Nouvelle-Aquitaine : le maire d’un village porte plainte contre un enfant de cinq ans accusé de violences scolaires

Par Paul Tourège
24 décembre 2019 15:45 Mis à jour: 24 décembre 2019 15:45

Dépassée par le comportement d’un élève scolarisé dans une école primaire de sa commune, le maire a décidé de déposer plainte pour « venir en aide à cet enfant » et « protéger [son] personnel ».

Le 11 octobre, le maire de La Villedieu-du-Clain, une commune de moins de 2000 habitants située à une quinzaine de kilomètres au sud de Poitiers, a déposé plainte contre un enfant de cinq ans scolarisé à l’école maternelle du village depuis 2016.

Le 6 décembre, Vanessa, la mère de l’enfant concerné, s’est rendue à la gendarmerie après avoir reçu une convocation. C’est là qu’elle a appris que le maire de la commune avait porté plainte contre son plus jeune fils, accusé de violences scolaires.

« Je suis tombée des nues […] Cette plainte est immonde ! Je trouve ça hallucinant que l’on puisse porter plainte contre un enfant de 5 ans et demi qui relève en plus d’un dossier MDPH (Maison départementale des personnes handicapées, ndlr) », a-t-elle expliqué aux journalistes de France Bleu.

« Il aurait mordu un Atsem (Agent territorial spécialisé des écoles maternelles, ndlr). Je suis consciente que mon enfant a des troubles du comportement et une agressivité qui est exacerbée avec les autres élèves et les adultes, j’en discute souvent avec l’enseignante. Mais j’aimerais avoir du soutien plutôt que l’on m’enfonce. C’est dur en tant que maman seule, je gère déjà mon fils aîné de sept ans qui est autiste, car il n’y a pas de place à l’heure actuelle en IME (Institut médico-éducatif, ndlr) », poursuit Vanessa.

« Quand on a des enfants qui ne sont pas dans le moule, qui sont différents, on en prend plein la gueule. Pour qu’ils soient acceptés dans la société, c’est un combat de chaque instant », ajoute-t-elle.

Une décision « abominable » selon la mère de l’enfant

Interrogée par France Bleu, Isabelle Domont, maire de La Villedieu-du-Clain, assure qu’il n’y avait pas d’« autres issues » que de porter plainte, le comportement de l’enfant mettant « les autres élèves » en danger.

« C’était des coups de crayon dans les cuisses, une fois je l’ai surpris en train de jeter son sac, il avait blessé l’institutrice à la lèvre, il tirait les cheveux, il y a aussi des crachats et beaucoup de griffures », précise l’édile, qui assume totalement sa plainte.

« Nous avions accueilli à l’école leur enfant qui est autiste. C’est compliqué d’avoir déjà un enfant malade, alors d’en avoir un second… en difficulté, mais là c’était de grosses violences », renchérit Mme Domont.

« Déposer une plainte contre l’enfant, pour moi c’était le seul moyen de dire qu’il fallait une aide, c’était aussi pour protéger mon personnel qui ne sait plus comment agir avec cet enfant. Ce n’est pas une plainte pour assassiner la famille ou leur faire du mal, c’est avant tout une plainte pour venir en aide à cet enfant », a déclaré Mme Domont aux journalistes de France 3.

Une décision que ne comprend pas Vanessa dont le fils ainé, autiste, est scolarisé à domicile.

« Si son but est vraiment d’aider mon enfant, je trouve que c’est quand même une manière extrême de le faire et pourquoi ne m’a-t-elle pas convoquée. Je trouve ça particulier de porter plainte contre un enfant de cinq ans… je trouve ça abominable. Elle dit qu’elle veut protéger son personnel, mais on parle de protéger le personnel contre un enfant de cinq ans, je trouve ça hallucinant même si il y a des faits de violence de sa part », soupire la mère de famille.

L’enfant changera d’établissement scolaire à la rentrée

Au courant de la situation, les services départementaux de l’Éducation nationale expliquent avoir mis en place un suivi et un emploi du temps allégé pour l’enfant depuis 2018.

Ils soulignent également avoir organisé plusieurs réunions avec les parents de l’enfant, son enseignante, ainsi qu’un enseignant spécialisé et une psychologue du Réseau d’aides spécialisées aux élèves en difficulté (Rased).

À la rentrée 2019, l’enfant a de nouveau été scolarisé à temps plein à l’école mais ses problèmes de comportement ont repris, obligeant le rectorat de Poitiers à prononcer une exclusion de trois semaines à son encontre.

« Le directeur académique de la Vienne a prononcé un retrait temporaire de scolarisation jusqu’aux vacances de Noël pour apaiser la situation », précise le rectorat.

« Durant toute cette période, l’enfant a bénéficié du dispositif des Services d’assistance pédagogique à domicile (Sapad), destinés à fournir aux enfants et adolescents atteints de troubles de la santé une prise en charge à la maison, l’objectif étant de ne pas rompre les apprentissages. »

Dès la rentrée scolaire, le fils cadet de Vanessa sera scolarisé dans une école primaire d’une commune voisine, à raison de huit heures par semaine. Un nouvel allègement du temps scolaire qui a pour objectif de « prendre en considération ses besoins particuliers et laisser le temps nécessaire aux soins ».

Bouleversée par la plainte déposée contre son fils, la mère de famille envisage désormais de déménager : « Comment être bien dans un village où la maire porte plainte contre son enfant de 5 ans et demi ? »

Elle-même mère de deux filles, Isabelle Domont assure avoir fait de son mieux pour soutenir la famille de Vanessa le plus longtemps possible.

« J’ai accompagné la maman, mais au bout d’un moment j’ai dit stop, car c’était toujours la faute de la mairie ou de l’équipe scolaire qui n’était pas compétente. Mon personnel éducatif n’a jamais rencontré des difficultés comme ça, jamais », conclut l’édile.

Soutenez Epoch Times à partir de 1€

Comment pouvez-vous nous aider à vous tenir informés ?

Epoch Times est un média libre et indépendant, ne recevant aucune aide publique et n’appartenant à aucun parti politique ou groupe financier. Depuis notre création, nous faisons face à des attaques déloyales pour faire taire nos informations portant notamment sur les questions de droits de l'homme en Chine. C'est pourquoi, nous comptons sur votre soutien pour défendre notre journalisme indépendant et pour continuer, grâce à vous, à faire connaître la vérité.