie imposée par les quelques érudits aux masses les plus démunies – que ce soit par le pouvoir de l’État ou par les sociétés « éveillé ». C’est l’attitude du révolutionnaire utopique, de l’autoritarisme ou du « complexe de Dieu » qui fait partie intégrante du progressisme ou du socialisme sous toutes ses formes.

D’autre part, l’équanimité ou l’impartialité n’est pas une absence de compassion. Elle ne se détourne pas de la réalité dans la direction opposée, dans une attitude d’indifférence au bien commun. Une telle position est parfois associée et même exprimée par des adeptes du libertarianisme dans la vie économique ou le comportement sexuel. Une telle indifférence se détourne de la réalité, pas moins que l’utopisme éveillé – elle rejette l’action publique pour aider ceux qui sont piégés dans des industries ou des régions mourantes, par exemple, ou pour lutter contre des fléaux publics comme l’épidémie des stupéfiants, l’accès facile des mineurs à la pornographie, ou la sexualisation d’enfants.

L’équanimité, en revanche, n’hésite pas à se soustraire au contrôle parental ou à l’action du gouvernement lorsqu’elle est nécessaire et ne viole pas injustement l’autonomie et la liberté des autres. Elle cherche à aider comme elle le peut mais aussi à lâcher prise, à respecter les choix des autres.

Le défi pour les parents, les psychothérapeutes et les dirigeants est d’apprendre la différence, de discerner quand leur travail est de contrôler et quand lâcher prise. Respecter la pleine humanité de celui que nous cherchons à aider ou à guider signifie être impartial et non manipulateur. C’est accepter la réalité que d’autres feront des choix qui ne seraient pas les nôtres, mais qui, de toute façon, ne sont pas de notre responsabilité.

Paul Adams est professeur émérite de travail social à l’université d’Hawaii et a été professeur et doyen associé des affaires universitaires à la Case Western Reserve University. Il est co-auteur de Social Justice Isn’t What You Think It Is (la justice sociale n’est pas ce que vous en pensez) et a écrit de nombreux articles sur les politiques de protection sociale et l’éthique professionnelle.

Les opinions exprimées dans cet article sont celles de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement celles d’Epoch Times.

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